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Barham Saleh, un président pour recoller les morceaux entre Bagdad et les Kurdes


Mardi 2 octobre 2018 à 20h48

Bagdad, 2 oct 2018 (AFP) — Barham Saleh, élu président d'Irak mardi, est une personnalité kurde appréciée à Bagdad mais qui reste clivante parmi la communauté kurde profondément divisée un an après le fiasco du référendum d'indépendance.

Cet ingénieur en informatique diplômé en Grande-Bretagne peut se targuer à 58 ans d'une longue carrière politique, tant au Kurdistan, région autonome depuis 1991, qu'au sein des autorités fédérales irakiennes.

Visage rond et crâne dégarni, ce responsable kurde a été membre des autorités intérimaires mises en place par le commandement militaire américain après le renversement du dictateur Saddam Hussein lors de l'invasion emmenée par les Etats-Unis en 2003.

Il a ensuite été ministre de la Planification du gouvernement fédéral né des premières élections multipartites en Irak, en 2005. Un an plus tard, il devient vice-Premier ministre de Nouri al-Maliki et une fois son mandat terminé, il rentre en 2009 à Erbil pour y occuper jusqu'en 2011 le poste de chef du gouvernement du Kurdistan.

- "Irakien avant tout" -

"Il s'est fait connaître comme quelqu'un qui est Irakien, avant tout", souligne un homme politique à Bagdad qui a travaillé avec lui. "Il est accepté de tous".

En 2014, certains avaient prédit son retour à Bagdad, cette fois au poste honorifique de président de la République, mais au dernier moment, Barham Saleh s'était retiré au profit de Fouad Massoum, également membre de son parti, l'Union patriotique du Kurdistan (UPK).

Fondé en 1975 par le défunt Jalal Talabani, premier président kurde de la République irakienne, ce mouvement a toujours eu depuis 2005 la présidence de l'Irak, en vertu d'un accord tacite qui réservait dans le même temps la présidence du Kurdistan à son rival, le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) de Massoud Barzani.

Mais s'il a rejoint l'UPK à 16 ans, avant d'en devenir le représentant en Grande-Bretagne puis aux Etats-Unis sur nomination personnelle de Jalal Talabani, Barham Saleh n'a que faire de la discipline de parti, s'attirant des ennemis jusqu'au sein de sa famille politique.

En 2017, alors que Massoud Barzani pousse, contre l'avis de Bagdad et de la communauté internationale, pour son référendum d'indépendance qui se termine en fiasco et divise les Kurdes, Barham Saleh claque la porte de l'UPK.

- Modéré et consensuel -

Il forme l'"Alliance pour la démocratie et la justice", qui décroche deux sièges au Parlement de Bagdad lors des législatives de mai. Avant de revenir dans le giron de l'UPK en septembre pour être son candidat à la présidence.

Pour Khaled Chouani, haut dirigeant de l'UPK, il fallait au parti un candidat "modéré" et "accepté par tous" qui prône "un renforcement des relations entre le gouvernement fédéral et le peuple kurde", comme selon lui Barham Saleh.

En outre, ajoute-t-il, sa personnalité consensuelle contente à la fois l'Iran, dont l'UPK est historiquement proche, et les Etats-Unis, l'autre grande puissance agissante en Irak.

Ce natif de Souleimaniyeh, bastion de l'UPK, a également impulsé des projets phares dans cette deuxième ville du Kurdistan.

C'est lui par exemple qui a milité pour l'installation de l'Université américaine de Souleimaniyeh, aujourd'hui l'une des plus réputées du pays.

Ce fils d'un juge et d'une militante des droits des femmes, lui-même père d'un garçon et d'une fille, a prêté serment mardi soir devant les députés, en s'engageant à "préserver l'unité de l'Irak".

Des mots qui ont particulièrement résonné dans l'enceinte de l'assemblée qui avait voté il y a un an contre la tenue du référendum d'indépendance kurde.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.