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Il y a 20 ans, la capture du chef kurde Abdullah Öcalan


Mercredi 13 février 2019 à 09h10

Paris, 13 fév 2019 (AFP) — Le 15 février 1999, la Turquie capturait son ennemi public numéro un, le chef rebelle kurde Abdullah Öcalan, lors d'une opération de ses forces spéciales au terme d'une longue cavale et d'une traque acharnée.

- Exil syrien -

En 1980, deux ans après avoir fondé son Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, indépendantiste), Abdullah Öcalan fuit la Turquie.

Il décide quatre ans plus tard d'engager la lutte armée. Aux attaques du PKK répond la répression des forces de sécurité. Très vite, il devient la bête noire d'Ankara qui qualifie son organisation et lui-même de "terroristes sanguinaires".

Il va résider, selon Ankara, le plus souvent à Damas ou dans la plaine libanaise de la Bekaa sous contrôle syrien, où il installe son quartier général.

En octobre 1998, le dirigeant kurde est contraint de quitter la Syrie à la suite des menaces d'Ankara d'entreprendre une action militaire contre ce pays s'il continue à l'abriter.

- Arrestation -

Après Moscou, le chef kurde se réfugie en Italie, où sa présence provoque une crise diplomatique entre Ankara et Rome qui refuse de l'extrader, arguant de l'existence de la peine de mort en Turquie. Il quitte l'Italie le 16 janvier 1999 et frappe en vain à la porte de plusieurs pays de l'Union européenne pour demander l'asile politique.

Traqué par des agents turcs, Abdullah Öcalan se cache à Athènes, avant d'être évacué avec l'aide des services de renseignement grecs vers l'ambassade de Grèce à Nairobi, au Kenya.

L'affaire soulève un tollé en Grèce qui entraînera le limogeage de plusieurs ministres.

Le 15 février, il quitte la résidence de l'ambassadeur de Grèce où il séjournait depuis douze jours, apparemment dans l'intention de quitter le Kenya, mais il est intercepté en route vers l'aéroport par un commando turc.

Le lendemain, le Premier ministre turc Bülent Ecevit annonce qu'Abdullah Öcalan "a été arrêté lors d'une opération secrète" des forces de sécurité et se trouve en Turquie où il va être jugé. "Nous avions dit que nous le capturerions où qu'il soit dans le monde. Nous avons rempli cette promesse".

La télévision turque diffuse une vidéo montrant le chef rebelle menotté et le visage bandé dans l'avion qui l'emmène vers la Turquie.

- Protestations -

A l'annonce de sa capture, ambassades et consulats grecs sont pris d'assaut par des militants kurdes dans plusieurs villes européennes. Plusieurs partisans d'Öcalan s'immolent par le feu ou tentent de le faire.

Le PKK dénonce la "responsabilité" de la Grèce et du Kenya. Il accuse les Etats-Unis et Israël d'être impliqués dans l'"enlèvement" de son chef. Les renseignements israéliens nient toute implication, tout comme Washington, qui se dit cependant "très satisfait" de la capture de celui qu'il considère comme un "leader terroriste".

Des sympathisants du PKK envahissent le consulat d'Israël à Berlin. Quatre Kurdes sont tués par les forces de sécurité israéliennes.

- Prison à vie -

Dès son arrivée en Turquie, Öcalan est incarcéré sur l'île prison d'Imrali (nord-ouest), au large d'Istanbul.

Le 31 mai 1999, Abdullah Öcalan appelle son parti à déposer les armes, au premier jour de son procès.

Celui-ci va se dérouler sous état de siège dans une ambiance lourde de tensions, sur l'îlot dont il est l'unique prisonnier. L'accusé est protégé par une cage vitrée pare-balle.

Le 29 juin, Öcalan est condamné à mort pour trahison et tentative de diviser la Turquie. La plupart des capitales européennes appellent Ankara à la clémence. Des manifestations éclatent en Europe.

En 2002, l'abolition de la peine de mort permet de commuer sa condamnation en réclusion à perpétuité.

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) confirme en 2005 la condamnation de la Turquie pour "procès inéquitable" et recommande un nouveau procès.

En 2013, Abdullah Öcalan a appelé ses troupes à un cessez-le-feu pour permettre aux discussions qu'il menait avec Ankara d'aboutir à un règlement pacifique. Mais le conflit, qui s'est soldé par des dizaines de milliers de morts, a repris en 2015, lorsque le PKK a mis fin au cessez-le-feu.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.