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Actions répétées du PKK en Turquie: les soupçons pèsent sur le régime syrien


Jeudi 23 août 2012 à 15h13

ANKARA (Turquie), 23 août 2012 (AFP) — La brusque multiplication ces derniers jours des attaques des séparatistes kurdes en Turquie, le long de sa frontière avec la Syrie, nourrit de plus belle à Ankara les craintes de débordements sur son territoire du conflit qui menace le régime de Damas.

Même si l'été est traditionnellement propice aux opérations du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans le sud-est anatolien, peuplé majoritairement de Kurdes, l'attentat à la voiture piégée qui a fait neuf victimes civiles lundi à Gaziantep, jusque-là épargnée par les violences entre le PKK et l'armée turque, a suscité une forte émotion en Turquie.

Comme de coutume, le mouvement séparatiste kurde n'a pas revendiqué la paternité de cette explosion. Mais, sans aucun doute, les autorités turques y ont vu la main du PKK, en conflit avec elles depuis 1984.

Le chef de la diplomatie turque Ahmet Davutoglu est allé plus loin en suggérant une implication syrienne. Sans autre détail, il a souligné "un parallélisme en matière de mentalité et de méthode" entre l'attentat de Gaziantep et la répression sanglante exercée par le régime du président Bachar al-Assad contre sa population.

Présents mercredi à Gaziantep, le président turc Abdullah Gül et son Premier ministre Recep Tayyip Erdogan se sont, eux, refusés devant la presse à reconnaître une quelconque piste syrienne dans l'origine de l'attentat.

Un des vice-présidents du parti au pouvoir en Turquie, le Parti de la justice et du développement (AKP, issu de la mouvance islamiste), Hüseyin Celik, a pourtant, lui, clairement mis en cause Damas.

"Il est connu que le PKK travaille main dans la main avec l'al Moukhabarat (les renseignements syriens). Al-Assad considère l'ennemi de la Turquie, le PKK, comme un allié", a-t-il dans des déclarations à la presse.

Avant la crise, M. Erdogan cultivait pourtant une relation amicale avec le président syrien et les relations entre leurs pays étaient cordiales.

Mais avec la poursuite de la répression, la Turquie a commencé à réclamer le départ de Bachar al-Assad et permis aux opposants armés à son régime de s'organiser sur son sol, où elle abrite aujourd'hui plus de 70.000 réfugiés, une politique jugée dangereuse et dénoncée par l'opposition turque.

En collaborant avec l'Armée syrienne libre (ASL), qui mène des attaques en Syrie, les dirigeants turcs ont mis le feu au poudre et rapproché le PKK du régime syrien, comme ce fut le cas avant 1998 lorsque Damas abritait le chef du PKK, Abdullah Öcalan, ont ainsi estimé des éditorialistes.

"Gaziantep a été la cible du PKK qui a voulu saboter la politique syrienne du gouvernement" turc, a jugé Asli Aydintasbas du quotidien libéral Milliyet. Et son confrère de Radikal, Deniz Zeyrek, a lui accusé M. Assad d'avoir orchestré en coulisse l'attentat pour "mettre en garde" le gouvernement turc.

Les affrontements qui ont tué dans la nuit de mercredi à jeudi cinq soldats turcs et 16 rebelles kurdes ont conforté le regain d'action du PKK contre les troupes d'Ankara. Et l'hypothèse d'un éventuel soutien de Damas. Même si, dans des déclarations à un journal turc début juillet, le président syrien avait démenti tout soutien au PKK contre le Turquie.

Le mois dernier, M. Erdogan a brandi la menace d'une intervention armée lorsque le Parti de l'Union démocratique (PYD), un des mouvements kurdes de Syrie, proche du PKK selon Ankara, a pris le contrôle de plusieurs villes syriennes proches de la frontière turque.

"Si dans un pays il y a une vacance de pouvoir, les organisations terroristes sont les premières à l'exploiter et, dans ce cas, possiblement le PKK", a indiqué à l'AFP Kamer Kasim, du Centre de recherche stratégique international à Ankara (Usak). "En Syrie c'est actuellement le chaos", a-t-il ajouté, "ce qui ne peut servir qu'aux mouvements armés illégaux".

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.