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Irak: le Kurdistan doit agir d'urgence contre l'excision


Mercredi 16 juin 2010 à 15h50

ERBIL (Irak), 16 juin 2010 (AFP) — L'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch a appelé mercredi les autorités du Kurdistan irakien à agir d'urgence pour empêcher la pratique de l'excision, que subissent "un nombre important de filles et de femmes" dans la région autonome.

"Le gouvernement régional du Kurdistan doit prendre des mesures immédiates pour mettre un terme aux mutilations génitales féminines (MGF) et développer un plan pour leur éradication, notamment une loi pour interdire cette pratique", estime l'ONG dans un rapport présenté à Erbil, capitale de la région autonome.

Nadya Khalife, chercheuse sur les droits des femmes à HRW, a indiqué à l'AFP avoir rencontré en 2009 dans quatre villages du Kurdistan et dans la ville de Halabja plusieurs dizaines de filles et de jeunes femmes qui lui ont livré leurs douloureux témoignages, compilés dans ce rapport de 73 pages.

Parmi elles, Gola, une étudiante de 17 ans originaire du village de Plangan, raconte comment sa mère et la belle-soeur de cette dernière l'ont un jour emmenée dans un village voisin où d'autres filles devaient aussi être excisées.

"Ils nous ont mises dans la salle de bain, nous ont maintenu les jambes écartées et ont coupé quelque chose", raconte la jeune femme dans le rapport. "Ils l'ont fait une par une sans anesthésie. J'avais peur mais j'ai enduré la douleur", poursuit-elle.

"Je souffre beaucoup dans cette zone spécifique quand j'ai mes règles", explique-t-elle.

L'ONG basée à New York note que la prévalence des MGF au Kurdistan n'est "pas entièrement connue" car le gouvernement autonome n'a pas l'habitude de faire des recherches sur la question.

Mais l'organisation estime que cette pratique, qui "n'a aucun but médical" mais "peut entraîner de graves séquelles physiques et émotionnelles", est "répandue".

"Les MGF violent les droits des femmes et des enfants, notamment leur droit à la vie, à la santé et à l'intégrité corporelle", explique Mme Khalife.

Human Rights Watch note que le gouvernement régional a pris certaines mesures, notamment un décret en 2007 prévoyant des poursuites contre les auteurs de MGF, mais rien ne prouve qu'il ait été appliqué.

Le Parlement régional a appuyé en 2008 l'introduction d'une loi interdisant cette pratique, mais celle-ci n'a jamais été promulguée et en 2009, le ministère de la Santé a annoncé une "campagne globale" contre l'excision qui n'a en fait jamais vu le jour.

"Il est temps que le gouvernement régional passe à l'action et prenne des mesures concrètes pour éliminer cette pratique néfaste parce qu'elle ne va tout simplement pas disparaître d'elle-même", estime Mme Khalife.

Les MGF concernent toutes les interventions incluant l'ablation ou la lésion des organes génitaux externes de la femme, effectuée pour des raisons culturelles ou religieuses.

L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) avait indiqué en février que cette pratique touchait entre 120 et 140 millions de femmes et de filles dans le monde, surtout en Afrique.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.