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Bagdad accentue la pression sur le Kurdistan irakien à 10 jours d'un référendum


Jeudi 14 septembre 2017 à 13h40

Bagdad, 14 sept 2017 (AFP) — Bagdad a accentué jeudi sa pression sur le Kurdistan irakien en limogeant le gouverneur de la province disputée de Kirkouk qui avait pris parti pour le référendum kurde d'indépendance.

Mardi déjà, le Parlement fédéral avait voté contre cette consultation prévue le 25 septembre et qui a déjà provoqué des remous dans l'ensemble de la région, les pays voisins redoutant que les velléités séparatistes d'Erbil ne fassent tache d'huile parmi leur minorité kurde.

Jeudi, il a voté à l'unanimité des 173 députés présents, à l'appel du Premier ministre Haider al-Abadi, le limogeage de Najm Eddine Karim. Le gouverneur kurde de la riche province pétrolière de Kirkouk avait en effet annoncé fin août qu'il y organiserait le référendum kurde, contre l'avis de Bagdad alors que Kirkouk n'est pas rattachée au gouvernement local d'Erbil.

A mesure qu'approche le rendez-vous électoral du 25 septembre, le bras de fer entre Bagdad et Erbil ne cesse de s'accentuer, à coup de votes contestés et de rumeurs de plus en plus persistantes sur de possibles violences à venir.

Fin août, le conseil provincial de Kirkouk votait pour organiser le référendum, en l'absence de ses membres arabes et turkmènes qui avaient appelé au boycott. Mardi, les députés kurdes quittaient en signe de protestation le Parlement à Bagdad.

Le Parlement d'Erbil, qui n'a pas siégé depuis plus de deux ans, tiendra vendredi une session pour donner "un cadre légal" au référendum, selon le porte-parole de cette assemblée, Tariq Jawhar.

La question des zones disputées, comme Kirkouk, est particulièrement sensible en Irak et le référendum pourrait faire exploser la situation.

- 'Guerre civile' -

Dans la province de Kirkouk par exemple, la rumeur va grandissante, assurant que les différentes communautés s'approvisionnent en armes, tandis que de nombreuses forces armées paramilitaires se sont installées un peu partout dans le pays, à la faveur de l'avancée des troupes face aux jihadistes du groupe Etat islamique (EI) en déroute.

Dans la ville même de Kirkouk, les peshmergas, les combattants kurdes, ont pris de fait le contrôle de la sécurité, tandis qu'aux alentours, des unités paramilitaires chiites se sont déployées.

Hadi al-Ameri, le chef de l'organisation Badr, puissant groupe paramilitaire soutenu par Téhéran, a violemment dénoncé récemment les ambitions séparatistes des Kurdes susceptibles selon lui d'ouvrir la porte aux velléités des sunnites ou d'autres minorités. "Une partition mènera à la guerre civile", a lancé lors d'un discours cet influent commandant chiite.

"Nous n'allons pas tomber d'accord sur les frontières entre Arabes et Kurdes, nous n'avons pas d'autre choix que de protéger l'unité de l'Irak, sa souveraineté, son honneur et son indépendance", a-t-il martelé.

Les responsables kurdes affirment qu'une victoire du "oui" au référendum n'entraînera pas aussitôt l'annonce de l'indépendance mais leur permettra de lancer, en position de force, de nouvelles négociations avec le pouvoir à Bagdad.

Les pays voisins, Téhéran et Ankara en tête, appellent toutefois toujours à annuler cette consultation.

Jeudi, la Turquie a averti que la tenue du référendum "aura un prix", une opposition susceptible de compromettre la viabilité d'un éventuel Etat kurde car le Kurdistan irakien tire ses principales recettes de l'exportation de pétrole via un pipeline arrivant au port turc de Ceyhan.

Washington et de nombreux pays occidentaux appellent aussi à repousser ou annuler le référendum, estimant qu'il entravera la lutte contre l'EI, qui tient encore deux bastions en Irak.

Quant aux 5,5 millions de Kurdes appelés à se prononcer pour ou contre l'indépendance du Kurdistan irakien -qui bénéficie depuis 1991 d'une autonomie qui s'est élargie au fil des ans-, ils sont eux divisés sur la question du calendrier du vote.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.