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Syrie: trois jours d'offensive turque contre les miliciens kurdes


Lundi 22 janvier 2018 à 19h40

Istanbul, 22 jan 2018 (AFP) — L'armée turque mène depuis samedi dans le nord de la Syrie une offensive aérienne et terrestre contre une milice kurde qu'elle considère comme "terroriste", mais alliée des Etats-Unis contre le groupe Etat islamique (EI).

Cette offensive intervient après l'annonce par la coalition internationale antijihadistes emmenée par Washington de la création d'une "force frontalière" composée notamment de combattants kurdes, un projet qui a suscité la colère d'Ankara.

- 'Rameau d'olivier' -

Le 20 janvier, la Turquie lance une offensive terrestre et aérienne baptisée "Rameau d'olivier" contre les Unités de protection du peuple (YPG) dans la région d'Afrine dans le nord de la Syrie. Ankara considère ces milices comme la branche syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qu'elle considère comme "terroriste" et qui mène une rébellion dans le sud-est de la Turquie depuis plus de 30 ans.

Ankara indique tenir le président syrien Bachar al-Assad informé "par écrit" de son offensive. Damas, qui nie, affirme que son aviation abattra tout appareil militaire turc s'aventurant dans son espace aérien.

La Russie se déclare "préoccupée" et appelle à la "retenue". Le ministère de la Défense annonce que les militaires russes ont quitté la zone d'Afrine pour "empêcher d'éventuelles provocations" ou menaces.

La milice kurde déclare de son côté qu'elle va "tenir la Russie pour responsable de ces attaques au même titre que la Turquie".

- Préoccupations 'légitimes' -

Le 21, des chars et des militaires turcs entrent dans la région d'Afrine. Les médias officiels indiquent que les forces d'Ankara ont pénétré de cinq kilomètres en Syrie.

Le département d'Etat américain appelle la Turquie à "faire preuve de retenue". Mais le secrétaire à la Défense Jim Mattis assure qu'Ankara a prévenu Washington avant de lancer son opération, estimant que les préoccupations sécuritaires de la Turquie sont "légitimes".

La France demande une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU et appelle la Turquie à cesser son offensive. L'Iran exprime son inquiétude. Bachar al-Assad condamne l'opération.

La police turque empêche des manifestations contre l'opération à Istanbul et à Diyarbakir (sud-est).

- 'Pas de marche arrière' -

Le 22, nouvelle poussée des soldats turcs et de leurs alliés syriens, appuyés par l'artillerie. Des combats meurtriers opposent les forces d'Ankara aux combattants kurdes.

"La question d'Afrine sera réglée, il n'y aura pas de marche arrière (...). Nous en avons parlé avec nos amis russes, nous avons un accord", déclare le président turc Recep Tayyip Erdogan.

L'opération sera "limitée et de courte durée", affirme le vice-Premier ministre Mehmet Simsek. Selon Ankara, elle a pour but de créer une "zone de sécurité" d'une profondeur de 30 km à partir de la frontière.

Le Kremlin indique "suivre de manière la plus attentive" le déroulement de l'opération, indiquant être en contact avec Damas comme avec Ankara.

Le secrétaire d'Etat américain Rex Tillerson réitère l'appel des Etats-Unis à la "retenue", tout en reconnaissant "le droit légitime de la Turquie" à se "protéger".

Les Forces démocratiques syriennes (FDS), une coalition kurdo-arabe dont les YPG sont la principale composante, appellent la coalition à "prendre ses responsabilités", affirmant que l'offensive constitue un "soutien clair" à l'EI.

La cheffe de la diplomatie de l'Union européenne Federica Mogherini se dit "extrêmement inquiète".

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), au moins 54 combattants, dont 26 miliciens kurdes et 19 rebelles syriens ont été tués depuis samedi. 22 civils ont été tués dans les bombardements turcs, et deux personnes sont mortes dans les bombardements kurdes visant les territoires syriens des rebelles pro-Ankara, d'après l'OSDH. Ankara nie prendre pour cible les civils.

Le Premier ministre turc Binali Yildirim affirme que 170 cibles ont été détruites. Onze villages capturés selon les médias turcs.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.