Page Précédente

Syrie : Erdogan à la frontière, promet de poursuivre l'offensive


Jeudi 25 janvier 2018 à 22h20

Antakya (Turquie), 25 jan 2018 (AFP) — Le président turc Recep Tayyip Erdogan a promis jeudi de mener à terme l'offensive de son pays dans le nord de la Syrie contre une milice kurde alliée des Etats-Unis, alors que les tensions avec Washington s'accroissent.

Au sixième jour de cette offensive qui suscite l'inquiétude de plusieurs Etats, M. Erdogan s'est rendu au QG de commandement de l'opération dans la province frontalière de Hatay en compagnie du chef de l'armée et du ministre de la Défense, selon la présidence turque.

Au cours de ce déplacement, M. Erdogan a affirmé que l'offensive contre la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG) se poursuivrait "jusqu'à ce que le résultat soit obtenu", d'après un communiqué de la présidence turque.

Cette visite à la frontière survient au moment-même où les frictions entre la Turquie et les Etats-Unis au sujet de l'opération d'Ankara ont éclaté au grand jour, jeudi, au lendemain d'un entretien téléphonique entre M. Erdogan et le président américain Donald Trump.

Pendant cet entretien, selon le compte-rendu de la Maison Blanche, M. Trump a "exhorté la Turquie à réduire et limiter ses actions militaires" et demandé d'éviter "toute action qui risquerait de provoquer un affrontement entre les forces turques et américaines".

Mais Ankara s'est inscrit en faux contre cette version, affirmant que "le président Trump n'(avait) pas exprimé d'inquiétudes (à propos) d'une escalade de la violence" à Afrine.

Le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, a estimé que la Turquie, membre de l'Alliance atlantique, avait "le droit de se défendre", mais "de manière proportionnée et mesurée".

- Appel à Damas -

Un porte-parole du Pentagone a déclaré jeudi que des militaires américains et turcs discutaient de la possibilité de créer une "zone de sécurité" à la frontière turque, mais qu'il s'agissait pour le moment "seulement d'une idée".

Le chef de la diplomatie turque Mevlüt Cavusoglu avait peu avant évoqué cette option, parlant d'une zone tampon de 30 km de profondeur. Il avait toutefois estimé qu'il fallait, avant d'en discuter, "rétablir la confiance" entre Ankara et Washington.

La passe d'armes au sujet de l'entretien illustre le fossé séparant les deux pays en ce qui concerne les YPG : "terroriste" pour Ankara, cette milice est l'alliée de la coalition emmenée par les Etats-Unis qui combat le groupe Etat islamique (EI).

Les groupes kurdes ont mis à profit leur alliance avec Washington pour étendre leur contrôle sur de vastes territoires dans le nord de la Syrie d'où les jihadistes ont été chassés. Ils disposent aujourd'hui de trois "cantons" : Afrine, Kobané et Jaziré.

Jeudi, l'administration semi-autonome d'Afrine, dominée par des groupes kurdes, a exhorté le régime de Damas à "faire face à cette agression (turque)" et à empêcher les avions turcs de survoler la région.

Après le début de l'offensive, le gouvernement de Bachar al-Assad avait déjà menacé de détruire tout appareil turc survolant le territoire syrien, des déclarations restées sans effet.

En outre, le président Erdogan a affirmé que l'opération était réalisée en accord avec la Russie, qui soutient Damas et contrôle l'espace aérien de cette partie de la Syrie.

- Briser les lignes -

Sur le terrain, l'artillerie et l'aviation turques ont de nouveaux pilonné jeudi les positions des YPG pour soutenir les tentatives des forces alliées à Ankara de briser les lignes kurdes.

Au sixième jour de l'offensive turque, un nouveau cycle de pourparlers de paix sur la Syrie s'est ouvert jeudi à Vienne.

Cette opération militaire suscite l'inquiétude de plusieurs pays qui redoutent que l'ouverture d'un nouveau front ne complique davantage le processus de règlement du conflit syrien. Jeudi, Berlin a demandé à l'Otan l'ouverture de discussions à ce sujet.

Face aux inquiétudes occidentales, le ministre turc des Affaires européennes Omer Celik a appelé jeudi les pays européens à faire montre de solidarité en se tenant "aux côtés" d'Ankara.

Depuis samedi, près de 100 combattants des YPG et des groupes rebelles syriens proturcs ont été tués, ainsi que 33 civils, la plupart dans des bombardements turcs, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Ankara dément avoir touché des civils. L'armée turque a déploré trois morts.

Dans la ville turque de Kilis, quelques centaines de personnes ont participé jeudi aux obsèques de deux hommes tués la veille par des tirs de roquettes à partir du nord de la Syrie imputés aux YPG.

Dans la région d'Afrine, la localité de Jandairis, située à proximité d'une ligne de front avec les rebelles proturcs, a été particulièrement touchée par des raids aériens et des tirs de roquettes.

"Je ne partirai pas de Jandairis tant que je suis en vie", a affirmé à l'AFP Abou Jiwane, un septuagénaire dont les bombardements ont endommagé la maison, poussant plusieurs voisins à s'en aller.

burs-ezz-gkg/bds

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.