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Irak: horizons incertains pour la force militaire arabo-kurde de Kirkouk


Mardi 9 août 2011 à 10h25

KIRKOUK (Irak), 9 août 2011 (AFP) — Sa création l'an dernier devait aider à désamorcer l'un des plus épineux conflits de l'Irak post-Saddam Hussein: le conflit entre Arabes et Kurdes dans le nord du pays. Mais à Kirkouk, la force militaire conjointe arabo-kurdo-américaine fait face à un avenir incertain.

L'armée américaine, après avoir parrainé début 2010 la naissance de ce qui a été baptisé Force combinée de sécurité (FCS) dans la province pétrolière et multiethnique de Kirkouk, s'en retire à présent progressivement dans la perspective de son départ d'Irak, prévu fin 2011.

Lancée en 2009 et concrétisée l'an dernier, l'idée de faire patrouiller ensemble des militaires américains, kurdes et arabes dans cette région, que se disputent âprement le gouvernement central de Bagdad et la région autonome du Kurdistan, a donné des résultats en termes de sécurité, estiment les militaires.

Le nombre d'incidents violents a reculé dans cette zone depuis début 2010, indique le colonel américain Michael Bowers, chargé de conseiller le commandement central pour le nord de l'Irak en matière de stratégie.

Et la cohabitation sur les points de contrôle de soldats arabes et kurdes se passe globalement bien, ce qui n'apparaissait pas gagné d'avance au vu des tensions toujours vivaces autour des "territoires disputés", un conflit qui remonte à leur arabisation forcée au début des années 1990 par Saddam Hussein.

A Kirkouk, le projet a même été étendu: d'une centaine d'hommes, il est passé à environ 350, déployés actuellement sur six points de contrôle de la ville. Il est même question d'augmenter encore leur nombre à plus d'un millier, selon des responsables américains.

Malgré ces succès, les officiers américains craignent que le mandat de la FCS ne soit devenu trop large et trop complexe, le tout sur fond de difficultés financières et logistiques.

"Nous faisons face à des défis car cette force est nouvelle et contient trois groupes" ethniques, admet le colonel de police irakien Salaheddine Saber, qui commande le bataillon.

Parmi ces défis "figurent le soutien logistique et l'approvisionnement en carburant et véhicules", souligne-t-il.

Pour l'heure, le colonel Saber "est contraint de faire la tournée pour obtenir des ressources de tout le monde", note le lieutenant colonel américain Joseph Holland.

"Ce qu'il leur faut, c'est une ligne budgétaire séparée de Bagdad (...) pour qu'ils n'aient pas constamment à payer pour faire fonctionner cette affaire", souligne-t-il. La solution actuelle est loin d'être idéale, admet-il.

Les responsables américains déplorent aussi que la force conjointe soit utilisée sur des points de contrôle, là où ils estiment que des policiers irakiens auraient fait l'affaire.

Or, les effectifs de la FCS ne lui permettent pas à la fois de se déployer sur des points de contrôle et de mener des patrouilles, souligne Joseph Holland.

Pendant ce temps, le conflit opposant Bagdad et le Kurdistan pour la souveraineté de Kirkouk et de la vaste bande de territoire riche en ressources pétrolières qui l'entoure ne donne guère de signe de progrès.

Les tensions ont connu un pic fin février lorsque des peshmergas (combattants kurdes) ont fait avancer leurs forces vers Kirkouk, disant vouloir protéger la ville alors que des manifestations secouaient tout le pays. Ils se sont finalement retirés fin mars.

Durant cette période tendue, les rencontres hebdomadaires sur la sécurité à Kirkouk entre les différents leaders ont été annulées, et n'ont repris que sur l'insistance des forces américaines. Et ce différend, bien que réglé depuis, peut faire douter de la capacité des deux communautés à régler une crise sans médiation américaine, reconnaissent à demi-mot les responsables américains.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.