Page Précédente

Irak: les Kurdes préfèrent McCain mais n'ont pas peur d'Obama


Vendredi 31 octobre 2008 à 10h18

SOULEMANIYAH (Irak), 31 oct 2008 (AFP) — Le coeur des dirigeants kurdes irakiens penche plutôt en faveur du candidat républicain John McCain, mais personne ne croit vraiment à un changement de la politique américaine si le démocrate Barack Obama devient président.

"La majorité des Kurdes préfère les républicains qui ont suivi une politique très claire en faveur de l'Irak, même s'il n'y a pas de différences notables entre McCain et Obama", affirme le président de la commission des relations extérieures au sein du Parlement régional kurde, Aref Abdallah.

"Leurs divergences sur l'Irak sont plus sur la forme que sur le fond", assure ce membre du l'Union patriotique du Kurdistan (UPK, du président irakien Jalal Talabani).

Assis dans son bureau à Soulemaniyah, l'une des deux grandes villes du Kurdistan, il rappelle qu'en 2000, les Kurdes préféraient le vice-président démocrate Al Gore à son challenger républicain George Bush.

"Ils estimaient que les démocrates étaient contre le régime baassiste mais il s'est avéré que ce sont les républicains qui ont changé l'Irak", ajoute-t-il.

Jouissant d'une autonomie de fait depuis 1991 à la suite de la première guerre du Golfe et l'interdiction faite à l'aviation irakienne de survoler leur territoire, les Kurdes ont accueilli avec une joie sans réserve l'invasion conduite par les Etats-Unis en mars 2003 qui a abouti à la chute de Saddam Hussein.

La nouvelle donne a permis à cette communauté d'acquérir une très large autonomie en 2005 dans la constitution initiée par les Américains, et un pouvoir qu'ils n'avaient jamais obtenu auparavant.

"Les Kurdes ont peur de perdre leurs acquis. En 1991, Bush père a créé une zone d'exclusion (aérienne) et Bush fils a changé de régime", a souligné M. Abdallah.

Pour Yassine Taha, un enseignant, "l'ambiguïté de la position d'Obama envers les Kurdes a suscité l'inquiétude au sein de leurs élites".

"Les républicains ont soutenu les Kurdes en Irak mais il n'y a aucune garantie qu'Obama continue sur la même voie car il a déclaré (...) qu'il préférait se concentrer sur l'Afghanistan".

En juillet, lors d'une visite à Kaboul, M. Obama avait estimé que "ne pas avoir terminé (le) travail" en Afghanistan avait été "l'une des plus grosses erreurs commises après le 11 septembre 2001".

"Nous avons été distraits par l'Irak", avait-il déploré.

Mohammad Hakim, membre du bureau politique du Groupe islamique kurde représenté au Parlement régional, qui est plutôt en faveur d'Obama, reconnaît toutefois que "l'actuelle direction kurde préfère Bush et considère que si McCain est élu, il appliquera la même politique".

A Erbil, la capitale du Kurdistan, le président UPK du Parlement autonome dit, lui, ne pas voir de "grande différence" entre les candidats.

"Selon nous, l'intérêt américain est de poursuivre la politique menée par l'administration actuelle", assure Adnane el-Moufti.

"On ne change pas la politique étrangère en changeant de président américain. Le grand changement se produira surtout en politique intérieure."

Le vice-président du Parlement, qui appartient au Parti démocratique du Kurdistan (PDK de Massoud Barzani), partage ce point de vue. "Il y aura peut-être un changement de tactique des Etats-Unis, mais pas de stratégie", assure Kamal Kirkouli.

Barack Obama a quand même des partisans à Souleimaniyah. "Obama est jeune et dynamique. Nous en avons assez de la politique de Bush et des républicains et McCain c'est la même chose que Bush", souligne Askoul Rassoul, 53 ans, employée au "ministère" local des Affaires sociales.

A ce propos, elle estime que cela pourrait servir de leçon au Kurdistan. "J'ai l'espoir de voir un jeune à la tête du Kurdistan irakien et d'en finir avec les dirigeants traditionnels et vieux". Jalal Talabani aura 75 ans dans deux semaines et Massoud Barzani est âgé de 62 ans.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.