Comment les Kurdes ont permis aux Américains de tuer le chef de Daech

mis à jour le Jeudi 31 octobre 2019 à 16h40

Le Canard enchaîné | mercredi 30 octobre 2019

Trump doit son succès aux Kurdes

UNE IRONIE tragique de l’Histoire. Les Kurdes, méchamment trahis par Donald Trump, avaient fourni les renseignements qui ont permis aux forces spéciales américaines de bien préparer leur opération et de régler son compte à Al- Baghdadi. Cette surprenante révélation et plusieurs précisions sur le raid US ont été transmises à l’Elysée, via l’état-major des armées, par la Direction du renseignement militaire.

Résumé de ces informations : ce sont les Kurdes des Forces démocratiques syriennes qui ont localisé le repaire du calife de l’Etat islamique à Barisha, dans la province d’Idlib (nord-est de la Syrie), non loin de la frontière turque. Voilà quelques mois, un ancien activiste de Daech, après avoir rompu avec ses anciens compagnons et leur chef, avait rencontré des responsables kurdes et décrit la cache où vivaient Al-Baghdadi, sa famille et ses gardes du corps. L’opération a été concoctée pendant cinq mois, mais Trump n’en a pas moins décidé, il y a deux semaines, de retirer de Syrie la plupart des militaires US et d’abandonner les Kurdes à la vindicte turque.

Toujours selon le rapport transmis à l’Elysée, la surveillance permanente du refuge d’Al-Baghdadi a été facilitée par la « sonorisation » de plusieurs pièces, afin de découvrir le nombre d’occupants du lieu, leurs habitudes et leurs allées et venues (remarque du « Canard », au passage : la pose de micros est parfois tout à fait justifiée...). Puis la décision a été prise d’intervenir.

Une centaine de militaires de la Force Delta, l’une des unités relevant du haut commandement des forces spéciales américaines, ont engagé l’assaut, transportés sur place par huit hélicoptères lourds CH-47 Chinooh. Des agents de la CIA ont aussi participé au raid.

Des documents ont été trouvés sur place, et des avions américains ont détruit le dernier repaire du chef terroriste afin qu’il ne puisse devenir un lieu de pèlerinage. D’autant que, selon les agents français, il y aurait entre 25 000 et 30 000 hommes et femmes plus ou moins proches de Daech dans cette région.

Une récompense de 25 millions de dollars avait été promise pour la capture d’Al-Baghdadi, mais les informations du Renseignement militaire n’indiquent aucun nom de bénéficiaire. Pourquoi pas les Kurdes ?

C.A.