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Emilie König, une des figures de la mouvance jihadiste française


Mardi 5 juillet 2022 à 18h11

Paris, 5 juil 2022 (AFP) — Elle est accusée d'avoir recruté pour le groupe Etat islamique (EI) et appelé à commettre des attaques en Occident. Détenue en Syrie depuis cinq ans, la jihadiste Emilie König est rentrée mardi en France où elle a été aussitôt incarcérée.

Cette femme de 37 ans, originaire de Lorient (Morbihan) et mère de cinq enfants, était partie en Syrie en 2012 en pionnière. Elle était retenue depuis 2017 dans un camp du nord-est du pays géré par les forces kurdes.

Elle fait partie des 16 mères rapatriées mardi en France de camps de prisonniers jihadistes en Syrie, premier retour massif d'enfants et de leurs mères français depuis la chute en 2019 du "califat" de l'EI d'où ont été planifiés les attentats meurtriers du 13 novembre 2015.

"Je suis très fatiguée", a soufflé dans le box cette brune au teint gris, vêtue d'une polaire grise et d'un pantalon noir, après l'annonce de son placement en détention par une juge des libertés et de la détention du tribunal de Paris.

La magistrate, à qui Emilie König avait dit vouloir retrouver une "vie de femme", lui a indiqué que les investigations allaient se poursuivre "pour retracer son parcours".

"Elle a l'intention de coopérer pleinement avec la justice française", a assuré à l'AFP son avocat Emmanuel Daoud.

"Elle est rentrée pour s'expliquer et pour tenter le plus rapidement possible, selon une échéance qu'elle ne maîtrise pas, de revoir ses enfants", a ajouté Me Daoud en soulignant qu'elle avait "pleinement conscience d'avoir causé beaucoup de souffrances à sa famille".

- Liste noire -

Fille de gendarme et dernière d'une famille de quatre enfants élevés seuls par leur mère, Emilie König suit une scolarité normale avant de se convertir au contact de son premier mari, algérien d'origine, incarcéré pour trafic de drogue.

Elle apprend l'arabe, se fait appeler Samra et se voile entièrement. Puis entame sa radicalisation au contact du groupe islamiste nantais Forsane Alizza, désormais dissous. Dès 2010, elle est repérée en niqab près de la mosquée de Lorient où elle tente de distribuer des tracts appelant au jihad.

Au printemps 2012, convoquée au tribunal, elle refuse de retirer son niqab et provoque une altercation avec un vigile qu'elle filme et poste sur YouTube.

Dans la foulée, elle laisse ses deux enfants en France et part rejoindre en Syrie son nouveau compagnon qui sera tué ultérieurement. Elle a donné naissance à trois autres enfants, rapatriés en janvier 2021.

Emilie König faisait l'objet d'un mandat d'arrêt. Elle a été mise en examen pour association de malfaiteurs terroriste criminelle.

Régulièrement apparue dans des vidéos de propagande, elle avait été placée par l'ONU sur sa liste noire des combattants les plus dangereux. Dans l'une d'elles mise en ligne en 2013, elle pose avec un fusil, comme si elle s'entraînait au tir.

-"Ça a détruit toute ma vie"-

Les services de renseignements avaient intercepté ses appels récurrents à attaquer les institutions françaises ou à s'en prendre aux femmes de soldats français.

Dans un entretien accordé à l'AFP en avril 2021 du le camp de Roj, elle disait vouloir "retourner en France".

"Je veux retourner en France, je veux revoir mes enfants, j'aimerais que la France soit conciliante par rapport à ça. J'ai envie de réparer mes erreurs", martelait Emilie König.

"Bien sûr que je regrette, parce que ça a (détruit) toute ma vie", disait-elle à propos de son ralliement à l'EI, tout en assurant ne pas vouloir être incarcérée.

"Je vois pas pourquoi j'irais en prison. Je trouve que c'est injuste parce que j'ai rien fait, j'ai pas de sang sur les mains", insistait-elle.

Emilie König a été capturée en 2017 à Chadadi (est de la Syrie), lors de l'offensive des forces kurdes pour reconquérir les secteurs aux mains des jihadistes. Début 2018, elle apparaissait dans deux vidéos diffusées par les Kurdes.

Emilie König espérait rentrer en France pour retrouver sa famille, suivre une formation en comptabilité, pourquoi pas se lancer à son compte et avoir, confiait-elle, "une revanche un petit peu" sur la vie.

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Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.