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POINT SUR LA SITUATION EN TURQUIE

CILDEKT
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Liste
NO: 280

13/2/2004

  1. LA FRANCE INTERDIT À SON TOUR LA CHAINE SATELITTAIRE KURDE MEDYA-TV
  2. LEYLA ZANA ET SES COLLEGUES ADRESSENT LEURS CONDOLÉANCES AU PEUPLE KURDE POUR LES ATTENTATS COMIS À ERBIL
  3. BERHAM SALIH EN VISITE À ANKARA ALORS QUE L’ÉGYPTE ET LA TURQUIE ADRESSENT UNE MISE EN GARDE AUX KURDES D’IRAK
  4. GEORGE W. BUSH REÇOIT RECEP TAYIP ERDOGAN À WASHINGTON ET SE DÉCLARE POUR UN IRAK « PACIFIQUE, DÉMOCRATIQUE ET TERRITORIALEMENT INTACT »
  5. LA SECRÉTAIRE GÉNÉRALE D’AMNESTY INTERNATIONAL EN VISITE EN TURQUIE DEMANDE L’APPLICATION DES RÉFORMES ET LA LIBÉRATION DES DÉPUTÉS KURDES
  6. LE FINANCEMENT DU FUTUR OLÉODUC BAKOU-TBILLISI-CEYHAN EST BOUCLÉ
  7. UN PROJET DE LOI TURC PRÉVOIT DES COMPENSATIONS POUR LES VILLAGEOIS KURDES AFIN DE LES DISSUADER D’ALLER DEVANT LA COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME


LA FRANCE INTERDIT À SON TOUR LA CHAINE SATELITTAIRE KURDE MEDYA-TV


Le Conseil supérieur de l’Audiovisuel français (CSA) a, le 12 février décidé d’abroger la licence de diffusion de la télévision kurde satelittaire, Medya-tv, mettant fin aux programmes de la chaîne accusée d’être le successeur de MED-TV, interdit le 22 mars 1999 par la Grande-Bretagne pour “ apologie de la violence et propagande du PKK ”.

Medya-tv, qui avait commencé sa diffusion le 30 juillet 1999, avait saisi le CSA afin d’obtenir une licence d’émission mais l’institution de régulation de la télévision en France avait refusé de la lui octroyer. Le Conseil d’Etat, saisi par les avocats de la chaîne, a rendu sa décision le 12 février en confirmant la position du CSA et en demandant à la société ABSAT de mettre immédiatement fin à toute émission de la chaîne.

Les responsables de la chaîne diffusée dans 77 pays ont critiqué cette décision en soulignant que l’arrêt d’émission de Medya-tv sera utilisé par Jacques Chirac attendu dans quelques mois à Ankara pour négocier de futurs contrats avec les autorités turques.

LEYLA ZANA ET SES COLLEGUES ADRESSENT LEURS CONDOLÉANCES AU PEUPLE KURDE POUR LES ATTENTATS COMIS À ERBIL


Les députés kurdes de l’ancien parti de la Démocratie (DEP-dissous), emprisonnés en Turquie depuis 10 ans, Leyla Zana, Orhan Dogan, Hatip Dicle et Selim Sadak, ont, le 11 février, adressé un message de condoléances à Massoud Barzani et Jalal Talabani, respectivement président du parti démocratique du Kurdistan (PDK) et secrétaire général de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK) pour les attentats commis le 1er février à Erbil contre les représentations kurdes faisant 109 victimes.

“ Nous présentons nos condoléances pour nos frères tués et un bon rétablissement pour nos frères blessés lors de l’attaque. Nous présentons nos condoléances à notre peuple et condamnons avec aversion cette attaque félonne. Nous partageons votre peine et celui de votre peuple dans notre cœur. Notre peine est collective ” écrivent les anciens députés dans une lettre écrite en kurde.

“ Nul ne devrait ignorer qu’aucune force, aucune attaque et aucune provocation ne pourra faire reculer notre peuple de son but. Nous pensons et espérons que les sentiments d’union et de solidarité de notre peuple dispersé aux quatre coins du monde seront renforcés plus encore. Notre peuple surmontera les obstacles susceptibles d’entraver le chemin de la paix par l’union, la solidarité réciproque et le soutien et rejoindra le monde démocratique… Nous partageons votre peine avec les sentiments de solidarité chaleureuse et présentons une nouvelle fois nos condoléances. Avec nos sentiments, nos respects et toute notre amitié… ” concluent les députés emprisonnés.

