Page Précédente

A la frontière polono-bélarusse, un Syrien de 33 ans attend ses parents avec inquiétude


Mercredi 17 novembre 2021 à 12h08

SIEMIATYCZE (Poland), 17 nov 2021 (AFP) — Alors que des affrontements éclatent à la frontière polono-bélarusse, un Kurde syrien de 33 ans attend avec impatience des nouvelles de son père, espérant que celui-ci réussira sa dixième tentative d'entrée sur le territoire de l'UE.

L'homme, qui utilise le prénom de Zaïd et vit en Autriche, a déclaré dans un entretien à l'AFP qu'il était depuis un mois à Siematycze, une ville polonaise à la frontière orientale de l'UE, à attendre son père se trouvant toujours du côté bélarusse, sa mère ayant déjà réussi à passer en Pologne.

"J'ai peur, bien sûr. Ce qui se passe à la frontière n'est pas normal. (...) Les gens sont laissés sans eau ni nourriture, les gens sont malades et ne reçoivent pas de médicaments", a-t-il dit.

Il y a une semaine, a-t-il indiqué, sa mère et son père qu'il n'a pas vu depuis 12 ans ont réussi à traverser la frontière polonaise depuis le Bélarus avant d'être interpellés par les autorités polonaises. Sa mère a été emmenée à l'hôpital et autorisée à y rester, mais son père a été refoulé.

"Nous ne comprenons pas pourquoi puisqu'ils auraient dû aller à l'hôpital ensemble car ils étaient tous les deux malades après être restés 25 jours entre les deux pays sans nourriture, eau ou médicaments".

Depuis, il a pu rencontrer à deux reprises sa mère, placée en quarantaine dans un centre pour migrants, mais il n'a plus eu aucun contact avec son père.

"La nuit où ils ont été interpellés à la frontière, il a donné le téléphone à ma mère parce qu'ils étaient sûrs qu'ils resteraient ensemble", a déclaré Zaïd, demandant de ne pas divulguer son vrai nom.

Dévoré par l'inquiétude pour ses parents, Zaïd a déclaré qu'il avait énormément perdu de poids depuis son arrivée en Pologne, mangeant à peine et se contentant de café et de cigarettes.

S'adressant à sa mère au téléphone, Zaïd lui a posé des questions sur son état de santé.

"J'ai mal aux pieds. Ils me font tellement mal", a-t-elle déclaré en kurmanji, un dialecte kurde.

"Je pense toujours à ton père. J'espère qu'il arrivera le plus tôt possible. Je souhaite seulement qu'il soit ici", a-t-elle dit.

Selon lui, sa mère a "complètement changé" après avoir passé 25 jours à la frontière. "Ce n'est plus la même personne".

- "Pas de patrie" -

Quelques milliers de migrants campent le long de la frontière polono-bélarusse dans des conditions de plus en plus difficiles, les températures descendant de plus en plus bas.

La Pologne les empêche d'entrer sur son territoire et accuse le Bélarus de ne pas les autoriser de quitter la zone frontalière.

L'Occident accuse le Bélarus d'attirer les gens vers la frontière avec de fausses promesses d'un passage facile dans l'Union européenne. Minsk rejette les accusations et demande à l'UE de laisser entrer les migrants.

"Je ne peux pas décrire ce que je ressens. Je n'ai pas de mots", a déclaré Zaïd.

Selon lui, ses parents ont traversé ensemble la frontière à six reprises mais ont été renvoyés chaque fois au Bélarus par les autorités polonaises.

Son père a fait trois autres tentatives tout seul - qui ont toutes été infructueuses.

Ils ont dit qu'ils avaient pensé à faire demi-tour, "mais maintenant le retour est difficile car maintenant c'est comme si nous n'avions pas de patrie", a-t-il déclaré.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.