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Attentat meurtrier dans une Turquie sous tension : le PKK soupçonné


Lundi 28 juillet 2008 à 17h14

ISTANBUL, 28 juil 2008 (AFP) — Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a implicitement accusé lundi les rebelles kurdes, cible d'offensives militaires de l'armée turque, d'être responsables de l'attentat qui a fait 17 morts dimanche à Istanbul.

Cet attentat est survenu dans un climat de tension en Turquie, où la justice a commencé à délibérer sur une possible interdiction du parti au pouvoir.

"Malheureusement, le coût de cela (les opérations militaires turques) est lourd. L'incident d'hier soir en est un exemple", a déclaré M. Erdogan à Istanbul.

Le Premier ministre a toutefois évité de prononcer le nom du PKK, expliquant que cela constituerait de la "propagande" pour les rebelles séparatistes. Le PKK a quant à lui nié toute responsabilité dans ces attentats.

Alors que le Premier ministre visitait la zone d'explosion quadrillée par des policiers, des habitants du quartier de Güngören scandaient : "A bas le PKK".

Des milliers de personnes, dont M. Erdogan et plusieurs ministres, ont ensuite assisté aux obsèques de dix des victimes dans une mosquée du quartier sinistré.

Les cercueils étaient recouvert du drapeau turc déployé également par les fidèles sur l'esplanade de la mosquée ainsi que sur les balcons avoisinants afin de dénoncer les attentats.

Une foule en colère a de nouveau dénoncé le PKK par des slogans tels "les martyrs ne meurent pas, la patrie est indivisible".

Les autorités et les médias avaient déjà pointé du doigt le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui, selon eux, aurait commis l'attentat en représailles à une une vague d'offensives militaires dans le sud-est turc et en Irak du nord, où il a des bases arrières.

L'attentat est intervenu alors que le Parti de la justice et du développement (AKP) de M. Erdogan, qui dirige le pays depuis 2002, risque d'être dissous pour activités anti-laïques. Ce scénario replongerait le pays dans la crise politique, avec de possibles élections anticipées.

Dimanche soir, deux bombes ont explosé sur une avenue commerçante et piétonne d'un quartier ouvrier de la rive européenne d'Istanbul.

Dix sept personnes, dont cinq enfants, ont été tuées, a annoncé le gouverneur de la première métropole du pays, Muammer Güler, tandis qu'une cinquantaine de blessés, dont six dans un état grave, étaient toujours hospitalisées lundi.

"Il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'une attaque terroriste", a déclaré le gouverneur, soulignant que les autorités concentraient leur investigation sur le PKK.

Les deux engins ont explosé à une dizaine de minutes d'intervalle, provoquant des scènes de panique.

"Après la première explosion (qui n'a pas fait de morts), les gens se sont bien sûr rassemblés et c'est alors qu'est survenue la deuxième explosion, qui a fait des morts", a expliqué M. Güler.

Les médias aussi ont quasi-unanimement désigné le PKK, mais un responsable de ce groupe a rejeté les accusations. "Le mouvement kurde n'est pas responsable de cette attaque", a affirmé Zübeyir Aydar à l'agence pro-kurde Firat.

Il a avancé que l'attentat était l'affaire de "forces sinistres" à un moment où les tensions sont exacerbées en Turquie.

Vendredi, un tribunal d'Istanbul a décidé de juger des putschistes présumés soupçonnés de vouloir renverser le gouvernement issu de la mouvance islamiste.

L'attentat coïncide également, à quelques heures près, avec le début à Ankara, lundi matin, des délibérations de la Cour constitutionnelle concernant une possible interdiction de l'AKP.

Plusieurs attentats survenus à Istanbul ont été attribués dans le passé au PKK, qui se bat depuis 1984 pour l'indépendance du Sud-Est anatolien, peuplé en majorité de Kurdes. Des groupes islamistes et d'extrême gauche sont également actifs à Istanbul.

Une cellule turque d'Al-Qaïda avait été tenue pour responsable d'attentats à Istanbul en novembre 2003, qui avaient fait 63 morts et des centaines de blessés.

Les attentats ont été condamnés par l'Otan, l'Union européenne, le conseil de l'Europe et de nombreux pays, dont les Etats-Unis, l'Allemagne, la Grande-Bretagne et l'Italie.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.