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"Ali le Chimique" condamné à mort pour le génocide kurde en Irak


Dimanche 24 juin 2007 à 15h16

BAGDAD, 24 juin 2007 (AFP) — "Ali le Chimique", cousin et proche collaborateur de Saddam Hussein, a été condamné à mort par pendaison dimanche à Bagdad, avec deux autres dignitaires de l'ancien régime irakien, pour le massacre de 182.000 Kurdes d'Irak en 1988.

Les trois hommes étaient jugés avec trois autres hauts responsables du régime pour leur rôle dans une campagne d'exécutions de masse et de bombardements chimiques menée au Kurdistan irakien, dans le nord du pays, et baptisée opération "Anfal".

Le Haut tribunal pénal irakien les a condamnés à la peine capitale pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Deux autres accusés ont été condamnés à la réclusion à perpétuité et le sixième acquitté faute de preuves.

Principale figure de ce procès, Ali Hassan al-Majid, surnommé "Ali le Chimique", a été le dernier à connaître son sort.

L'homme âgé de 66 ans, la tête couverte d'un keffieh et vêtu d'une robe traditionnelle arabe, avait l'air épuisé et a écouté en silence la lecture du verdict.

Le tribunal l'a reconnu coupable d'avoir ordonné aux forces de sécurité d'utiliser des armes chimiques contre les Kurdes.

"Merci Dieu", a-t-il seulement lâché en quittant le tribunal après l'énoncé du verdict.

L'ancien directeur-adjoint des opérations militaires, Hussein Rachid al-Tikriti, lui aussi condamné à mort, n'a exprimé aucun remord.

"Merci Dieu d'être exécuté au nom de la courageuse armée irakienne, longue vie à l'Irak et longue vie à la courageuse armée irakienne", a-t-il dit au moment où un vigile l'évacuait.

L'ancien ministre de la Défense Sultan Hachim al-Tai a quant à lui clamé son innocence: "Je ne dirai rien de nouveau et je vous laisse à Dieu. Je suis innocent", a-t-il affirmé au moment où un vigile s'approchait du box des accusés pour l'emmener.

Et le président du tribunal d'expliquer au cours de l'audience: "la peine est la pendaison pour avoir commis des crimes avec préméditation et tué des gens dans des circonstances cruelles. C'est un crime contre l'humanité".

Deux autres accusés, Farhan al-Joubouri et Sabir al-Douri, anciens dirigeants des puissants services du renseignement militaire, ont été condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité.

Enfin, le sixième accusé, Taher al-Ani, ancien gouverneur de Mossoul (nord de l'Irak), a été acquitté pour "manque de preuves", comme l'avait demandé le Parquet. Le ministère public avait en revanche requis la peine de mort pour les cinq autres.

Les défenseurs des anciens dignitaires s'apprêtent à faire appel, a annoncé à l'AFP le chef de l'équipe d'avocats basée à Amman, Khalil al-Doulaimi, bien que résigné.

"Il est inutile de tenter de quelconques démarches légales contre les verdicts, mais nous avons l'intention de faire appel quoi qu'il en soit", a-t-il estimé.

La Chambre d'appel doit recevoir les dossiers du procès dans un délai de 10 jours. Statuant sur la forme et non le fond, elle se prononce en général assez rapidement. Si l'appel est fondé, un nouveau procès doit avoir lieu. Dans le cas contraire, les peines doivent être appliquées dans un délai de 30 jours.

Réagissant à la décision du tribunal, le gouvernement régional du Kurdistan a estimé que l'aboutissement de cette procédure était "un triomphe pour l'Etat de droit et les pratiques démocratiques absentes sous l'ancien régime, mais que les autorités judiciaires s'efforcent de remettre en place dans l'Irak d'aujourd'hui".

Le procès s'était ouvert le 21 août 2006 à Bagdad devant le Haut tribunal pénal irakien, une juridiction spécialement créée pour juger les responsables de l'ancien régime.

Au cours du procès, les accusés avaient expliqué pour leur défense que les opérations Anfal (butin) constituaient un exemple classique de lutte anti-guérilla, dans le cadre de la guerre ayant opposé l'Irak à l'Iran entre 1980 et 1988.

En janvier, les poursuites contre l'ex-président Saddam Hussein avaient été officiellement abandonnées, après l'exécution par pendaison le 30 décembre 2006 de l'ex-raïs.

Jugé lui aussi dans le dossier Anfal, il avait été condamné dans une autre affaire, pour son rôle dans la mort de 148 villageois chiites dans les années 1980 à Doujaïl, au nord de Bagdad.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.