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Turquie: Erdogan presse l'Europe de renoncer à sa complaisance envers la rébellion kurde


Vendredi 18 mars 2016 à 11h50

Ankara, 18 mars 2016 (AFP) — Le président turc Recep Tayyip Erdogan a pressé vendredi l'Europe de renoncer à toute complaisance envers les rebelles kurdes, cinq jours après un attentat meurtrier à Ankara revendiqué par un groupe kurde qui a replongé son pays en état d'alerte maximale.

"Il n'y a pas de raison que la bombe qui a explosé à Ankara (...) n'explose par un jour dans une autre ville en Europe", a dit M. Erdogan, "malgré cette réalité, les pays européens ne font pas attention, comme s'ils dansaient dans un champ de mines".

Les propos du chef de l'Etat islamo-conservateur, lors d'un discours à Canakkale (nord-ouest), interviennent alors que son Premier ministre Ahmet Davutoglu se trouve à Bruxelles pour négocier avec l'Union européenne (UE) un plan d'action sur les migrants.

M. Erdogan s'en est particulièrement pris à la Belgique, affirmant que des sympathisants du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, interdit) avaient récemment été autorisés à arborer des drapeaux du mouvement près du bâtiment de la Commission européenne.

"Ce n'est pas honnête, ce n'est pas sincère", a fulminé M. Erdogan. "Aujourd'hui ils ont enlevé les drapeaux, les posters. Qui essayez-vous de tromper ?".

"Ils ont capitulé face à la terreur", a-t-il jugé.

Mercredi, la chancelière allemande Angela Merkel avait reconnu le droit à une réponse armée "proportionnée" face au PKK, considéré comme un mouvement "terroriste" par l'UE. Mais elle s'était aussi inquiétée du "traitement des Kurdes".

Dimanche soir, une voiture piégée a foncé sur une arrêt de bus de la très fréquentée place Kizilay d'Ankara, faisant 35 morts et plus de 120 blessés.

Cet attentat a été revendiqué par un groupe radical dissident du PKK, les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), en représailles aux opérations menées par l'armée et la police turques contre la rébellion dans plusieurs villes du Sud-Est anatolien.

- Alertes -

Les TAK ont annoncé d'autres attaques contre l'Etat turc.

La police turque a neutralisé jeudi soir une voiture bourrée de 150 kg d'explosifs stationnée près d'un bâtiment du gouvernement dans la province de Diyarbakir (sud-est), a-t-on appris auprès des services de sécurité.

L'Allemagne a fermé jeudi son ambassade à Ankara, son consulat général à Istanbul et ses écoles dans les deux villes en raison d'un risque d'attentat. Le consulat et les deux établissements scolaires étaient toujours fermés vendredi.

De son côté, l'ambassade des Etats-Unis à Ankara a recommandé à ses ressortissants en Turquie "d'éviter tout rassemblement politique ou manifestation" à l'occasion des fêtes du Nouvel an kurde, célébrées dimanche et lundi prochains.

La semaine dernière, elle avait émis une alerte au sujet d'un risque d'attentat à Ankara, quelques jours avant l'attaque de la place Kizilay.

M. Erdogan a promis "d'éradiquer" le PKK. Depuis l'attentat d'Ankara, il a relancé l'offensive contre tous ceux qu'il considère comme les "complices" de "l'organisation terroriste", élus, intellectuels ou journalistes.

Il a pressé le Parlement de lever l'immunité de députés prokurdes poursuivis pour "propagande terroriste", alors que la police turque a multiplié ces derniers jours les arrestations de partisans de la cause kurde.

La Maison Blanche a appelé jeudi les autorités turques à respecter les valeurs démocratiques, pointant vers les atteintes récentes à la liberté de la presse avec notamment la mise sous tutelle du journal d'opposition Zaman.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.