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Démantèlement à Loon-Plage d'un camp de migrant théâtre d'affrontements


Mercredi 25 mai 2022 à 19h17

Loon-Plage (France), 25 mai 2022 (AFP) — Les autorités ont démantelé mercredi un camp de migrants de Loon-Plage, site de départ des traversées migratoires vers l'Angleterre près de Grande-Synthe, où de possibles règlements de compte entre passeurs ont fait depuis dimanche un mort et trois blessés.

L'évacuation a débuté au petit matin, avec le soutien d'un important dispositif policier --fourgons de CRS et motards-- tenant la presse à distance. Elle s'est terminée peu avant 13h00 selon des associations sur place.

Un car estampillé "Région Hauts-de-France" était présent pour convoyer les migrants, mais aucun d'entre eux n'a été vu y montant.

Les résidents ont préféré quitter les lieux à pied, certains en famille, avec des enfants juchés sur des chariots de supermarché.

Un large groupe s'est rapidement reformé aux abords du camp, pour l'essentiel des hommes seuls, kurdes irakiens. Des associatifs leur ont servi des bouteilles d'eau et un petit déjeuner.

"Certaines personnes" se sont ensuite "réinstallées sur le lieu de vie" à peine évacué, "comme c'est souvent le cas", a affirmé à l'AFP Léa Poncelet, de Human Rights Observer.

Contactée par l'AFP, la préfecture du Nord, n'a pas souhaité communiquer.

L'opération visait le principal camp de la zone du littoral autour de Grande-Synthe, où les autorités dénombraient quelque 500 migrants la semaine dernière, en attente d'un passage vers l'Angleterre.

Un exilé a été tué et un autre blessé lundi soir à proximité de ce camp. Deux autres y ont été blessés dimanche, dont un grièvement, dans des échanges de coups de feu.

Des bénévoles sur place dimanche ont affirmé avoir entendu des rafales évoquant des Kalachnikov.

Le procureur de Dunkerque, Sébastien Piève, a confirmé mardi à l'AFP que "des munitions percutées d'armes de guerre" ont été retrouvées.

"La particularité des faits de dimanche et lundi, c'est la gravité des blessures", a-t-il noté.

La Police aux frontières et la police judiciaire ont été saisies des enquêtes.

- "Appropriation du territoire" -

La piste de règlements de comptes entre passeurs dans ce campement constitue "une hypothèse, mais pas facile à établir", a indiqué M. Piève. Mais "il est certain qu'il y a un arrière-plan de trafic d'êtres humains".

Les blessés, qui n'ont pas encore pu être auditionnés, se disent d'origine kurde, a-t-il précisé mercredi.

Situé sur un vaste terrain boisé, limitrophe de la commune de Grande-Synthe, le site est proche d'un canal constituant sur le littoral un important point de départ des traversées migratoires vers l'Angleterre.

Selon Claire Millot, de l'association Salam, la plupart des associations d'aide aux migrants avaient cessé leurs interventions sur le site pour des raisons de sécurité. Environ 200 résidents avaient déjà quitté les lieux depuis dimanche.

Dans cette zone, les exilés sont d'habitude majoritairement kurdes, mais "on remarque maintenant qu'il y a beaucoup plus de nationalités présentes", notamment des pays africains, a-t-elle expliqué à l'AFP.

"C'est peut-être pour cela qu'il y a des règlements de comptes, parce qu'il y a des passeurs de différentes nationalités", a-t-elle avancé.

"On assiste à une atomisation des filières, comme dans les affaires de stups", a affirmé mercredi le procureur général de Douai, Frédéric Fèvre. "Ca se voit dans l'augmentation des règlements de compte sur le littoral car il y a une volonté d'appropriation du territoire et des clients", c'est-à-dire les candidats à l'exil, a-t-il ajouté.

M. Fèvre participait mercredi à une réunion avec les parquets de dix juridictions du nord de la France et des magistrats de liaison français installés en Belgique, au Luxembourg, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, sur la coopération internationale en matière de migrations mais aussi de stupéfiants ou de criminalité financière.

Plus de 7.000 exilés ont déjà rejoint les côtes britanniques au départ du littoral nord de la France depuis janvier. Le nombre de traversées a triplé en 2021, avec plus de 28.000 migrants arrivés en Angleterre. La préfecture maritime dresse un bilan de 31 morts et 4 disparus l'an passé.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.