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Opérations militaires de Bagdad dans la province de Kirkouk que revendiquent les Kurdes


Vendredi 13 octobre 2017 à 12h58

Kirkouk (Irak), 13 oct 2017 (AFP) — Les forces gouvernementales irakiennes progressaient vendredi dans le sud de la province pétrolière de Kirkouk reprenant des positions occupées depuis trois ans par les combattants kurdes dans cette région du nord de l'Irak revendiquée par le Kurdistan autonome.

Face à elles, des milliers de combattants kurdes (peshmergas) étaient prêts à "défendre" leurs positions, selon les autorités kurdes, en crise ouverte avec le gouvernement central depuis la tenue le 25 septembre de leur référendum d'indépendance contre l'avis de Bagdad.

"Les forces armées irakiennes avancent pour reprendre (aux peshmergas) les postes militaires dont ils se sont emparés lors des événements de juin 2014", dans le chaos créé par la percée jihadiste, a indiqué à l'AFP un général des forces armées irakiennes qui s'exprimait sous le couvert de l'anonymat depuis une position au sud de la ville de Kirkouk.

Il a indiqué que les forces gouvernementales faisaient mouvement vers le sud de la province. Elles ont repris "vendredi matin la Base-102, à l'ouest de la ville de Kirkouk, près de l'autoroute menant à Tikrit, désertée sans combat par les peshmergas" dans la nuit, a-t-il poursuivi.

Cheikh Jaafar Moustafa, commandant peshmerga dans la province de Kirkouk, a indiqué lors d'une conférence de presse à la mi-journée que les combattants kurdes s'étaient retirés de zones où ils s'étaient avancés pour combattre les jihadistes de l'Etat islamique (EI).

"Nous sommes revenus sur nos lignes dans les environs de Kirkouk et nous défendrons la ville de Kirkouk en cas d'attaque", a-t-il ajouté. "Si l'armée irakienne s'y avance, nous nous battrons".

Des médias kurdes ont évoqué un retrait des peshmergas sur 72 km³.

Cheikh Moustafa a en outre affirmé avoir tenté une médiation.

- V de victoire sur drapeau kurde -

"Nous avons informé les commandants militaires présents sur place que nous étions en contact" avec le Premier ministre Haider al-Abadi et "qu'il nous avait dit que nos problèmes seraient réglés par le dialogue sous 48 heures", a-t-il rapporté.

"Mais les commandants militaires nous ont répondu qu'ils avaient des ordres leur intimant d'avancer vers ces régions et qu'ils ne se préoccupaient pas des déclarations de M. Abadi", a ajouté le commandant peshmerga.

Les unités d'élite de la police et du contre-terrorisme, ainsi que les Unités paramilitaires de mobilisation populaire (Hachd al-Chaabi, en arabe) participent à ces opérations, a affirmé à l'AFP le général des forces armées irakiennes.

Interrogés par l'AFP, des porte-parole de M. Abadi et du Hachd, se sont refusé à tout commentaire pour le moment.

Le Hachd a toutefois publié des photos montrant un de ses membres en tenue kaki faisant le V de la victoire devant un drapeau kurde. Sur d'autres images, on peut voir des affiches de cette force paramilitaire collées sur un panneau routier.

En face, Hemin Hawrami, conseiller du président du Kurdistan autonome Massoud Barzani, a assuré sur Twitter que "des milliers de peshmergas lourdement armés" étaient dans la province de Kirkouk avec "pour ordre de se défendre quel qu'en soit le prix".

"L'escalade ne viendra pas de notre part, nous nous défendrons seulement et nous les repousserons s'ils attaquent", a-t-il ajouté.

- Pétrole et base militaire -

Les autorités du Kurdistan autonome disent redouter que les forces gouvernementales disséminées à travers le pays à l'issue des différentes batailles contre l'EI ne retournent désormais leurs armes contre les peshmergas.

Dans la ville même de Kirkouk, les habitants se ruaient sur les stations-service. Dans les quartiers à majorité kurde, dans le nord de la ville, des civils étaient sortis avec des armes, ont rapporté des témoins.

Le gouvernement kurde affirme citant ses services de renseignement que les forces de Bagdad ont l'"intention de s'emparer des champs pétroliers, d'un aéroport et d'une base militaire".

Les autorités centrales, par le biais de la société d'Etat, la North Oil Company (NOC), étaient en charge de l'ensemble des champs pétroliers de la riche province de Kirkouk.

Mais en 2008, les Kurdes avaient pris le contrôle du champ de Khormala. Et en 2014, dans le chaos créé par l'offensive des jihadistes, ils se sont également emparés de Havana et Bay Hassan.

Quant à la base, il s'agit de celle de la 12e division de l'armée irakienne, dont les peshmergas s'étaient emparés en juin 2014 en chassant les soldats peu après la chute de Mossoul aux mains des jihadistes. L'aéroport est mitoyen.

Les trois champs pétroliers de la province de Kirkouk fournissent 250.000 barils par jour sur les 600.000 b/j de pétrole qu'exporte la région du Kurdistan irakien en dépit du refus de Bagdad. Si les Kurdes perdaient ces champs, cela constituerait une perte considérable pour la région autonome qui traverse sa pire crise économique.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.