Le message des députés a été lu dans son intégralité dans les journaux télévision des deux chaînes de télévision satelittaire kurdes, Kurdistan TV et Kurdsat émettant à partir du Kurdistan irakien et très regardées par les kurdes du Proche-Orient et d’Europe.

La prochaine audience du procès de Leyla Zana et de ses collègues est fixée au 20 février prochain. La justice turque avait rejeté le 16 janvier-- pour la 10ème fois -- une demande de remise en liberté des ex-députés kurdes. Romano Prodi, alors en visite en Turquie avait lui-même souligné dans un discours devant le Parlement turc, que l'UE suivait avec attention ce nouveau procès. Interrogé sur la décision de la cour refusant leur libération, le président de la Commission européenne qui participait à une conférence de presse à Istanbul aux côtés du ministre turc des Affaires étrangères Abdullah Gul, a déclaré : “ Je suis très, très désolé ”. Les quatre ex-députés doivent en principe sortir de prison en juin 2005, par le jeu des réductions de peine prévues par la loi turque. Ils sont aujourd’hui les seuls prisonniers politiques de la prison centrale d’Ulucanlar. Tous les prisonniers politiques ont été transférés au cours des derniers mois dans des prisons de haute sécurité de type-F, contestées par les détenus et leurs familles au cours d’une grève de la faim faisant plus d’une centaine de victimes.

BERHAM SALIH EN VISITE À ANKARA ALORS QUE L’ÉGYPTE ET LA TURQUIE ADRESSENT UNE MISE EN GARDE AUX KURDES D’IRAK


Berham Salih, Premier ministre du gouvernement régional de Suleimanieh, est arrivé le 9 février à Ankara pour des consultations avec les autorités turques. Au cours de l’entretien avec Osman Koruturk, le coordinateur spécial turc pour l’Irak, B. Saleh a indiqué qu’une région kurde autonome ne tolérera pas la présence du PKK opérant sur son sol. “ Nous sommes prêts à travailler pour déplacer toutes sortes d’éléments constituant une menace à nos voisins ” a-t-il déclaré.

Il y a quelques semaines, Nechirvan Barzani, Premier ministre du gouvernement régional d’Erbil, avait appelé au retrait des troupes turques stationnées au Kurdistan irakien. Interrogé sur la question, M. Saleh a déclaré qu’il n’est pas question d’utiliser la force pour expulser les troupes turques et que “ des entretiens amicaux peuvent être conduits avec les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la Turquie et une solution peut être trouvée ”.

Berhem Salih a également demandé l’hospitalisation de huit autres blessés victimes des attentats commis simultanément le 1er février contre les bureaux du parti démocratique du Kurdistan (PDK) et de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK) à Erbil faisant plus d’une centaine de victimes. La semaine dernière, sept premières victimes avaient été transportées à l’hôpital d’Ankara pour recevoir des soins.

Par ailleurs, Abdullah Gul, ministre turc des affaires étrangères, a déclaré, le 9 avril, à Varsovie au cours d’un entretien avec son homologue polonais que la Turquie participera à la mission de stabilisation de l’OTAN en Irak. L’OTAN se réunira en juin prochain à Istanbul pour décider des modalités de participation à la stabilisation en Irak.

D’autre part, lors d'une visite à Ankara du président égyptien Hosni Moubarak, la Turquie et l'Egypte ont adressé, le 11 février, une mise en garde conjointe contre toute atteinte à l'unité territoriale de l'Irak, soulignant ainsi leurs craintes qu'une autonomie accrue ne soit accordée aux Kurdes irakiens. “ Nous sommes d'avis que la préservation de l'intégrité territoriale de l'Irak est une nécessité et que des tentatives qui peuvent aboutir à une dislocation de l'Irak sont dangereuses ”, a déclaré le chef de l'Etat égyptien qui s'adressait à la presse à l'issue de ses entretiens avec son homologue turc Ahmet Necdet Sezer.

Des représentants des pays voisins --Syrie, Jordanie, Iran, Turquie, Egypte - doivent se sont retrouvés les 14 et 15 février au Koweït pour des entretiens sur l'Irak. La dernière visite de M. Moubarak à Ankara remontait à 1998, lorsqu'il était venu assurer une médiation entre la Turquie et la Syrie alors au bord de la guerre en raison du soutien de Damas au parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan qui a reçu M. Mubarak dans la soirée, avait affirmé en février dernier que son pays était prêt à jouer un rôle de médiateur entre la Syrie et l'Etat hébreu. La Turquie souhaite depuis des années accueillir une conférence internationale pour contribuer à une solution au conflit Proche-oriental.

