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Des jeunes Iraniens passibles de la peine de mort en lien avec les manifestations


Mercredi 14 decembre 2022 à 13h17

Paris, 14 déc 2022 (AFP) — Un médecin, des rappeurs, un footballeur figurent parmi une vingtaine d'Iraniens qui risquent d'être pendus, Téhéran utilisant la peine de mort comme tactique d'intimidation pour réprimer les manifestations, selon des groupes de défense des droits humains.

Les deux premières exécutions liées au mouvement de contestation qui secoue l'Iran depuis trois mois, celles de Mohsen Shekari, le 8 décembre, et de Majidreza Rahnavard, le 12, tous deux âgés de 23 ans, ont suscité un tollé et de nouvelles sanctions occidentales, d'autant plus que Majidreza Rahnavard a été pendu en public plutôt qu'en prison.

Mais les militants appellent à une action internationale sévère pour empêcher de nouvelles exécutions.

"Tant que le coût politique des exécutions n'est pas significativement plus important, nous serons confrontés à des exécutions de masse", avertit Mahmood Amiry-Moghaddam, le directeur du groupe Iran Human Rights (IHR) basé en Norvège, qui accuse les autorités iraniennes d'utiliser les exécutions pour "semer la peur et sauver le régime."

L'Iran est secoué par des manifestations déclenchées par la mort le 16 septembre de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans décédée après son arrestation par la police des moeurs pour infraction au code vestimentaire strict de la République islamique.

Depuis ses débuts en 1979, la République islamique a été régulièrement secouée par des poussées de fièvre. Mais cette crise est inédite par sa durée, sa dispersion à travers les provinces, la participation de différents groupes ethniques et classes sociales et les appels directs à la fin du régime.

Selon Amnesty International, 11 autres personnes ont été condamnées à la peine capitale dans le contexte des manifestations et neuf font face à des accusations passibles de la peine de mort.

Amnesty cite notamment le cas d'un jeune homme, Sahand Nourmohammad-Zadeh, condamné à mort le 6 novembre, après avoir été reconnu coupable d'avoir "détruit des garde-corps d'autoroute et incendié des poubelles et des pneus".

Mercredi, un manifestant récemment arrêté, Mahan Sadrat, a été "sauvé de l'exécution", a annoncé son avocat.

Amnesty avait dit craindre l'exécution "imminente" de ce jeune homme de 22 ans, condamné à mort à l'issue d'un procès expéditif et "inéquitable" le 3 novembre, après avoir été reconnu coupable d'avoir dégainé un couteau lors des manifestations.

- "Risque sérieux" -

Mohammad Ghobadlou, 22 ans, a, lui, été condamné à mort pour avoir renversé des policiers avec une voiture, faisant un mort et plusieurs blessés. Selon Amnesty, qui se dit "sérieusement inquiète", il a été torturé en prison.

De même que le rappeur Saman Seydi, alias Saman Yasin, qui a soutenu la contestation sur les réseaux sociaux et est accusé d'avoir tiré en l'air. Selon Amnesty, il a été torturé pour obtenir des aveux forcés.

Hamid Ghare-Hasanlou, un médecin, et son épouse Farzaneh Ghare-Hasanlou se rendaient aux funérailles d'un manifestant tué lorsqu'ils ont été "pris dans le chaos" d'une agression mortelle contre un membre de la milice Bassidj, selon Amnesty.

Hamid Ghare-Hasanlou a été condamné à mort et sa femme à 25 ans de prison, le tribunal s'appuyant sur des déclarations qui, selon Amnesty, ont été extorquées à son épouse. Son mari a été torturé en détention et hospitalisé avec des côtes cassées.

Parmi les personnes passibles de la peine de mort, figure le rappeur Toomaj Salehi, 32 ans, inculpé "uniquement pour des critiques formulées dans sa musique et sur les réseaux sociaux", ajoute Amnesty qui fait état ici aussi de tortures.

Le footballeur professionnel Amir Nasr Azadani, 26 ans, risque lui aussi la peine capitale après avoir été inculpé pour la mort de trois agents de sécurité en novembre dans la ville d'Ispahan, selon l'ONG. Le syndicat mondial des joueurs professionnels (Fifpro) s'est dit "choqué et écoeuré" par le risque de sa condamnation à mort.

Les exécutions sont souvent soudaines, les autorités prononçant et exécutant les peines capitales de "manière rapide", souligne Amnesty qui prévient d'un "risque sérieux" pour des personnes dont les condamnations à mort n'ont pas été rendues publiques et qui pourraient être exécutées "à tout moment".

Majidreza Rahnavard a été pendu seulement 23 jours après son arrestation et peu de temps après une dernière rencontre avec sa mère, qui ignorait que son fils était sur le point d'être mis à mort.

"Les exécutions de deux personnes liées aux manifestations en Iran sont épouvantables et nous sommes extrêmement inquiets pour la vie d'autres personnes condamnées à mort de la même manière", a déclaré à l'AFP le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.