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Irak: la famille d'un journaliste assassiné condamne l'enquête du Kurdistan


Jeudi 16 septembre 2010 à 11h09

ERBIL (Irak), 16 sept 2010 (AFP) — La famille d'un journaliste assassiné au Kurdistan a condamné jeudi les premières conclusions d'une enquête ordonnée par le gouvernement de cette région autonome du nord de l'Irak, qui a affirmé que le reporter avait été tué par un groupe islamiste auquel il était lié.

Auteur d'articles très critiques contre les dirigeants kurdes et la corruption, Sardasht Osman, 22 ans, avait été enlevé le 4 mai à Erbil, la capitale kurde, et retrouvé 24 heures plus tard avec une balle dans la tête.

Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), basé à New York, s'est dit mercredi consterné par l'enquête officielle du Kurdistan qu'il a jugée "déficiente" et manquant de crédibilité.

La commission d'enquête mise en place par le président du Kurdistan, Massoud Barzani, a affirmé mercredi que M. Osman était "lié" à Ansar al-Islam, et qu'il avait été tué par des membres de ce groupe islamiste "parce qu'il leur avait promis de travailler avec eux avant de se rétracter".

"Non seulement nous rejetons les résultats de l'enquête, mais nous condamnons aussi cette action et nous exprimons notre colère face à ces tentatives qui visent à le faire passer pour un terroriste coopérant avec Ansar al-Islam", a déclaré Baker Osman, le frère de Sardasht, dans un communiqué publié à Erbil au nom de sa famille.

"Quiconque connaît Sardasht, ou lit ses articles, sait qu'il était un laïc, très éloigné de l'idéologie terroriste", a ajouté M. Osman, qui vit en Suède.

La famille a par ailleurs demandé une enquête indépendante sur cet assassinat, contestant la légitimité de la commission.

Le CPJ a également appelé dans son communiqué à une "enquête crédible".

"Nous espérions davantage qu'un rapport de 430 mots qui lance des affirmations hautement improbables sans les étayer", a déclaré Mohamed Abdel Dayem, un responsable du CPJ.

Etudiant en langue et littérature anglaise l'Université Salaheddine d'Erbil, Sardasht Osman écrivait dans plusieurs publications.

Dans un de ses articles les plus critiques et intitulé "J'aime la fille de Massoud Barzani", publié dans le Kurdistan Post, il condamnait la corruption des dirigeants kurdes, se mettant en scène sous la forme d'un rêve.

"Quand je deviendrai le gendre de Barzani, la nuit de noce se déroulera à Paris et nous visiterons le palais de notre oncle pour plusieurs jours aux Etats-Unis. Nous quitterons nos rues pauvres d'Erbil pour aller vivre dans les beaux quartiers et je serai protégé la nuit par des chiens policiers américains et des gardes israéliens", a-t-il notamment écrit.

Dans un autre article, il faisait état de menaces de mort.

"Au cours des derniers jours on m'a dit que je n'avais plus longtemps à vivre et que les bouffées d'air que je respirais étaient les dernières", écrivait-il. "Je me fiche de la mort et de la torture et j'attendrai ma mort et le dernier rendez-vous avec mes assassins".

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.