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Turquie: l'UE et les Etats-Unis pressent Ankara de faire preuve de retenue


Mardi 4 août 2015 à 15h03

Istanbul, 4 août 2015 (AFP) — L'Union européenne et les Etats-Unis ont appelé mardi la Turquie à s'en tenir à une "réponse appropriée" dans ses attaques aériennes contre la rébellion kurde du PKK, pointant leur inquiétude sur l'ampleur des raids aériens turcs qui entretiennent le cycle de représailles et pourraient tuer des civils.

Au moins deux autres soldats turcs ont trouvé la mort mardi matin dans une nouvelle attaque contre un convoi militaire attribuée au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), alors qu'Ankara poursuit ses bombardements massifs contre les bases de la guérilla du nord de l'Irak.

La Turquie a lancé le 24 juillet une "guerre contre le terrorisme" visant simultanément le PKK et les combattants du groupe Etat islamique (EI) dans le nord de la Syrie. Mais jusqu'à présent les raids ont visé en très grande majorité la rébellion kurde, ces violences mettant un terme à près de trois années d'accalmie et à un fragile processus de paix.

L'armée d'Ankara affirme avoir tué plus de 260 combattants dans ses bombardements. Selon des sources kurdes, dix civils irakiens ont aussi été tués dans des raids ce weekend, mais l'armée affirme n'avoir visé aucune zone habitée.

Selon un décompte de l'AFP, au moins 19 membres des forces de l'ordre ont été tués par des attaques du PKK depuis la fin de la trêve.

Dans un communiqué publié à Bruxelles, le commissaire européen à l'Elargissement, Johannes Hahn, s'est dit "très préoccupé" par l'escalade de la violence.

"L'UE reconnaît que la Turquie a le droit de prévenir et de réagir à toute forme de terrorisme, qui doit être condamné sans ambiguïté", a affirmé M. Hahn dans un communiqué publié après un entretien avec le ministre turc aux Affaires européennes Volkan Bozkir.

Avant d'ajouter : "la réponse doit toutefois être proportionnée, ciblée et elle ne doit en aucun cas mettre en danger le dialogue politique démocratique dans le pays".

De Washington, le porte-parole du département d'Etat, Mark Toner, a envoyé le même message. "Nous voulons que le PKK renonce à la violence et reprenne les discussions avant le gouvernement turc (...) et nous voulons voir le gouvernement turc répondre de manière proportionnée" aux attaques, a-t-il dit à des journalistes.

- Drones armés -

Un attentat survenu le 20 juillet à Suruç (sud), qui a fait 32 morts parmi de jeunes militants kurdes, a déclenché un cycle de représailles entre la guérilla et l'armée turque, celle-ci étant accusée de ne pas avoir protégé la population locale.

La guérilla a rompu un cessez-le-feu unilatéral datant de 2013 et le président turc Recep Tayyip Erdogan a mis un terme de facto au processus de paix.

Les opérations de sabotage contre des objectifs économiques se multiplient en Turquie parallèlement aux attaques de la guérilla contre les forces de l'ordre. Mardi, une explosion a endommagé un gazoduc entre l'Azerbaïdjan et l'est de la Turquie et l'acheminement de gaz a dû être suspendu.

De leur côté, les Américains comptent profiter du feu vert que vient de leur donner Ankara sur l'utilisation de leur base aérienne d'Incirlik (sud) afin de mener des frappes contre le groupe EI en Syrie.

Le ministère américain de la Défense a affirmé lundi soir que des drones armés de l'US Air Force avaient décollé d'Incirlik pour conduire des missions en Syrie.

"Ce n'est qu'un début...", a twitté Brett McGurk, bras droit du général américain John Allen, l'envoyé spécial des Etats-Unis dans la région en charge de la lutte contre l'EI.

Selon les médias turcs, des dizaines de pilotes américains sont attendus dans les prochains jours à Incirlik pour conduire des missions en Syrie.

Sur le plan politique, la situation semble toujours bloquée en Turquie, qui attend la formation d'un gouvernement de coalition depuis les élections du 7 juin ayant privé le parti islamo-conservateur AKP de la majorité absolue au Parlement.

Des discussions entre l'AKP et le parti social-démocrate CHP se poursuivent sans avancée majeure, et les médias parient sur la convocation de législatives anticipées par le président turc.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.