Dimanche 24 juin 2007 à 11h50
BAGDAD, 24 juin 2007 (AFP) — "Ali le Chimique", cousin de l'ancien dictateur irakien Saddam Hussein, et deux autres hauts responsables de l'ancien régime ont été condamnés à mort dimanche par le Haut tribunal pénal irakien pour le massacre de 182.000 Kurdes en 1988.
Ces anciens responsables, jugés avec trois autres, ont été condamnés à la peine capitale pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis lors d'une campagne d'exécutions de masse et de bombardements chimiques menée au Kurdistan irakien, dans le nord du pays, et baptisée opération "Anfal".
Principale figure de ce procès, "Ali le Chimique" a été le dernier à connaître son sort, la peine de mort par pendaison. L'homme âgé de 66 ans, la tête couverte d'un keffieh et vêtu d'une robe traditionnelle arabe, avait l'air épuisé et a écouté en silence la lecture du verdict.
Le tribunal l'a reconnu coupable d'avoir ordonné aux forces de sécurité d'utiliser des armes chimiques contre les Kurdes.
"Merci Dieu", a-t-il seulement lâché en quittant le tribunal après l'énoncé du verdict.
L'ancien directeur-adjoint des opérations militaires, Hussein Rachid al-Tikriti, lui aussi condamné à mort, n'a exprimé aucun remord.
"Merci Dieu d'être exécuté au nom de la courageuse armée irakienne, longue vie à l'Irak et longue vie à la courageuse armée irakienne", a-t-il dit alors qu'il était évacué par un vigile.
L'ancien ministre de la Défense Sultan Hachim al-Tai a quant à lui clamé son innocence: "Je ne dirai rien de nouveau et je vous laisse à Dieu. Je suis innocent", a-t-il affirmé au moment où un vigile s'approchait du box des accusés pour l'emmener.
Et le président du tribunal d'expliquer au cours de l'audience: "la peine est la pendaison à mort pour avoir commis des crimes avec préméditation et tué des gens dans des circonstances cruelles. C'est un crime contre l'humanité".
Deux autres accusés, Farhan al-Joubouri et Sabir al-Douri, anciens dirigeants des puissants services du renseignement militaire, ont été condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité.
Enfin, le sixième accusé, Taher al-Ani, ancien gouverneur de Mossoul (nord de l'Irak), a été acquitté pour "manque de preuves", comme l'avait demandé le Parquet. Le ministère public avait en revanche requis la peine de mort pour les cinq autres.
Le procès s'était ouvert le 21 août 2006 devant le Haut tribunal pénal irakien, une juridiction spécialement créée pour juger les responsables de l'ancien régime.
Au cours du procès, les accusés avaient expliqué pour leur défense que les opérations Anfal constituaient un exemple classique de lutte anti-guérilla, dans le cadre de la guerre ayant opposé l'Irak à l'Iran entre 1980 et 1988.
"Ali le Chimique" avait ouvertement reconnu avoir ordonné le recours à l'arme chimique pour gazer des Kurdes: "C'est moi qui ai donné les ordres à l'armée pour détruire des villages et reloger les villageois", avait-il dit, affirmant à plusieurs reprises ne pas avoir commis d'"erreur".
En janvier, les poursuites contre Saddam Hussein avaient été officiellement abandonnées, après l'exécution par pendaison le 30 décembre 2006 de l'ex-raïs, condamné dans une autre affaire pour son rôle dans la mort de 148 villageois chiites dans les années 1980 à Doujaïl, au nord de Bagdad.
Durant ce procès, des dizaines de témoins ont détaillé les atrocités (armes chimiques, tortures, viols, exécutions sommaires) commises contre les populations kurdes.
Entendu comme témoin, Khudhur Qadir Mohammed, un ancien peshmerga (combattant kurde), né en 1970, avait raconté le bombardement chimique de son village par l'aviation irakienne, en mai 1988, puis sa capture en novembre de la même année.
"J'ai été conduit avec d'autres détenus devant une tranchée, et un peloton d'exécution a ouvert le feu sur nous. J'ai été protégé des balles par les corps de mes compatriotes et j'ai feint d'être mort", avait-il raconté.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.