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"Des fissures" apparaissent au sein du régime iranien, estime le fils du Shah


Samedi 18 février 2023 à 17h51

Munich (Allemagne), 18 fév 2023 (AFP) — Des "fissures" existent au sein du régime iranien et apparaîtront au grand jour, au fur et à mesure que se réduira le pouvoir de l'ayatollah Khamenei, a estimé samedi à Munich Reza Pahlavi, fils de l'ancien Shah d'Iran.

"Le contrôle total de (l'ayatollah Ali) Khamenei rend quasiment impossible, pour ceux qui lui sont étroitement associés, de prendre position contre lui", a admis celui qui incarne l'une des multiples composantes de l'opposition au régime de la République islamique.

Mais selon "des témoignages que nous recevons et des fuites d'informations (...), il y aura des fissures qui vont devenir plus apparentes", a-t-il assuré aux journalistes en marge de la Conférence sur la sécurité à Munich, où des membres de l'opposition ont été invités mais aucun représentant du pouvoir iranien.

Le guide suprême "essaye de pousser son fils (Mojtaba Khamenei, ndlr) pour lui succéder" et cette transition "affaiblira considérablement" ses soutiens, a-t-il assuré, évoquant ainsi le besoin d'utiliser ces aspirations internes en Iran à changer de constitution.

Le pays est secoué depuis septembre par une vague de manifestations consécutives à la mort en détention d'une jeune kurde iranienne qui avait été arrêtée pour non respect du code vestimentaire très strict imposé aux femmes de ce pays.

Depuis, le régime fait face à une contestation sans précédent, qui a été violemment réprimée. Et deux anciens dirigeants, l'ancien président Mohammad Khatami et l'ex-Premier ministre Mir Hossein Moussavi, ont réclamé des réformes début février.

M. Moussavi a notamment suggéré un "référendum libre et juste sur la nécessité ou non de rédiger une nouvelle constitution", jugeant "insoutenable" la structure actuelle du pouvoir.

Il a ainsi durci ses critiques à l'égard du pouvoir, a fait valoir Reza Pahlavi, évoquant un passé récent où l'ex-chef du gouvernement se positionnait comme dans "l'opposition loyale, dans le cadre de la constitution existante".

- "Plus de défections" -

Plusieurs factions de la très divisée diaspora iranienne se sont attelés à la rédaction d'une charte. Elle vise à rassembler leurs points d'accord pour aboutir à la mise en place d'un conseil de transition chargé de préparer des élections et de rédiger une nouvelle constitution.

Le fils du Shah, renversé en 1979 par la révolution islamique, fait état en Iran d'un vaste "spectre gris" de responsables gouvernementaux tentés par le changement mais pour l'heure réticents à l'exprimer publiquement.

"La question est de savoir combien d'entre eux vont commencer à faire défection" dans l'entourage direct de Khamenei, ajoute-t-il, convaincu que "la dynamique va vers plus (...) de défections".

L'opposition en exil, pour sa part, doit leur offrir des solutions, via une "politique de la porte ouverte, de l'inclusion maximum", résume le fils du Shah. Si ces responsables "adoptent les valeurs et les principes (de la charte, ndlr) comme une base de coopération, nous pouvons élargir le spectre pour inclure plus de gens".

Mais une issue positive passera aussi, a-t-il fait valoir, par un travail politique et judiciaire réservant une place à ces membres du régime actuel dans le prochain système. "Tout le monde a droit à une seconde chance", observe-t-il à cet égard.

- Préparer l'après -

"Il existe des formules déjà établies de justice traditionnelle. Que fait-on avec des gens qui ont agi comme des criminels en position de gouvernants ? Nous ne pouvons rejeter ceux qui sollicitent la justice", considère-t-il.

Et d'évoquer le tout puissant corps des Gardiens de la Révolution (IRGC), force considérée comme l'armée idéologique du régime.

"Nous devons être capables de dire: vous pouvez revenir dans l'armée, ou une forme de force de réserve ou d'autres rôles dans le civil. Tout cela est discuté actuellement", explique-t-il. "Il y a une stratégie, un plan" pour préparer l'après République islamique.

Reza Pahlavi est loin de faire l'unanimité. Il est accusé de ne pas avoir pris assez de distance avec l'autoritarisme paternel, de manquer de transparence sur la fortune familiale et de rester inactif face à l'agressivité des monarchistes sur les réseaux sociaux. Mais son positionnement face aux manifestations lui a valu l'estime du mouvement protestataire.

"Dire que mon père était roi et que quoiqu'il soit arrivé, je dois en assumer la responsabilité est une sorte de proposition irrationnelle", a redit à Munich cet homme de 62 ans qui vit aux Etats-Unis.

"Si j'avais l'option entre une république laïque et la monarchie, je choisirais la république". Mais "vous ne pouvez éliminer une option si une partie de la nation veut en discuter".

Et de conclure : "Ce qu'il arrivera finalement, je laisse l'assemblée constituante (future, ndlr) en débattre". Lui ne visera, c'est promis, aucune fonction, préférant conserver une "liberté absolue d'expression".

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.