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Hakan Fidan, un fidèle d'Erdogan pour faire la paix avec Öcalan


Lundi 18 mars 2013 à 20h31

ANKARA, 18 mars 2013 (AFP) — Il est à la fois homme de confiance, de l'ombre et des missions difficiles. Le patron des services de renseignement turcs (MIT) Hakan Fidan, qui mène les pourparlers de paix avec le chef rebelle kurde Abdullah Öcalan, est l'un des plus proches collaborateurs du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan.

Avant de négocier avec le plus célèbre détenu de Turquie, cet ancien sous-officier avait déjà tenté d'obtenir dans le plus grand secret, en Norvège, une fin du conflit kurde avec des chefs du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Une tentative avortée en 2011, lorsqu'elle est révélée dans la presse turque.

C'est donc sans surprise à lui seul que le chef du gouvernement islamo-conservateur a confié le soin de renouer, en son nom, le dialogue avec celui que nombre de Turcs qualifient de "terroriste" ou de "tueur d'enfants".

L'an dernier, M. Erdogan lui a rendu un hommage public rare et appuyé. "C'est un fonctionnaire très efficace", a-t-il souligné, "il est le gardien de mes secrets, le gardien des secrets de l'Etat".

Comme le veut cette discrétion imposée aux maîtres espions, la biographie officielle d'Hakan Fidan postée sur le site Internet de l'Organisation nationale de renseignement (MIT) est réduite à sa plus simple expression.

Né en 1968 à Ankara, Hakan Fidan commence sa vie professionnelle au bas de l'échelle de l'armée turque, en tant que simple sous-officier. Il y remplit quelques missions liées au renseignement et sert un temps en Allemagne dans les rangs de la Force de réaction rapide de l'Otan, avant de quitter les forces armées en 2001.

M. Fidan reprend alors des études aux Etats-Unis, où il obtient divers titres universitaires, en sciences politiques à l'université du Maryland puis en Turquie, à l'université privée Bilkent d'Ankara.

Diplômes en poche, il dirige l'agence publique de coopération internationale (TIKA) turque, très active dans les ex-républiques soviétiques turcophones, en Afrique et dans nombre de pays musulmans où Ankara cherche depuis une dizaines d'années à prendre pied dans le cadre de sa stratégie de puissance régionale.

Homme d'influence

Pendant ces quatre années à la tête de la TIKA, il se rapproche, selon les médias turcs, de la puissante confrérie musulmane de Fethullah Gülen, un prédicateur qui s'est exilé aux Etats-Unis. Aussi riche qu'influent, ce réseau dispose de dizaines d'écoles à l'étranger et de solides points d'appuis au sein du gouvernement, de la fonction publique et de l'économie turques.

Hakan Fidan poursuit son ascension dans les sphères du pouvoir en entrant au cabinet du Premier ministre Erdogan, avec le titre de sous-secrétaire d'Etat adjoint. L'occasion pour lui de travailler en étroite collaboration avec le future ministre des Affaires étrangères et concepteur de la diplomatie "néo-ottomane" du pays, Ahmet Davutoglu, alors universitaire et conseiller du chef du gouvernement.

C'est dans ce cadre qu'Hakan Fidan participe dès 2009 aux discussions de paix secrètes d'Oslo avec des chefs du PKK. Nommé en 2010 à la tête du MIT, il poursuit ses efforts jusqu'en 2011, lorsque leur révélation dans la presse turque font capoter les négociations.

Cet épisode met le chef des tout-puissants services sur la place publique lorsqu'en 2012, des procureurs le soupçonnent d'avoir outrepassé son mandat lors de ses discussions avec le PKK et le somme de témoigner.

Signe de son importance dans les cercles du pouvoir, M. Erdogan n'hésitera pas à faire adopter par le Parlement qu'il contrôle une loi dispensant les agents du MIT de répondre aux requêtes de la justice.

Protégé par cette immunité de fait, Hakan Fidan se préparerait dorénavant, selon certains observateurs, à accomplir une tâche encore plus importante pour le chef du gouvernement : lui succéder. "Il (Erdogan) le convie à d'importantes réunions avec des chefs d'Etat", écrivait l'an dernier le rédacteur en chef du quotidien Haber-Türk, Fatih Altayli, "j'ai l'impression qu'il prépare Hakan Fidan à une mission importante".

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.