GEORGE W. BUSH REÇOIT RECEP TAYIP ERDOGAN À WASHINGTON ET SE DÉCLARE POUR UN IRAK « PACIFIQUE, DÉMOCRATIQUE ET TERRITORIALEMENT INTACT »


Le président George W. Bush a, le 28 janvier, donné des assurances au Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan sur la volonté des Etats Unis de maintenir l'unité territoriale de l'Irak. “ Je lui ai assuré que les ambitions des Etats-Unis étaient celles d'un Irak pacifique, démocratique et territorialement intact ”, a déclaré M. Bush à l'issue de leur rencontre à la Maison-Blanche. Le président américain a qualifié son interlocuteur “ d'homme direct ” avec lequel il partage la compréhension de ce qu'est la menace terroriste et ce dernier s'est félicité de la décision américaine de maintenir sur la liste des organisations terroristes celles qui sont issues du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK, séparatistes kurdes de Turquie), telles le KONGRA-GEL.

Dans une note publiée par le Journal Officiel (Federal Register) le 13 janvier, le département d'Etat avait estimé que le Congrès du peuple du Kurdistan (KONGRA-GEL) était un nouvel avatar du PKK et, qu'en conséquence, il devait être placé sur cette liste. Lors d'une conférence de presse à l'issue de la rencontre, M. Erdogan a indiqué à la presse turque que les autorités américaines avaient réaffirmé leur engagement de sévir contre le PKK, retranché dans le Kurdistan irakien. “ Ils nous ont dit qu'ils ne leur donneraient aucun répit ”, a-t-il notamment indiqué.

Le président américain a cherché à rassurer la Turquie, affirmant que Washington n'est pas favorable à l'expansion de l'autonomie des Kurdes irakiens. Reste que pour Washington, toute décision concernant le Kurdistan irakien devra être prise par les Irakiens eux-mêmes, lorsqu'ils auront regagné leur pleine souveraineté.

Tous deux ont également abordé la question de Chypre, divisée depuis 30 ans entre la partie grecque et la partie turque. Ankara a demandé de nouvelles négociations sur la base du plan proposé par le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan. La république de Chypre (partie grecque) doit entrer dans l'Union européenne au 1er mai. Si Chypre n'est pas réunifiée d'ici là, les chances de la candidature de la Turquie à l'UE risquent en effet d'en être encore compliquées.

LA SECRÉTAIRE GÉNÉRALE D’AMNESTY INTERNATIONAL EN VISITE EN TURQUIE DEMANDE L’APPLICATION DES RÉFORMES ET LA LIBÉRATION DES DÉPUTÉS KURDES


Une délégation d'Amnesty International conduite par sa secrétaire générale, Irène Khan, s’est rendue en Turquie le 8 février, à Istanbul et à Ankara, où elle a eu des entretiens avec des représentants de la société civile et des membres du gouvernement. Elle a notamment rencontré le Premier ministre, M. Erdogan, le vice-Premier ministre, M. Gül, le ministre de l'Intérieur, Abdulkadir Aksu, des membres du Conseil d'État, les présidents des Cour constitutionnelle et Cour d'appel, de la Commission parlementaire des droits humains et de la Commission parlementaire d'harmonisation avec l'Union européenne. Avant de regagner Londres, les membres de la délégation se sont rendus le 13 février à Diyarbakir, pour y rencontrer des groupes de femmes et de défense des droits humains, avec qui ils discuteront des problèmes propres à la région.

Lors de son entretien avec le Premier ministre turc, Irène Khan lui a remis une note, dans laquelle Amnesty International reconnaissait les progrès accomplis, tout en soulignant les préoccupations qu'elle continuait de nourrir concernant le respect des droits humains en Turquie. L'organisation dénonçait notamment dans cette note les cas de torture et de mauvais traitements dont étaient encore accusés des responsables de l'application des lois, ainsi que l'impunité dont jouissaient ces derniers (d'où la nécessité de régler le problème de l'héritage des violations commises par le passé), les restrictions qui pesaient toujours sur la liberté d'expression et la criminalisation de l'expression non violente d'opinions dissidentes, et la violence contre les femmes.

