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Dans le nord de l'Irak, le PKK fourbit ses armes contre l'Iran


Mardi 9 mai 2006 à 06h11

MONT KANDIL (Irak), 6 mai 2006 (AFP) — Le chef militaire du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), Cemil "Cuma" Bayik, menace l'Iran de mener des opérations de guérilla en représailles d'incursions iraniennes au Kurdistan irakien.

"Nous avons le droit de lancer des attaques contre les forces iraniennes. Nous sommes les agressés. S'ils ne nous avaient pas attaqué, nous ne riposterions pas", assure Cemil Bayik dans un entretien à l'AFP.

Depuis l'arrestation d'Abdullah Öcalan en 1999, Cemil Bayik, 51 ans, dirige sur le terrain le PKK, un mouvement d'inspiration socialiste engagé depuis plus de 20 ans dans la lutte contre l'Etat turc pour obtenir l'indépendance du sud-est anatolien à majorité kurde.

Mais les récents bombardements des positions du PKK en Irak par l'artillerie iranienne, qui ont tué trois combattants kurdes, pourraient entraîner une violente riposte contre l'Iran.

Dimanche dernier, Bagdad a accusé l'armée iranienne d'avoir pénétré de 5 km en territoire irakien et d'avoir bombardé les positions du PKK dans la région autonome du Kurdistan irakien, mais Téhéran s'est refusé à démentir ou confirmer ces informations.

Pour leur part, les combattants du PKK sont persuadés que l'Iran prépare une nouvelle série de bombardements et ils se préparent en conséquence.

"Nous ne pouvons pas nous permettre d'affronter l'armée iranienne dans une bataille rangée. Mais nous pouvons leur faire mal avec des raids de guérilla, avec nos Kalachnikov, nos lance-roquettes, nos mitrailleuses et nos mortiers", détaille Bayik.

Pour lui, les attaques iraniennes s'inscrivent dans le contexte de la crise nucléaire qui oppose la République islamique aux Etat-Unis.

"Les autorités iraniennes font tout ce qu'elles peuvent pour s'assurer que la Turquie ne sera pas aux côtés des Américains en cas d'attaque contre l'Iran", estime-t-il.

La Turquie, qui s'est félicitée des incursions iraniennes, a massé des troupes le long de sa frontière avec l'Irak dans le but affiché par les autorités de prévenir l'infiltration de rebelles du PKK, qui dispose de plusieurs camps dans le nord de l'Irak.

Ankara a demandé de longue date mais sans succès aux forces américaines de chasser d'Irak les combattants du PKK, considéré comme une organisation terroriste par les Etats-Unis et l'Union européenne, dont elle estime le nombre à 5.000.

"Nous sommes moins nombreux que cela, mais je ne peux vous en dire plus, cela relève du secret militaire", sourit Bayik.

Pour lui, les attaques iraniennes s'inscrivent aussi dans le cadre de la lutte pour le contrôle de la ville irakienne de Kirkouk et sa région, riche en ressources pétrolières.

Les partis politiques kurdes irakiens réclament l'intégration de Kirkouk dans le Kurdistan et le retour de ses habitants kurdes, expulsés par l'ancien dictateur Saddam Hussein dans le cadre de sa politique d'arabisation de la ville.

"Si les Kurdes en viennent à affronter les Arabes à propos de Kirkouk, nous nous battrons à leurs côtés (auprès des Kurdes, ndlr)", a déclaré Bayik, jugeant un tel conflit "possible".

Une telle fraternité d'armes ne semble guère émouvoir les autorités du Kurdistan autonome, qui ont demandé vendredi au PKK de ne pas utiliser le territoire irakien pour lancer des attaques contre les pays voisins.

"Nous comprenons qu'ils souhaitent conserver de bonnes relations avec l'Iran et la Turquie, mais cela ne doit pas pour autant se faire au détriment de la nation kurde. Ils doivent penser à l'ensemble du Kurdistan", répond-il, en référence à l'Etat virtuel que souhaitent bâtir les nationalistes kurdes, en rassemblant les populations kurdes d'Iran, d'Irak, de Turquie et de Syrie.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.