Samedi 30 novembre 2024 à 14h59
Beyrouth (Liban), 30 nov 2024 (AFP) — Les jihadistes et les factions rebelles alliées ont pris la majeure partie d'Alep, la deuxième ville de Syrie, lors d'une offensive éclair qui a fait plus de 320 morts, a indiqué une ONG samedi, un coup dur pour le pouvoir de Bachar al-Assad.
L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), qui dispose d'un vaste réseau de sources dans le pays en guerre, a aussi fait état de raids aériens russes avant l'aube sur Alep, les premiers depuis 2016, année durant laquelle le régime avait repris le contrôle de la ville septentrionale aux rebelles.
Samedi après-midi, une frappe aérienne a ciblé des "véhicules civils" dans un secteur d'Alep pris par les rebelles, tuant 16 civils, a indiqué l'OSDH, en précisant que le raid avait été "probablement" mené par des avions russes.
Ces violences sont les premières de cette ampleur depuis plusieurs années en Syrie, où les hostilités avaient globalement cessé entre les belligérants soutenus par différentes puissances régionales et internationales aux intérêts divergents dans cette guerre dévastatrice déclenchée en 2011.
Avec l'appui militaire crucial de la Russie, de l'Iran et du Hezbollah libanais, le régime Assad a reconquis en 2015 le contrôle d'une grande partie du pays et en 2016 la totalité de la cité d'Alep. Mais de vastes régions échappent encore à son contrôle.
Les jihadistes de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), dominé par l'ex-branche syrienne d'Al-Qaïda, et des factions rebelles syriennes ont lancé mercredi une offensive contre les forces du régime dans les provinces voisines d'Idleb et d'Alep prenant des dizaines de localités avant d'entrer vendredi dans la ville d'Alep, a indiqué l'OSDH.
"Le HTS et les factions alliées ont pris la majeure partie de la ville d'Alep, des bâtiments gouvernementaux et des prisons", a ensuite précisé l'Observatoire.
Célébrant leur entrée dans Alep, jihadistes et rebelles ont défilé dans les rues, posé devant la citadelle historique, installé leur drapeau devant un poste de police et déchiré un portrait de M. Assad, selon des images de l'AFP.
- "Pas de résistance significative" -
L'armée syrienne a confirmé la présence de combattants antirégime dans de "larges parties" d'Alep et déploré des "dizaines" de morts et de blessés dans l'offensive.
Selon un dernier bilan de l'OSDH, 327 personnes ont été tuées depuis mercredi: 183 combattants du HTS et factions rebelles, 100 soldats syriens et membres des forces progouvernementales ainsi que 44 civils.
"La plupart des civils restent chez eux et les institutions publiques et privées sont quasiment toutes fermées" à Alep, ville de quelque deux millions d'habitants et poumon historique du pays d'avant-guerre, a dit la radio progouvernementale Sham FM.
Le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane, a déclaré à l'AFP que jihadistes et rebelles, dont certains soutenus par la Turquie, avaient rapidement pris de vastes secteurs d'Alep "sans rencontrer de résistance significative".
"Il n'y a pas eu de combats" et les forces du régime, ainsi que "le gouverneur d'Alep et les commandants de la police et de la sécurité se sont retirés du centre-ville", a-t-il ajouté.
"Les lignes du régime se sont effondrées à un rythme incroyable qui a pris tout le monde par surprise", estime Dareen Khalifa, experte de l'International Crisis Group.
- Raid israélien à la frontière Syrie-Liban -
Le chef du "gouvernement" proclamé par le HTS à Idleb (nord-ouest), Mohammad al-Bachir, a affirmé jeudi que l'offensive avait été lancée après que "le régime a massé des forces sur les lignes de front et bombardé les zones civiles".
Le HTS et les rebelles contrôlent des pans entiers de la province d'Idleb, des secteurs dans la province voisine d'Alep, ainsi que des zones de Hama et Lattaquié. Pour leur part, les Kurdes syriens ont instauré une administration autonome dotée d'une force militaire dans de vastes régions du nord-est du pays.
L'armée turque, qui contrôle plusieurs zones du nord syrien, a appelé vendredi à mettre "fin" aux "attaques" sur Idleb après des raids russes et syriens.
Le nord-ouest de la Syrie bénéficiait ces dernières années d'un calme précaire rendu possible par un cessez-le-feu instauré après une offensive du régime en mars 2020, et parrainé par Moscou et Ankara.
L'offensive jihadiste a été déclenchée le jour où un accord de cessez-le-feu a été annoncé entre le Hezbollah et Israël, en guerre ouverte pendant plus de deux mois. Samedi, Israël a dit avoir bombardé des sites à la frontière syro-libanaise utilisés selon lui par le Hezbollah pro-iranien pour acheminer des armes de Syrie au Liban.
Déclenchée en 2011 après la répression brutale des manifestations prodémocratie, la guerre complexe en Syrie a fait un demi-million de morts.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.