Irène Khan a également demandé à Recep Tayyip Erdogan la libération de toutes les personnes emprisonnées pour avoir exprimé leurs opinions de manière non violente, et parmi elles le défenseur des droits humains Leyla Zana et ses collègues. Le Premier ministre n’a pas hésité une nouvelle fois à comparer son incarcération de 3 mois de prison à la situation de Leyla Zana, en reprochant à Amnesty et à l’Europe “ un double standard ”. Il a reproché à ces derniers de ne pas lui avoir rendu visite lors de son emprisonnement alors que lors de l’incarcération du maire de Diyarbakir, Feridun Çelik, quatre ministres des affaires étrangères se sont déplacés d’Europe. Il a critiqué les organisations de défense des droits de l’homme d’habiller “ d’une chemise d’idéologie ” les droits de l'homme.

Par ailleurs, Amnesty International a publié le 12 février, un document relatif à la “ législation répressive, application arbitraire : les défenseurs des droits humains face aux pressions. Selon ce texte, “ en dépit des réformes juridiques et constitutionnelles récemment intervenues en Turquie, les défenseurs des droits humains restent dans ce pays la cible d'actes de harcèlement et d'intimidation de la part des agents de l'État et ils continuent de se heurter à une foule de lois et de textes réglementaires qui limitent leur action (…) ”. “ À mesure que les anciennes lois sont abolies, les pouvoirs publics trouvent de nouveaux stratagèmes pour faire obstruction aux activités des défenseurs des droits humains", a déclaré Amnesty International.

Amnesty International réitère ses appels en faveur d'une réforme de fond de la législation et des pratiques en Turquie, dans le souci de garantir la liberté d'expression, d'association et de rassemblement dans ce pays.

LE FINANCEMENT DU FUTUR OLÉODUC BAKOU-TBILLISI-CEYHAN EST BOUCLÉ


Le financement du futur oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan (BTC), qui doit acheminer le pétrole de la Caspienne vers les marchés mondiaux via la Turquie, a été bouclé, le 3 février, avec la signature d'un accord définitif de prêt par les bailleurs internationaux avec les autorités azerbaïdjanaises. Les bailleurs, qui rassemblent des institutions internationales comme la Banque européenne de reconstruction et de développement (Berd), des agences de financement publiques, des grandes banques commerciales, contribuent à hauteur de 70 % au coût de construction du projet, fixé à 2,95 milliards de dollars. Les 30 % restants ont déjà été avancés par les membres du consortium propriétaire du BTC.

Le BTC, dont la construction a commencé l'an dernier et qui doit entrer en fonction en 2005, est conçu pour pouvoir transporter jusqu'à un million de barils de brut depuis l'Azerbaïdjan jusqu'au port turc de Ceyhan, en passant par la Géorgie. Long de 1.760 kilomètres, le trajet de l'oléoduc a été conçu pour éviter un passage aussi bien par la Russie que par l'Iran, et le projet a été vivement soutenu par les autorités américaines.

Le consortium possédant la conduite est mené par le groupe pétrolier britannique BP, et rassemble notamment les sociétés pétrolières azerbaïdjanaise Socar, française Total, norvégienne Statoil, italienne Eni, japonaise Itochu et américaines Unocal, ConocoPhillips et Amerada Hess. Le financement du projet par les bailleurs internationaux avait pris du retard à cause de préoccupations sur les conséquences écologiques du projet, notamment en raison de son passage en Géorgie par la vallée de Borjomi, qui abrite une source d'eau minérale réputée.

UN PROJET DE LOI TURC PRÉVOIT DES COMPENSATIONS POUR LES VILLAGEOIS KURDES AFIN DE LES DISSUADER D’ALLER DEVANT LA COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME


Le ministère turc de la Justice a publié, le 19 janvier, un projet de loi prévoyant l'octroi de compensations pour les victimes d'affrontements sanglants entre le PKK et l'armée turque dans le pays. Le projet s’inscrit dans le cadre des efforts du gouvernement pour améliorer son bilan en matière de respect des droits de l'Homme afin de rejoindre l'Union européenne. Publié sur le site Internet du ministère, le projet de loi stipule que des compensations pourront être payées à ceux qui ont souffert des dommages et dégâts “ pour les actions des organisations terroristes et les mesures prises par l'Etat pour les combattre ”.

Plus de trois mille villages kurdes ont été évacués et détruits par l’armée turque de1992 à 1999. Les villageois chassés ont émigré vers des villes kurdes ou les métropoles industrielles turques où ils vivent dans la misère et la précarité.

Les requérants pourront réclamer des compensations pour des blessures ou pertes de vie humaine, ainsi que pour des dégâts matériels ou perte de bétail, selon le projet.

Ce projet vise à épargner à la Turquie les nombreuses condamnations de la Cour européenne des droits de l'Homme