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Turquie: échauffourées lors d'un hommage aux victimes de l'attentat d'Ankara


Lundi 10 octobre 2016 à 17h30

Ankara, 10 oct 2016 (AFP) — La police turque a dispersé à coups de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc lundi des manifestants pro-kurdes venus rendre hommage aux 103 morts de l'attentat de la gare d'Ankara survenu il y un an, selon des journalistes de l'AFP sur place.

Le 10 octobre 2015, alors qu'une manifestation de sympathisants de la cause kurde allait se mettre en branle pour demander l'arrêt de la guerre dans le sud-est de la Turquie, deux kamikazes avaient actionné leurs charges explosives tuant 103 personnes et en blessant 500 autres.

Cet attentat, le pire qu'a connu la Turquie dans son histoire moderne, a été attribué par les autorités au groupe Etat islamique (EI).

Lundi matin, environ 150 manifestants se sont rassemblés aux abords de la gare d'Ankara, encerclée par les forces de l'ordre équipées de camions munis de canons à eau, a constaté l'AFP.

Les manifestants, tenus à distance de la place, criaient "Etat assassin" tout en jetant des projectiles en direction des forces de l'ordre, qui ont riposté en faisant usage de gaz lacrymogène et balles en caoutchouc.

Des centaines de personnes agitant des drapeaux ont également été empêchées par la police antiémeutes de participer au rassemblement, auquel ont pris part les deux codirigeants du Parti démocratique du peuple (HDP, prokurde), Selahattin Demirtas et Figen Yuksekdag, et des membres du Parti social-démocrate (CHP, opposition).

Au moins 60 personnes ont été arrêtées au cours de ce rassemblement, où étaient déployés 1.700 policiers anti-émeute, a indiqué l'agence de presse progouvernementale Anadolu.

Sur place, le gouverneur d'Ankara Erkan Topaca a précisé qu'"en raison des risques de sécurité" seul un "bref hommage" pouvait être rendu, selon des propos rapportés par l'agence Anadolu. Trois jours plus tôt, la police turque avait interdit tout rassemblement ou manifestation aux abords de la gare.

Selon certains manifestants, des proches de victimes avaient été autorisés plus tôt dans la matinée à rendre hommage aux défunts sur les lieux de l'attaque.

A 10H04 (07H04 GMT), heure précise à laquelle était survenu l'attentat, la foule s'est mise à applaudir dans un ultime hommage.

"Nous avons perdu nos amis et je suis en colère", a déclaré auprès de l'AFP un manifestant, Haldun Aciksozlu, dont l'un de ses amis est mort dans l'attentat.

Depuis la tentative de coup d'Etat survenue le 15 juillet, "des dizaines de milliers de personnes sont arrêtées" pour des liens présumés avec l'ex-prédicateur Fethullah Gülen, accusé d'avoir fomenté le putsch avorté, mais "aucune arrestation n'a jamais eu lieu" après l'attentat d'Ankara, a regretté Haldun Aciksozlu.

L'an passé, les policiers "ne sont pas intervenus pour arrêter ce massacre" et aujourd'hui c'est "sur nous qu'ils tirent des gaz lacrymogènes", a renchéri Oncur, une femme venue d'Istanbul et qui souhaite taire son nom de famille. "Il n'y a aucune justice", a-t-elle ajouté.

Les juges d'Ankara avaient indiqué en juin que 36 jihadistes soupçonnés d'être liés à cet attentat avaient été arrêtés et que 10 d'entre eux avaient été placés en détention provisoire. Mais aucun procès ne s'est encore tenu à ce jour.

La Turquie est secouée depuis l'été 2015 par une série d'attentats meurtriers attribués au groupe Etat islamique (EI) ou au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, rebelles kurdes) ou ses émanations.

Dimanche, 18 personnes - 10 militaires et 8 civils - ont été tuées dans une attaque attribuée au PKK survenue à proximité d'un commissariat à Semdinli dans la province de Hakkari (sud-est), non loin des frontières avec l'Irak et l'Iran.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.