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Le suspect de la tuerie anti-Kurdes à Paris rejugé pour l'agression de cambrioleurs en 2016


Mardi 21 mars 2023 à 20h26

Paris, 21 mars 2023 (AFP) — Le sexagénaire soupçonné de l'assassinat de trois Kurdes en décembre à Paris, William Malet, a été rejugé mardi pour avoir, en 2016, agressé au couteau trois cambrioleurs chez lui, un épisode qui, selon ses mots, avait "énormément accentué" son obsession raciste.

Ce conducteur de TGV à la retraite de 69 ans avait reconnu avoir ouvert le feu, le 23 décembre, devant un centre culturel kurde de Paris, faisant trois morts et trois blessés. Mis en examen et écroué après les faits, il avait expliqué son geste par sa "haine pathologique" des étrangers.

L'enquête sur ces assassinats et tentatives d'assassinats à caractère raciste n'en est qu'à ses débuts.

William Malet, qui se présente comme "tireur, chasseur et collectionneur" d'armes, est par ailleurs mis en examen pour avoir attaqué au sabre un campement de migrants à Paris le 8 décembre 2021, blessant deux personnes dont l'une grièvement.

Mardi, c'est pour l'agression de cambrioleurs, il y a sept ans, alors qu'il rentrait à son domicile de Livry-Gargan (Seine-Saint-Denis), qu'il comparaissait devant la cour d'appel de Paris.

William Malet, barbe et cheveux blancs, en pantalon noir et pull camel, a plaidé la "légitime défense", tout en reconnaissant que les intrus n'étaient "pas menaçants" et qu'il les supposait armés mais n'avait pas vu d'arme.

Une patrouille de police l'avait arrêté alors qu'il poursuivait les trois hommes dans la rue, armé d'un fusil d'assaut chargé de 19 cartouches.

En première instance, le tribunal correctionnel de Bobigny l'avait condamné, le 30 juin 2022, à un an de prison ferme pour les blessures infligées avec une dague de 24 cm aux trois personnes, entrées sans signe d'effraction dans son pavillon dont la porte-fenêtre était cassée.

Les trois cambrioleurs avaient eux aussi été condamnés à un an d'emprisonnement ferme, lors du même procès, selon le jugement consulté par l'AFP.

L'arsenal non déclaré découvert dans la maison dans un état de "délabrement avancé" avait aussi valu à M. Malet d'être condamné en 2017 à six mois d'emprisonnement avec sursis et d'une interdiction de détenir des armes pendant cinq ans.

- "En découdre" -

William Malet, qui a pratiqué le karaté et le tir sportif pendant "une quarantaine d'années", avait lui subi des "plaies superficielles" au bras et à la jambe de la part des intrus, deux Algériens et un Marocain âgés de 21 à 28 ans en situation irrégulière, qui ont affirmé qu'ils pensaient la maison abandonnée et voulaient s'y abriter pour la nuit.

Se balançant d'une jambe sur l'autre, le prévenu s'exprime avec un débit rapide, parfois peu compréhensible.

Cet épisode, sa condamnation en première instance et le "grand vide" laissé par la saisie de ses armes "a énormément accentué" son obsession contre les étrangers, explique-t-il.

Une haine qui remonte à son service militaire, "dans un régiment de parachutiste qui s'est illustré pendant la guerre d'Algérie".

Il assimile l'islam au "crime", assume de "considérer tous les étrangers non européens sans distinction comme "une menace".

Il présente son "attaque" de 2016 comme "préventive", la justifie lui-même par le fait qu'"ils avaient l'air musulmans". Et de lancer: "les coups en douce (...) c'est leur spécialité", "il suffit de regarder ce qu'il se passe en Israël, il y a des attaques au couteau tous les jours".

L'accusation a réclamé "quatre ans d'emprisonnement" contre le sexagénaire, affirmant que les conditions de "danger immédiat" et de "riposte proportionnée" nécessaires pour reconnaître la légitime défense n'étaient pas remplies. "C'est lui qui donne le premier coup. Il n'a jamais cherché à faire fuir ses agresseurs, il a cherché à en découdre", a-t-elle affirmé.

"Il y a une incohérence dans le jugement de première instance", a estimé la magistrate, pointant des violences "absolument pas au même niveau", avec des blessures "dans les parties vitales", "dans le dos" et des "lésions de défense" sur les trois intrus.

"Monsieur n'a pas eu le choix", a au contraire plaidé l'avocate de Willam Malet, affirmant que les trois jeunes refusaient de partir et que, ayant vu un tiroir où il rangeait des couteaux ouvert, il avait pensé qu'ils en avaient pris et "étaient armés".

La décision sera rendue le 9 mai.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.