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Irak: des tirs de roquettes font dix blessés, le Parlement veut élire un président


Jeudi 13 octobre 2022 à 13h04

Bagdad, 13 oct 2022 (AFP) — Des tirs de roquettes ont visé jeudi la Zone verte de la capitale irakienne faisant dix blessés, au moment où le Parlement se réunissait pour tenter d'élire un nouveau président de la République et sortir le pays d'une profonde impasse politique accompagnée de violences.

Avec 269 députés sur 329 rassemblés dans l'hémicycle, le quorum a été atteint et la séance a débuté avec deux heures de retard, a rapporté un correspondant de l'AFP au Parlement, les blocs poursuivant jusqu'à la dernière minute les tractations, dans un pays multiconfessionnel et multiethnique profondément polarisé.

Illustrant les tensions, neuf roquettes de type katioucha se sont abattues sur la Zone verte, secteur abritant le Parlement et autres institutions gouvernementales et ambassades, ainsi que sur un quartier limitrophe, selon un communiqué des forces de sécurité.

Un projectile est tombé près de l'Assemblée et un correspondant de l'AFP au Parlement a entendu plusieurs explosions. Ces tirs, récurrents, n'ont pas été revendiqués.

Dix personnes ont été blessées, dont six membres des forces de l'ordre ou des gardes assurant la sécurité des députés, selon un responsable de sécurité. Quatre civils ont été blessés par une roquette tombée sur un quartier limitrophe de la Zone verte.

Depuis les législatives du 10 octobre 2021, les barons de la politique n'ont pas réussi à s'entendre sur un nouveau président, ni à désigner un Premier ministre.

En filigrane transparaissent les luttes d'influences entre les deux pôles chiites dominant le pouvoir : d'un côté les factions pro-Iran du Cadre de coordination, de l'autre l'imprévisible chef religieux Moqtada Sadr.

Mais la présidence de la République, fonction honorifique traditionnellement réservée à l'importante minorité kurde, cristallise les tensions entre les deux partis historiques.

Le poste revient généralement à l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), tandis que le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) garde la haute main sur les affaires du Kurdistan autonome. Mais désormais, le PDK exige la présidence à Bagdad.

- "Tout peut changer" -

À trois reprises cette année, le Parlement a tenté sans succès d'élire un président, sans atteindre le quorum des deux tiers.

Le président sortant Barham Saleh, représentant officiel de l'UPK, est candidat à sa succession.

Mais un autre candidat a refait surface à la dernière minute, pendant que les deux partis kurdes n'arrivaient pas à s'accorder : l'ancien ministre Abdel Latif Rachid -- leader historique de l'UPK -- qui s'est présenté de son propre chef, à 78 ans.

Le PDK (31 députés) a, lui, retiré son candidat Rebar Ahmed, et votera pour Abdel Latif Rachid, a indiqué à l'AFP un haut responsable du parti Bangen Rekani.

Une fois élu, le président pourra désigner un Premier ministre -- choisi par la plus grande coalition parlementaire -- qui entamera des tractations ardues pour former un gouvernement.

Pour le poste de Premier ministre, "le favori est Mohamed Chia al-Soudani", indique le politologue Hamzeh Hadad, en référence à l'ancien ministre de 52 ans, candidat du Cadre de coordination.

"Mais en politique irakienne tout peut changer jusqu'à la dernière minute".

En Irak, depuis l'invasion américaine qui renversa en 2003 Saddam Hussein, la communauté chiite, majoritaire, domine le pouvoir et ses partis donnent le la à la vie politique.

- "Affrontements meurtriers" -

Cet été, la candidature de Mohamed Chia al-Soudani avait mis le feu aux poudres et provoqué des tensions entre le Cadre de coordination et le Courant sadriste -- les partisans de Sadr campant aux abords du Parlement pendant un mois.

Mais le Cadre de coordination, qui regroupe notamment les ex-paramilitaires du Hachd al-Chaabi et l'ex-Premier ministre Nouri al-Maliki, rival historique de M. Sadr, n'a jamais fait marche arrière.

Cette coalition veut former un gouvernement. Elle représente aujourd'hui la première force au sein du Parlement, après le retrait inattendu des 73 députés du Courant sadriste.

Habitué aux coups d'éclats, Moqtada Sadr exige d'abord une dissolution du Parlement et des législatives anticipées.

Reste à savoir quelle sera désormais sa réaction.

Il a démontré ces dernières semaines sa capacité à déstabiliser l'échiquier politique en mobilisant des dizaines de milliers de manifestants dans les rues.

L'épreuve de force a atteint son paroxysme le 29 août, quand plus de 30 partisans sadristes ont été tués dans des affrontements contre l'armée et les forces du Hachd al-Chaabi, intégrées aux troupes régulières.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.