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Turquie: l'UE et les Etats-Unis pressent Ankara de faire preuve de retenue


Mardi 4 août 2015 à 18h37

Istanbul, 4 août 2015 (AFP) — L'Union européenne et les Etats-Unis ont appelé mardi la Turquie à s'en tenir à une "réponse appropriée" dans ses attaques aériennes contre la rébellion kurde du PKK, s'inquiétant de l'ampleur des raids aériens turcs qui entretiennent le cycle de représailles et pourraient tuer des civils.

Au moins trois autres soldats turcs ont été tués mardi dans deux nouveaux attentats attribués au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans l'est du pays. L'un a visé un convoi militaire, qui a sauté sur une mine, et l'autre une garnison militaire attaquée au lance-roquettes.

Selon un décompte de l'AFP, au moins 20 membres des forces de l'ordre ont été tués depuis la fin de la trêve il y a quinze jours entre la guérilla et le pouvoir central.

Ankara poursuit pour sa part les raids aériens contre la rébellion en touchant mardi une de ses positions sur le territoire turc, près la frontière irakienne, ont indiqué les médias.

L'armée affirme avoir tué plus de 260 combattants dans ses bombardements quotidiens. Selon des sources kurdes, dix civils irakiens ont aussi été tués dans des raids ce weekend, mais l'armée affirme n'avoir visé aucune zone habitée.

Dans un communiqué publié à Bruxelles, le commissaire européen à l'Elargissement, Johannes Hahn, s'est dit "très préoccupé" par l'escalade de la violence.

"L'UE reconnaît que la Turquie a le droit de prévenir et de réagir à toute forme de terrorisme, qui doit être condamné sans ambiguïté", a affirmé M. Hahn. Avant d'ajouter : "la réponse doit toutefois être proportionnée, ciblée et elle ne doit en aucun cas mettre en danger le dialogue politique démocratique dans le pays".

De Washington, le porte-parole du département d'Etat, Mark Toner, a envoyé le même message. "Nous voulons que le PKK renonce à la violence et reprenne les discussions avant le gouvernement turc (...) et nous voulons voir le gouvernement turc répondre de manière proportionnée" aux attaques, a-t-il dit.

Un attentat survenu le 20 juillet à Suruç (sud), qui a fait 32 morts parmi de jeunes militants kurdes, a déclenché un cycle de représailles entre la guérilla et l'armée turque, celle-ci étant accusée de ne pas avoir protégé la population locale contre l'attaque du groupe Etat islamique (EI).

- Drones armés -

La guérilla a rompu un cessez-le-feu unilatéral datant de 2013 et le président turc Recep Tayyip Erdogan a mis un terme de facto au processus de paix.

Les opérations de sabotage contre des objectifs économiques se multiplient en Turquie parallèlement aux attaques contre les forces de l'ordre. Mardi, une explosion a endommagé un gazoduc entre l'Azerbaïdjan et l'est de la Turquie et l'acheminement de gaz a dû être suspendu.

La Turquie a lancé le 24 juillet une "guerre contre le terrorisme" visant simultanément le PKK et les combattants de l'EI dans le nord de la Syrie. Mais jusqu'à présent les raids ont visé en très grande majorité la rébellion kurde.

De leur côté, les Américains comptent profiter du feu vert que vient de leur donner Ankara sur l'utilisation de la base aérienne d'Incirlik (sud) afin de mener des frappes contre le groupe EI.

Le ministère américain de la Défense a affirmé lundi soir que des drones armés de l'US Air Force avaient décollé d'Incirlik pour conduire des missions en Syrie.

"Ce n'est qu'un début...", a twitté Brett McGurk, bras droit du général américain John Allen, l'envoyé spécial des Etats-Unis dans la région en charge de la lutte contre l'EI.

Sur le plan politique, la situation semble toujours bloquée en Turquie, qui attend la formation d'un gouvernement de coalition depuis les élections du 7 juin ayant privé le parti islamo-conservateur AKP de la majorité absolue au Parlement.

Des discussions entre l'AKP et le parti social-démocrate CHP se poursuivent sans avancée majeure, et les médias parient sur la convocation de législatives anticipées par le président turc.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.