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Syrie: les jihadistes de l'EI sommés de se rendre par l'alliance arabo-kurde


Lundi 18 février 2019 à 12h32

Champ pétrolier d'Al-Omar (Syrie), 18 fév 2019 (AF — Les jihadistes du groupe Etat islamique retranchés dans leur ultime réduit de l'est syrien n'ont d'autre choix que la "capitulation", a averti lundi une alliance arabo-kurde soutenue par Washington, à l'offensive contre le dernier lambeau du "califat".

Cet avertissement intervient alors que les ministres des Affaires étrangères européens se réunissent lundi à Bruxelles pour discuter du dossier syrien, dans le sillage de l'appel du président américain Donald Trump à rapatrier les étrangers ayant rallié l'EI et retenus aujourd'hui par les forces kurdes.

A son apogée, l'EI avait attiré des milliers d'Européens, Américains et Asiatiques, parmi d'autres combattants étrangers, installés dans les régions conquises par l'organisation ultraradicale dès 2014 en Syrie et en Irak.

Mais du "califat" autoproclamé, il ne reste plus qu'une poche de moins d'un demi-kilomètre carré, à Baghouz, village de la province de Deir Ezzor.

Depuis plusieurs jours, la "bataille finale" des Forces démocratiques syriennes (FDS) contre cet ultime secteur bute toutefois sur la résistance d'une poignée de jihadistes jusqu'au-boutistes.

Retranchés dans des tunnels, sous un océan de mines, ils empêchent la sortie de plusieurs centaines de civils transformés en "boucliers humains", selon les FDS et la coalition internationale emmenée par Washington.

"Les affrontements sont très limités et sporadiques. Jusque-là, il n'y a aucun changement sur le terrain", reconnaît un porte-parole des FDS, Mustefa Bali.

"Nous oeuvrons pour trouver un moyen d'évacuer les civils", ajoute-t-il.

- Négociations? -

Selon une source au fait des opérations militaires anti-EI, des "centaines" de jihadistes auraient réclamé leur transfert vers la province d'Idleb, tenue par un autre groupe jihadiste dans le nord-ouest syrien, le tout en étant escortés par les derniers civils qui serviraient de "boucliers humains".

Cette proposition aurait reçu une fin de non-recevoir, selon cette source ayant requis l'anonymat.

L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) a confirmé le rejet de cette requête par les FDS.

L'AFP n'était pas en mesure de vérifier explicitement ces informations auprès d'un haut responsable kurde.

Une source au sein des FDS a toutefois assuré qu'aucune "négociation" n'était possible avec les jihadistes.

"L'EI n'a pas d'options (...), il est encerclé et n'a d'autre choix que la capitulation", a-t-il souligné.

Après une montée en puissance fulgurante en 2014, l'EI avait proclamé un "califat" sur un territoire vaste comme la Grande-Bretagne.

Les jihadistes y avaient établi leur propre administration, exécutant et torturant ceux qui ne respectaient pas leur loi et fomentant des attentats meurtriers y compris à l'étranger.

Face aux multiples offensives, leur territoire s'est réduit comme peau de chagrin, alors que des centaines de jihadistes étrangers ont été arrêtés par les FDS.

Parmi eux se trouvent des Français, des Allemands, mais aussi des Britanniques ou encore des Canadiens. Les hommes sont maintenus en prison, les femmes et les enfants dans des camps de déplacés, notamment à Al-Hol, dans la province de Hassaké (nord-est).

L'administration semi-autonome kurde refuse de les juger et veut les renvoyer vers leurs pays d'origine. Mais les puissances occidentales se montrent réticentes face à l'hostilité d'une part de leurs opinions publiques.

- Rencontre européenne -

Lundi à Bruxelles, les ministres des Affaires étrangères de l'UE doivent discuter entre autres des "derniers développements intervenus sur le terrain" syrien, selon l'ordre du jour.

La réunion intervient au lendemain d'une diatribe du président Trump contre les puissances européennes, sommées de rapatrier leurs ressortissants.

"Les Etats-Unis demandent à la Grande-Bretagne, la France, l'Allemagne et aux autres alliés européens de reprendre plus de 800 combattants de l'EI que nous avons capturés en Syrie afin de les traduire en justice", a-t-il martelé sur son compte Twitter, dans la nuit de samedi à dimanche.

"Il n'y a pas d'alternative", a-t-il prévenu.

Paris, Bruxelles et Berlin avaient réagi dès dimanche.

"Ce sont les Kurdes qui les détiennent et nous avons toute confiance dans leur capacité à les maintenir" en détention, a répliqué sur BFMTV le secrétaire d'Etat français à l'Intérieur Laurent Nuñez.

"Quoi qu'il en soit, si ces individus reviennent sur le territoire national, ils seront tous judiciarisés et incarcérés", a-t-il ajouté.

Le ministre allemand des Affaires étrangères Heiko Maas a lui jugé "extrêmement difficile" d'organiser à ce stade un rapatriement.

Un retour ne sera possible que si "nous pouvons garantir que ces personnes seront immédiatement traduits ici devant un tribunal et qu'elles seront mises en détention", a-t-il déclaré dimanche soir sur la chaîne ARD. "Nous avons besoin d'informations judiciaires, et cela n'est pas encore le cas".

Le sujet est d'autant plus sensible que M. Trump s'est engagé en décembre à retirer les quelques 2.000 militaires américains déployés en Syrie. Ce désengagement, et la menace d'une offensive turque contre les forces kurdes, font craindre un chaos sécuritaire dont bénéficierait l'EI.

La bataille anti-EI représente aujourd'hui le principal front de la guerre en Syrie qui a fait plus de 360.000 morts et des millions de déplacés et réfugiés depuis 2011.

Sans tenir de territoires, des jihadistes sont aussi dispersés dans le vaste désert central de la badiya et revendiquent des attaques menées par des "cellules dormantes" dans les régions contrôlées par les FDS.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.