Bush reçoit Erdogan sur fond de relations toujours crispées

WASHINGTON, 7 juin 2005 (AFP) - 9h48 - La question kurde va largement figurer au menu des entretiens mercredi entre le président américain George W. Bush et le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, sur fond de relations toujours crispées entre les deux pays à la suite du refus d'Ankara de s'associer à la guerre en Irak.Depuis plus de deux ans, les relations entre les Etats-Unis et la Turquie ont été marquées par une succession d'erreurs. On ne peut revenir dessus et la relation prendra des années pour se rétablir, estime Michael Rubin, chercheur auprès de l'American Enterprise Institute à Washington.

M. Erdogan va notamment demander au président américain d'agir plus concrètement contre les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistanqui effectuent des opérations contre le territoire turc à partir du Kurdistan irakien.

"Les autorités militaires américaines en Irak craignent de déclencher des actions terroristes contre leurs forces et n'apprécient pas pleinement les dégâts causés par les terroristes du PKK (séparatistes kurdes de Turquie, ndlr) depuis qu'ils ont rompu le cessez-le feu le 1er juin 2004", a estimé Michael Rubin dans un récent article.

Le chef de l'état-major de l'armée turque, le général Hilmi Ozkok, s'était plaint fin avril de l'inaction des Américains face au PKK et avait mis en garde contre toute tentative de prise de contrôle du centre pétrolier de Kirkouk par les Kurdes irakiens.

Ankara craint que les Kurdes d'Irak, virtuellement indépendants depuis la chute de Saddam Hussein, ne fassent de Kirkouk la capitale d'un Etat kurde souverain, attisant les sentiments séparatistes des Kurdes de Turquie et chassant les Turcomans qui vivent dans cette ville.

Mais Washington est d'autant moins enclin à agir que le souvenir est encore frais du refus d'Ankara de laisser passer les troupes américaines par son territoire au moment de l'invasion de l'Irak en mars 2003.

Au cours de sa visite en Turquie il y a un an pour assister au sommet de l'Otan, George W. Bush avait tenté de réparer les dégâts en citant la Turquie en exemple pour le monde musulman et en réaffirmant son soutien au processus d'adhésion de ce pays à l'Union européenne.

Ankara a, de son côté, autorisé en avril dernier les Etats-Unis à utiliser la base aérienne d'Incirlik (sud) à des fins logistiques pour leurs soldats déployés en Irak et en Afghanistan.

En annonçant fin mai la visite de M. Erdogan à Washington, la Maison Blanche avait souligné que la réunion fournirait "une occasion de relancer la coopération entre les Etats-Unis et la Turquie dans le cadre des aspirations turques à rejoindre l'Union européenne et de renforcer notre travail commun pour faire progresser la cause de la liberté en Irak, dans le Grand Moyen Orient, l'Asie centrale et le Caucase".

Les Etats-Unis et la Turquie ont des intérêts communs dans le secteur de l'énergie, illustrés avec la mise en service il y a deux semaines de l'oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan (BTC). Celui-ci crée une nouvelle route pour transporter le pétrole de la mer Caspienne vers les marchés occidentaux en évitant de passer par la Russie et en allégeant le trafic des pétroliers par les détroits turcs.

Les déboires rencontrés par le processus de ratification de la Constitution européenne vont toutefois probablement retarder les négociations sur l'adhésion turque à l'UE.

L'éventualité d'un règlement de la question de Chypre semble également assez lointaine après le rejet massif en avril 2004 par les Chypriotes-grecs d'un plan de paix de l'ONu soumis à un référendum dans les deux parties, grecque et turque, de l'île. La communauté turque de Chypre avait en revanche approuvé ce plan.

A cet égard, M. Erdogan se rendra après sa visite à Washington aux Nations unies à New York pour s'y entretenir avec le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan de la question de Chypre.