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Le leader prokurde de Turquie appelle l'UE et l'Otan à condamner une "guerre injustifiée"


Jeudi 6 août 2015 à 19h14

Bruxelles, 6 août 2015 (AFP) — Le dirigeant du parti prokurde de Turquie, Selahattin Demirtas, a exhorté jeudi "le monde entier" à condamner la "guerre injuste et injustifiée" que mène l'armée turque contre la guérilla du PKK et a prié l'UE d'appeler "très clairement" à un cessez-le-feu.

"Le monde entier doit vraiment crier que cette guerre est une guerre injuste et injustifiée", a déclaré à Bruxelles M. Demirtas, co-président du Parti démocratique du peuple (HDP), à propos de la campagne de bombardements déclenchée par la Turquie le 24 juillet qui vise quasi-exclusivement des bases du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans le nord de l'Irak.

La semaine dernière, l'Otan avait assuré la Turquie, l'un des piliers de l'Alliance atlantique, de sa "forte solidarité" face au "terrorisme", mettant sur le même plan le groupe jihadiste Etat islamique (EI) et le PKK.

"L'Union européenne doit très clairement et ouvertement soutenir une (reprise des) négociations entre le PKK et la Turquie", a plaidé M. Demirtas dans un entretien à l'AFP.

"Ils doivent lancer un message" pour "soutenir la négociation entre (le fondateur incarcéré du PKK, Abdullah) Ocalan et le gouvernement turc, et les presser de conclure un cessez-le-feu", a-t-il insisté.

M. Demirtas est à Bruxelles pour rencontrer le chef de cabinet de la Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères, Federica Mogherini, ainsi que Zübeyir Aydar, président du Congrès national kurde (KCK), l'aile politique du PKK.

Par le biais de M. Aydar, M. Demirtas espère faire passer "indirectement" un "message" au PKK, classé organisation terroriste par la Turquie, l'UE et les Etats-Unis: "retourner à la table des négociations et que les parties en conflit entament un dialogue".

- Impasse politique -

Le cycle de violences, qui a mis fin à trois années de trêve, a été déclenché par l'attentat suicide le 20 juillet à Suruç (sud), attribué au groupe Etat islamique (EI), dans lequel 32 jeunes militants de la cause kurde ont trouvé la mort. La guérilla kurde a aussitôt répliqué contre les forces de l'ordre turques, accusées de ne pas protéger la population locale.

M. Demirtas a rappelé qu'Ankara et la rébellion kurde avaient entamé des pourparlers de paix historiques après la trêve entamée en 2013.

"Tout le monde doit poser cette question au gouvernement (du président Recep Tayyip) Erdogan: +pour quelle raison n'avez-vous pas accepté cette situation d'un PKK qui était sur le point d'abandonner la lutte armée et pourquoi avez-vous poussé l'organisation vers une guerre ? Pourquoi avez-vous entamé une nouvelle guerre?+", s'est-il interrogé.

Son parti HDP a réalisé une percée électorale sans précédent en raflant 13% des voix aux législatives de juin, privant de sa majorité parlementaire l'AKP après dix ans de pouvoir incontesté. Le parti de Recep Tayyip Erdogan tente depuis, mais sans succès, de former une coalition pour gouverner.

M. Demirtas a une nouvelle fois accusé le président Erdogan d'avoir déclenché cette offensive pour susciter la sympathie de l'électorat nationaliste, alors que se profile la perspective de nouvelles élections convoquées pour sortir de l'impasse.

De son côté, le commissaire européen à l'Elargissement, Johannes Hahn, a indiqué sur Twitter qu'il s'était entretenu jeudi avec Kemal Kilicdaroglu, le chef du parti d'opposition social-démocrate turc CHP, en pourparlers avec l'AKP pour former une coalition gouvernementale, l'appelant à "une approche mesurée et constructive".

M. Hahn avait parlé lundi avec le ministre turc des Affaires européennes, Volkan Bozkir, et avec M. Demirtas la semaine dernière.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.