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Les deux grands partis kurdes d'Irak en guerre ouverte


Mardi 17 octobre 2017 à 11h27

Kirkouk (Irak), 17 oct 2017 (AFP) — Les deux grands partis kurdes irakiens sont entrés en guerre ouverte après le succès des forces irakiennes face à leurs combattants à Kirkouk (nord), plusieurs cadres de l'Union patriotique kurde (UPK) accusant le président du Kurdistan irakien de "vol".

Entre le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) de Massoud Barzani, président de la région autonome, et l'UPK créé par Jalal Talabani, récemment décédé, la rancoeur est ancienne. Ils se sont même combattus dans les années 90.

Mais le référendum sur l'indépendance tenu le 25 septembre au Kurdistan irakien a remis le feu aux poudres.

Cette consultation a été "imposée par la force", affirme Ala Talabani, députée de l'UPK au Parlement de Bagdad, alors que le président Barzani a refusé de prêter l'oreille à ceux parmi les Kurdes qui proposaient un report de ce référendum et des négociations sous l'égide de l'ONU, comme aux propositions de médiation du président irakien, le Kurde Fouad Massoum.

"Pendant que nous étions occupés à protéger le peuple kurde, Massoud Barzani s'activait à voler le pétrole et à renforcer son influence", accuse Lahour Cheikh Zengi, chef du contre-terrorisme kurde dans la région de Souleimaniyeh, fief de l'UPK.

"A partir de maintenant, nous ne sacrifierons plus nos fils pour le trône de Massoud Barzani", ajoute-t-il dans un communiqué.

Chef du PDK fondé par son père, Massoud Barzani a été élu à la présidence de la région autonome en 2009. Son mandat de quatre ans avait été prolongé de deux ans par le Parlement en 2013.

Il a continué d'occuper cette fonction, l'activité de cette assemblée étant gelée en raison de disputes politiques.

Devant l'opposition résolue de ses adversaires, il a affirmé ne pas vouloir se représenter à la présidence mais après le référendum, il a créé la "Direction politique du Kurdistan" dont il a pris la direction.

Par le biais de cet organe censé "gérer les conséquences du scrutin et les relations avec Bagdad et les pays voisins", M. Barzani cherchent à garder la haute main sur la région autonome, selon ses détracteurs.

- 'Trahison' -

Les dirigeants de l'UPK ont le sentiment qu'à cause de la maladie de son adversaire Jalal Talabani, victime d'un AVC en 2012 et décédé début octobre, Massoud Barzani a pris seul toutes les décisions.

Face à son refus de remettre en cause le référendum et de rendre à Bagdad les infrastructures que les combattants kurdes avaient pris à l'armée durant l'offensive éclair du groupe Etat Islamique (EI) en 2014, notamment dans la région disputée de Kirkouk, qui dépend en théorie de Bagdad, l'UPK a alors négocié en secret avec le Premier ministre irakien Haider al-Abadi.

"Certains de nos dirigeants ont coopéré au redéploiement des forces gouvernementales à Kirkouk", qui a débuté dans la nuit de dimanche à lundi, a ainsi affirmé à l'AFP un haut responsable de l'UPK à Kirkouk. "Ils ont facilité leur entrée sans heurts".

"M. Abadi avait prévenu la veille du référendum qu'il donnerait l'ordre d'entrer dans Kirkouk (...) mais des dirigeants kurdes ont ignoré ces appels", a-t-il ajouté.

"En outre, le PDK et le ministère des Peshmergas (combattants kurdes) ne se sont pas préoccupés des combattants (de l'UPK) basés dans le sud de Kirkouk et ne leur ont pas fournit l'armement nécessaire", a dit ce responsable.

Selon un haut gradé kurde engagé sur le front sud, des combattants kurdes se sont ainsi retirés de certaines positions après qu'"une dizaine de peshmergas ont été tués".

"Nous disions depuis des jours que nos équipements ne suffiraient pas mais nous n'avons pas été écoutés", a dit ce haut gradé.

De son côté, le commandement peshmerga à Erbil a accusé "certains responsables de l'UPK" d'avoir "trahi et aidé au complot".

"Les médias de Massoud Barzani nous accusent", rétorque Ala Talabani, mais "personne ne sait où est l'argent des puits de pétrole que le parti de Barzani contrôle depuis juin 2014".

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.