Page Précédente

Irak: la Cour suprême déclare le référendum kurde "anticonstitutionnel"


Lundi 20 novembre 2017 à 11h17

Bagdad, 20 nov 2017 (AFP) — La Cour suprême irakienne a déclaré lundi "anticonstitutionnel" le référendum d'indépendance de la région autonome du Kurdistan, dernier épisode en date de la crise entre Bagdad et Erbil née de cette consultation, organisée en septembre contre l'avis des autorités fédérales.

La Cour suprême indique dans un communiqué avoir "rendu une décision déclarant anticonstitutionnel le référendum tenu le 25 septembre 2017 au Kurdistan irakien et dans des zones en dehors de la région autonome".

La décision prévoit en outre d'"annuler l'ensemble des conséquences et des résultats qui en ont découlé".

L'annulation de cette consultation est la condition préalable au dialogue posée par Bagdad, tandis qu'Erbil refuse de revenir sur la victoire écrasante du "oui".

La semaine dernière, alors qu'approchait l'échéance annoncée par la Cour suprême pour rendre sa décision sur la constitutionnalité du référendum, le gouvernement du Kurdistan irakien avait dit "respecter" les décisions de la plus haute instance juridique du pays.

Il avait notamment dit respecter une décision précédente insistant sur le premier article de la Constitution qui mentionne "l'unité de l'Irak" et avait dit vouloir en faire "une base pour le dialogue".

Lundi, la Cour suprême a estimé que la tenue du référendum "contredisait" cet article de la Constitution, a souligné le porte-parole de la Cour Ayas al-Samouk, dans le communiqué.

Acculé, le Kurdistan tente désormais de manoeuvrer face à Bagdad, où le Parlement examine actuellement le budget fédéral pour l'année à venir, et notamment la part qui sera réservée à la région autonome.

Les autorités locales kurdes n'ont pas commenté la décision de la Cour suprême dans l'immédiat.

Mais Abdel Salam Barwari, ancien député et membre du Parti démocratique du Kurdistan (PDK) de Massoud Barzani, qui a quitté la présidence de la région autonome début novembre, l'a dénoncé auprès de l'AFP.

"C'était une décision prévisible vu le passé de cette Cour et le fait qu'elle est maintenant devenue un outil politique", a-t-il déclaré.

- Deux mois de crise -

Le 25 septembre, M. Barzani organisait en grande pompe un référendum d'indépendance.

Cette consultation s'est tenue dans les trois provinces de Dohouk (nord-ouest), Erbil (nord) et Souleimaniyeh (nord-est), qui constituent la région autonome, mais également dans des zones disputées, placées selon la Constitution sous l'autorité du pouvoir central à Bagdad.

Depuis, la crise n'a cessé de s'envenimer entre Erbil et Bagdad et, début novembre, M. Barzani quittait son poste après avoir perdu la quasi-totalité des zones disputées et l'ensemble de leurs ressources pétrolières qui auraient pu assurer la viabilité économique d'un hypothétique Etat kurde.

Le 16 octobre, les forces gouvernementales et paramilitaires irakiennes sont entrées en mouvement pour reprendre l'ensemble des zones disputées.

Ces régions sont revendiquées à la fois par le gouvernement régional kurde et Bagdad et, selon la Constitution, leur statut doit encore être discuté au cours de négociations à venir.

Depuis l'invasion américaine de 2003 et dans le sillage du chaos créé en 2014 par la percée jihadiste, les peshmergas (combattants kurdes) en avaient de fait pris le contrôle.

En deux semaines, Bagdad a repris le contrôle de leur quasi-totalité dans le but de revenir à la "ligne bleue" de 2003, qui limite les trois provinces du Kurdistan irakien.

Bagdad et Erbil ont également délivré des mandats d'arrêt contre des personnalités politiques et militaires des deux camps.

Le Kurdistan irakien a délivré des mandats d'arrêt contre onze personnalités irakiennes, dont des dirigeants des unités paramilitaires du Hachd al-Chaabi, combattant aux côtés des forces gouvernementales.

De son côté, un tribunal de Bagdad en a émis contre les organisateurs du référendum ainsi que contre le vice-président du Kurdistan irakien et haut dirigeant de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), Kosrat Rassoul.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.