Adhésions à l'Union européenne: la Turquie critiquée, la Croatie proche du but

mis à jour le Jeudi 15 octobre 2009 à 11h02

De Yann OLLIVIER (AFP)

BRUXELLES — La Commission européenne a épinglé mercredi des atteintes aux libertés fondamentales en Turquie, réclamant de nouvelles réformes pour faire avancer ses négociations d'adhésion à l'UE, aujourd'hui au point mort, alors que la Croatie elle "se rapproche de la ligne d'arrivée".

Les négociations avec la Turquie ont désormais atteint "un stade plus exigeant qui nécessite un nouvel élan de réformes", souligne un rapport annuel de l'exécutif européen. Il déplore une série d'atteintes aux droits fondamentaux.

Bruxelles s'en prend notamment à la liberté de la presse, en épinglant les colossales amendes infligées cette année au groupe de presse privé Dogan Yayin Holding (DYH) pour des arriérés d'impôts.

"Si une amende équivaut au chiffre d'affaires annuel d'une entreprise, cela pourrait ne pas être uniquement une sanction fiscale, cela ressemble aussi à une sanction politique", a souligné le commissaire à l'Elargissement, Olli Rehn.

L'égalité entre les sexes reste "un défi majeur" en Turquie, poursuit le rapport qui cite pêle-mêle les crimes d'honneur, la violence conjugale, ou l'absence de progrès sur l'interdiction du travail des enfants.

Bruxelles exhorte aussi Ankara à ouvrir ses ports et aéroports aux Chypriotes grecs, mais sans recommander de nouvelles sanctions.

Fin 2006, l'UE avait de ce fait décidé de geler une partie des pourparlers d'adhésion. Mais à présent, les Européens ne veulent pas jeter d'huile sur le feu dans les délicats pourparlers turco-chypriotes en vue d'une réunification de Chypre, divisée depuis 1974.

La récente normalisation des relations entre la Turquie et l'Arménie, l'accord sur le gazoduc Nabucco qui reliera les champs d'Asie à l'Europe en contournant la Russie, et le lancement d'un "large débat public" sur la question kurde figurent en revanche parmi les avancées relevées par Bruxelles.

A Ankara, le ministre turc en charge des relations avec l'UE, Egemen Bagis, a salué "un des rapports les plus objectifs, les plus engagés dans le soutien aux réformes et les plus encourageants pour le gouvernement jamais publiés".

Il reste que les perspectives d'adhésion du pays apparaissent bien sombres aujourd'hui. Plusieurs pays, comme la France ou l'Allemagne, s'y opposent ouvertement.

A l'inverse, les négociations avec la Croatie, entamées en octobre 2005 comme pour la Turquie, sont "proches de la ligne d'arrivée", a souligné mercredi M. Rehn. Elle pourraient être bouclées à l'été 2010, avant une adhésion l'année suivante.

Zagreb devra néanmoins "poursuivre et intensifier" ses efforts de réforme au plan judiciaire, de la lutte contre la corruption et le crime organisé.

Toujours dans les Balkans, la Commission a recommandé d'ouvrir les négociations d'adhésion avec la Macédoine, une annonce saluée comme "historique" par Skopje, où des milliers de citoyens enthousiastes ont convergé dans un concert de klaxons vers le siège du gouvernement.

Skopje avait obtenu le statut de candidat à l'UE en décembre 2005, mais son rapprochement reste hypothéqué par la Grèce, qui empêche depuis 1991 la reconnaissance internationale de la Macédoine sous ce nom, considérant qu'il appartient exclusivement à son patrimoine historique national.

La Commission a aussi réaffirmé la vocation de l'Albanie, du Monténégro, de la Serbie, de la Bosnie-Herzégovine et du Kosovo à rejoindre un jour l'UE. Tout en prévenant qu'ils avaient encore du pain sur la planche.

Tous ces pays devraient, quoi qu'il arrive, se faire doubler par le dernier pays intéressé en date: l'Islande, qui a manifesté son intérêt pour l'UE en juillet dernier, et qui en tant que membre de l'Espace économique européen juge "faisable" de boucler des négociations d'adhésion en un an.