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"Ici c'est la paix, la stabilité": les réfugiés affluent au Kurdistan


Lundi 25 juin 2007 à 09h08

KHAZIR (Irak), 25 juin 2007 (AFP) — "Ici c'est la paix, la stabilité". Bouchra Khalil Dawoud est soulagée. Arrivée il y a quinze jours du sud chiite de l'Irak avec ses sept enfants, elle vient de s'installer dans le premier camp de réfugiés ouvert par le gouvernement régional du Kurdistan (nord).

A une trentaine de kilomètres d'Erbil, la capitale de la région, au milieu de collines dont la rare végétation a été brûlée par le soleil, 250 tentes siglées UNHCR (Haut Comité aux Réfugiés des Nations unies) sont alignées.

A l'intérieur, un confort sommaire: des couvertures, un réchaud et quelques ustensiles de cuisine.

Sous une chaleur accablante, les familles font la queue pour récupérer des matelas, de l'eau, de la farine et de l'huile.

"Mon mari est mort il y a trois ans dans un attentat à Hilla (120 km au sud de Bagdad). Il était maçon. Et depuis sa disparition, je n'ai plus de quoi faire vivre mes enfants", raconte Bouchra.

Son maigre salaire de femme de ménage ne lui permettait plus de louer une maison et son fils qui travaillait dans le souk de la ville pour l'aider est devenu invalide après avoir été blessé dans une explosion.

S'en est suivi un long périple pour la famille, avant qu'elle ne prenne la décision de fuir vers le Kurdistan.

"Les Kurdes nous ont aidés. Que dieu les bénisse", ajoute Bouchra.

Des dizaines de milliers d'Arabes, souvent plutôt aisés contrairement à Bouchra, sont venus chercher refuge dans cette région, la seule qui soit épargnée par les violences confessionnelles qui ensanglantent le pays.

Un faible nombre comparé aux trois millions de personnes déplacées en Irak, car ces candidats à l'immigration dans leur propre pays doivent montrer patte blanche et être parrainés par un ami ou un membre de la famille vivant dans la région.

De nombreux Kurdes de Mossoul, ville mixte ravagée par les violences à la lisière sud du Kurdistan, se joignent eux aussi à cet exode.

"Nous étions sans cesse menacés par les terroristes, juste parce que nous sommes Kurdes. Je travaillais comme vendeur dans le souk mais depuis deux ans, je ne pouvais même plus sortir pour y aller", témoigne Abdoullah Ahmed Moussah, venu s'installer dans le camp avec sa femme et ses six enfants.

Face à l'afflux, les autorités kurdes ont ouvert le 14 juin le camp de Khazir, situé dans le district de Khabat, entre Erbil et Mossoul, sur la route par laquelle arrivent nombre de réfugiés.

"Nous nous devons d'aider ces gens, ils ont tout quitté pour venir ici mais mon district ne pouvait plus en prendre d'autres en charge. Nous avons donc demandé à la province d'ouvrir ce camp", explique Rizgar Mohammed, le maire du district, dont la population a bondi de 25.000 à 30.000 personnes en à peine deux ans.

"Nos installations sanitaires ne sont pas suffisantes, la production d'électricité non plus. Leur présence fait augmenter les prix de l'immobilier et le chômage et quelquefois les enfants se retrouvent à 60 en classe", affirme-t-il.

"Les réfugiés demandaient la création de ce camp car certains n'avaient plus les moyens de payer leurs loyers", ajoute Heimat Marouf, du Croissant rouge irakien, l'organisation humanitaire qui supervise le camp, où les conditions de vie sont difficiles.

"Il fait très chaud et il n'y a pas de sanitaires ni d'électricité", se plaint Abdoullah.

Derrière lui, Ghaib, 15 ans, de Mossoul, demande: "quand est-ce qu'ils vont ouvrir une école en arabe?".

"Nous avons demandé au HCR de nous aider à améliorer les services dans le camp", assure le maire de Khabat.

Mais pour rien au monde les réfugiés ne partiraient. "Je suis prêt à faire n'importe quel boulot ici", insiste Abdoullah.

"Je ne reviendrai jamais à Hilla. Vous me ferez enterrer ici", fait promettre Bouchra à ses enfants.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.