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Dans un hôpital assiégé de Syrie, un infirmier kurde témoigne des heures noires


Jeudi 24 octobre 2019 à 21h11

Hassaké (Syrie), 24 oct 2019 (AFP) — Bloqué durant plusieurs jours par les forces turques dans un hôpital du nord de la Syrie, Raman Ouso ne pensait pas qu'il en sortirait vivant.

Cet infirmier kurde syrien de 27 ans faisait partie d'une petite équipe médicale restée sur place pour venir en aide aux blessés dans la ville de Ras al-Aïn, malgré une offensive de l'armée turque lancée le 9 octobre.

Le personnel de santé a été piégé pendant près d'une semaine dans l'hôpital endommagé par les bombardements.

"Nous ne pensions pas que nous allions survivre", raconte le jeune homme.

"Jamais je n'aurais imaginé pouvoir sortir vivant d'une telle épreuve", ajoute-t-il.

Début octobre, les Etats-Unis ont annoncé le retrait de leurs troupes du nord de la Syrie, ouvrant de facto la voie à une offensive turque contre la principale milice kurde syrienne des Unités de protection du peuple (YPG), qualifiée de "terroriste" par Ankara.

Mais cette milice est soutenue par l'Occident qu'elle a aidé dans son combat contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI).

En quelques jours, les Turcs et leurs supplétifs syriens ont conquis une bande frontalière d'une centaine de kilomètres, avant l'entrée en vigueur d'une trêve qui a permis un arrêt de l'offensive.

Dans la ville assiégée de Ras al-Aïn, où les FDS ont opposé une résistance farouche avant de s'en retirer, les violents combats ont fait des dizaines de morts.

Malgré les affrontements et les raids aériens turcs sur la ville, Raman Ouso, un volontaire du Croissant rouge kurde, est resté dans l'hôpital.

"Il y avait des bombardements intenses et des combats à côté", raconte l'infirmier, assistant anesthésiste.

- "Je ne pouvais rien faire" -

"De nombreuses personnes ont perdu la vie et je ne pouvais rien faire. Nos moyens étaient très limités, nous avions besoin de spécialistes."

Avec l'entrée des forces turques dans la ville, les combats de rue se sont propagés.

Mais l'infirmier et ses collègues ont continué à soigner les civils et les combattants blessés.

Près de l'hôpital, les supplétifs syriens lançaient des appels menaçants aux habitants, ajoute-t-il.

L'hôpital a fini par être endommagé par les violences. Le personnel médical se retrouve pris au piège.

"L'hôpital a été bombardé et attaqué. Ils ont tenté d'en prendre le contrôle (...) mais n'ont pas réussi", affirme Raman Ouso.

Pendant des jours, les membres de l'équipe médicale sont restés dans l'établissement.

Pour se distraire, Raman Ouso regardait des photos de jours meilleurs.

"Des infirmières pleuraient tout le temps car elles avaient peur d'être prises en otage (...) Elles avaient perdu l'espoir de pouvoir sortir", raconte-t-il.

Mais à leur grande surprise, une trêve est entrée en vigueur le 17 octobre.

Les combattants des FDS et les civils ont pu ensuite se retirer, et l'équipe médicale a été transférée vers la ville majoritairement kurde de Hassaké, plus à l'est.

Là, en voyant sa mère, Raman Ouso s'effondre en pleurs.

Maintenant, il travaille dans un hôpital local et dit vivement espérer un retour à la paix dans un pays dévasté par huit ans de conflit.

"Je veux que cette guerre finisse et que la situation revienne à la normale".

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.