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L'Iran condamne à mort un Irano-Allemand pour "terrorisme"


Mardi 21 février 2023 à 16h40

Berlin, 21 fév 2023 (AFP) — La justice iranienne a condamné à mort mardi un dissident irano-allemand, kidnappé et emmené de force en Iran selon ses proches, pour son implication présumée dans un attentat, une décision qualifiée "d'inacceptable" par l'Allemagne.

Agé de 67 ans, Jamshid Sharmahd avait été présenté devant un tribunal à Téhéran en février 2022 en étant accusé d'avoir participé à un attentat contre une mosquée à Chiraz, dans le sud de l'Iran, qui avait fait 14 morts en avril 2008.

"Jamshid Sharmahd, le chef du groupe terroriste Tondar, a été condamné à mort pour corruption sur terre en planifiant et en dirigeant des actions terroristes", a annoncé l'agence de l'autorité judiciaire iranienne Mizan Online.

La justice lui a reproché en outre d'avoir établi des contacts avec des "officiers du FBI et de la CIA" et d'avoir "tenté de contacter des agents du Mossad israélien".

- "Kidnappé" -

Les soutiens de M. Sharmahd en Allemagne avaient rejeté ces accusations, exhortant Berlin à "agir immédiatement" pour "sauver [sa] vie".

L'Allemagne a qualifié "d'absolument inacceptable" cette condamnation. "L'application de la peine de mort à M. Sharmahd entraînera une réaction significative", a prévenu la ministre des Affaires étrangères Annalena Baerbock.

La famille du dissident disait craindre que ne lui soit réservé le même sort qu'à l'opposant iranien Ruhollah Zam, réfugié en France, qui a été pendu en décembre 2020 en Iran après avoir quitté Paris pour l'Irak, où ses partisans affirment qu'il a été arrêté par les autorités iraniennes.

La condamnation à mort de Jamshid Sharmahd a été prononcée par un tribunal de première instance et peut donc faire l'objet d'un recours devant la Cour suprême, a précisé Mizan Online.

L'Iran avait annoncé en août 2020 l'arrestation du dissident, qui résidait alors aux Etats-Unis, lors d'une "opération complexe", sans préciser ni où ni comment ni quand il a été arrêté.

Selon sa famille, il a été enlevé par les services de sécurité iraniens alors qu'il était en transit à Dubaï, et amené de force en Iran.

"Ils ont kidnappé Jamshid Sharmahd et maintenant ils l'envoient à la mort après un simulacre de procès", a dénoncé mardi Mahmood Amiry-Moghaddam, le directeur de l'ONG Iran Human Rights (IHR), basée en Norvège. "En fait, la République islamique menace tout simplement de tuer un otage", a-t-il fustigé.

"Le traitement réservé à Jamshid Sharmahd témoigne du mépris des droits humains fondamentaux qui est ancré dans les autorités iraniennes", a abondé Amnesty International.

- Nouvelles sanctions de l'UE -

Né à Téhéran, M. Sharmahd a émigré en Allemagne dans les années 1980 et vivait depuis 2003 aux Etats-Unis, où il s'est notamment illustré par des déclarations hostiles à la République islamique sur des chaînes satellitaires en persan.

Egalement connu sous le nom d'Association monarchiste d'Iran, le groupe Tondar ("Tonnerre", en persan) affirme vouloir renverser la République islamique.

Téhéran a provoqué une vague d'indignation internationale après avoir exécuté en janvier un ancien responsable de la Défense, l'Irano-Britannique Alireza Akbari, reconnu coupable pour espionnage.

Le 6 décembre, la justice a annoncé la condamnation à mort de l'opposant irano-suédois Habib Farjollah Chaab, connu également comme Habib Asyud, pour corruption sur terre. Chef du groupe de l'ASMLA (Mouvement arabe de lutte pour la libération d'Ahvaz), considéré comme un mouvement terroriste par les autorités iraniennes, il avait disparu en octobre 2020 après s'être rendu à Istanbul et avant de réapparaître un mois plus tard détenu en Iran.

M. Chaab a été accusé d'avoir "planifié et mené des actions terroristes" ayant entraîné la mort de plus de 30 personnes dans deux attentats en 2006 et 2018.

Un autre opposant irano-suédois, Ahmadreza Djalali, risque également d'être pendu. Cet universitaire avait été arrêté lors d'une visite en Iran en avril 2016 et condamné à mort en 2017 pour espionnage pour le compte d'Israël. Selon sa famille, il est toujours dans le couloir de la mort.

La condamnation à mort de Jamshid Sharmahd a été annoncée au lendemain de nouvelles sanctions de l'Union européenne contre l'Iran. Deux ministres iraniens et 30 autres personnes ont été sanctionnés lundi par l'UE pour la répression des manifestations en Iran organisées depuis la mort en détention, le 16 septembre, d'une jeune Kurde iranienne, Mahsa Amini.

Au moins 16 détenteurs de passeports occidentaux, dont six Français, sont détenus en Iran.

La plupart d'entre eux sont des binationaux mais l'Iran ne reconnaît pas le statut de la double nationalité pour ses ressortissants.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.