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De l'Otan à un scandale d'anguilles, le gouvernement suédois "la tête sous l'eau"


Vendredi 27 janvier 2023 à 17h14

Stockholm, 27 jan 2023 (AFP) — Adhésion à l'Otan en panne, popularité au plus bas, promesses non tenues et un proche conseiller qui démissionne pour une affaire de pêche interdite... d'anguilles: le gouvernement suédois et son Premier ministre Ulf Kristersson connaissent des débuts difficiles, 100 jours après avoir noué une alliance inédite avec l'extrême droite.

Avec un pays en proie à une inflation galopante et des règlements de comptes à coup de bombes et de grenades malgré son engagement à "rétablir l'ordre" en Suède, le gouvernement "a des problèmes structurels majeurs à gérer, et les gens ne sont pas satisfaits", analyse pour l'AFP Patrik Öhberg de l'université de Göteborg.

A l'international, les négociations avec la Turquie sur l'adhésion de la Suède à l'Otan ont connu un grave coup d'arrêt, après que l'autodafé d'un Coran par un extrémiste anti-islam près de l'ambassade de Turquie à Stockholm a provoqué l'ire du monde musulman et un appel au boycott des produits suédois.

Sur le plan national, l'inflation, à un niveau record de 12,3%, dépasse celle de la zone euro, tandis que le gouvernement fait face aux critiques sur le retard d'au moins quatre mois pour compenser les ménages en proie à la hausse des prix de l'électricité.

Cerise sur le gâteau: la démission jeudi de "PM" Nilsson, un des proches conseillers politiques du Premier ministre. L'ancien éditorialiste a été contraint de quitter son poste après avoir menti à la police alors qu'il pêchait illégalement des anguilles.

Conséquence, le gouvernement, qui assure la présidence tournante de l'UE jusqu'à fin juin, "a la tête sous l'eau", soulignait vendredi le quotidien de référence Dagens Nyheter.

L'alliance de la droite traditionnelle suédoise avec les Démocrates de Suède (SD), hors du gouvernement mais première force de la majorité au Parlement, suscite la vigilance polie de partenaires européens.

Au Parlement européen, la présidence suédoise suscite des questions, sur sa façon de gérer les dossiers de l'immigration ou du climat avec un allié antiréfugiés et aux nombreux dérapages climatosceptiques.

Selon un sondage Demoskop cité vendredi par le quotidien Aftonbladet, seuls trois Suédois sur dix interrogés disaient avoir "confiance" en ce gouvernement.

Sur l'Otan, presque six personnes interrogées sur dix estimaient que la coalition de droite avait "plutôt mal" ou "très mal" géré l'accession de la Suède à l'alliance militaire.

- Malaise croissant -

Depuis la candidature conjointe de la Suède et de la Finlande à l'Alliance Atlantique en mai, la Turquie bloque l'adhésion des deux pays nordiques, reprochant notamment à la Suède d'abriter des "terroristes" kurdes.

Cette semaine, le président turc Recep Tayyip Erdogan s'en est pris à la Suède pour avoir permis des manifestations anti-Turquie, incluant l'autodafé d'un Coran.

Une réunion tripartite sur la candidature des deux pays, prévue le moins prochain, a été reportée sine die, éloignant encore plus les chances de voir les deux pays nordiques intégrer l'alliance militaire, a minima jusqu'aux élections turques mi-mai.

Dans un effort pour calmer les tensions avec Ankara, Ulf Kristersson a fustigé les "provocateurs qui souhaitaient gâcher les relations de la Suède avec d'autres pays".

Mais jusqu'où le pays nordique est prêt à aller pour apaiser Ankara? La question suscite un malaise croissant.

Et va jusqu'à ébranler la coopération de l'alliance de droite avec l'extrême droite des Démocrates de Suède (SD).

La semaine dernière, le leader des SD, Jimmie Åkesson, avait accusé Ulf Kristersson de "se plier" aux exigences de M. Erdogan.

Un avis que partage une large partie des Suédois, avec le sentiment que "le gouvernement à fait trop de concessions à Erdogan", analyse la directrice de l'institut de sondage Demoskop, Karin Nelsson.

Selon elle, l'Otan n'est cependant qu'un sujet de déception des Suédois. A cela s'ajoute les prix de l'énergie, les questions environemmentales, de santé et de criminalité.

Le gouvernement a été "sous le feu depuis qu'il a pris le pouvoir", résume la politologue.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.