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La Turquie prépare une offensive d'"envergure" contre l'EI en Syrie


Mercredi 5 août 2015 à 19h48

Ankara, 5 août 2015 (AFP) — La Turquie a annoncé mercredi qu'elle allait bientôt lancer une "lutte d'envergure" contre le groupe Etat islamique (IE) dans le nord de la Syrie, après avoir bombardé quasi-exclusivement des positions kurdes en Irak depuis deux semaines.

La Turquie va "bientôt" commencer à combattre l'EI dans le cadre d'une "lutte d'envergure", a affirmé le chef de la diplomatie turque Mevlut Cavusoglu lors d'une rencontre avec son homologue américain John Kerry en Malaisie, en marge des réunions annuelles de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (Asean).

Il a souligné, cité par l'agence pro-gouvernementale turque Anatolie que "les avions américains ont commencé à arriver" en Turquie, sans donner plus de précision.

Mercredi un drone américain a bombardé une cible du groupe Etat islamique (EI) dans la zone contrôlée par les islamistes dans le nord de la Syrie,a annoncé à l'AFP un responsable turc.

Il s'agit de la première opération aérienne de ce type par un drone armé américain parti de la base d'Incirlik dans le sud de la Turquie, a-t-il précisé.

Lundi soir le ministère américain de la Défense a affirmé que des drones armés de l'US Air Force avaient décollé d'Incirlik pour conduire des missions en Syrie, sans en préciser la nature.

"Un drone américain a procédé aujourd'hui (mercredi) à un raid aérien en Syrie près de Raqa", a indiqué, sous couvert d'anonymat, le responsable turc. Il faisait référence à la ville dans le nord de la Syrie considérée par les islamistes de l'EI comme leur capitale.

Les Etats-Unis encouragent depuis longtemps la Turquie, allié au sein de l'Otan, à accentuer la lutte contre le groupe Etat islamique, ce qu'Ankara s'était montré réticent à faire jusqu'à il y a peu.

Cette position dénoncée régulièrement en Turquie et à l'étranger a changé après une attaque sanglante attribuée à l'EI le 20 juillet qui a coûté la vie à 32 personnes sur le sol turc, dans le sud frontalier avec la Syrie.

Ankara a ensuite lancé le 24 juillet une "guerre contre le terrorisme" visant simultanément le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) et les combattants de l'EI dans le nord syrien. Mais jusqu'à présent les raids ont visé en très grande majorité la rébellion kurde, et ont mis un terme à presque trois années d'accalmie et un fragile processus de paix.

Selon M. Cavusoglu, la Turquie entraine et équipe des membres de l'opposition modérée syrienne. Dirigée depuis 2002 par le régime islamo-conservateur du président Recep Tayyip Erdogan, la Turquie n'a jamais fait mystère de son opposition au régime de Bachar al-Assad, son ex-allié.

"Actuellement, avec les Etats-Unis, nous entraînons et équipons l'opposition modérée et nous allons aussi démarrer notre combat contre Daech (acronyme arabe de l'EI), bientôt, et de manière efficace", a-t-il assuré.

Depuis juillet Ankara autorisé des avions militaires américains à lancer des attaques contre des jihadistes de l'EI depuis la base aérienne d'Incirlik.

- L'EI, alibi pour affaiblir le PKK -

Pour ses détracteurs, l'administration d'Erdogan se sert de la lutte contre l'EI comme alibi pour affaiblir le PKK et ses alliés, dont sa vitrine politique, le Parti de la démocratie des peuples (HDP) compte 80 députés sur 550 au parlement depuis les législatives du 7 juin.

Son leader charismatique, Selahattin Demirtas, opposant et cible numéro un d'Erdogan, devait se rendre mercredi à Bruxelles pour y rencontrer des dirigeants exilés du PKK, a indiqué à l'AFP son entourage.

L'armée turque, engagée sur plusieurs fronts, a par ailleurs renouvellé mercredi son état-major lors d'une réunion annuelle.

Necdet Özel, chef-d'état major des armées depuis 2011, part à la retraite et a été remplacé par le commandant de l'armée de terre, le général Hulusi Akar.

Sur le plan politique, la situation reste bloquée et aucun gouvernement n'a pu être formée depuis le scrutin de juin qui a privé le parti gouvernemental de la justice et du développement (AKP) de sa majorité gouvernementale.

Si les négociations en cours entre l'AKP et le parti social-démocrate CHP échouent d'ici le 23 août, éventualité sur laquelle parient les observateurs, le chef de l'Etat pourrait convoquer de nouvelles élections qui pourraient ne pas débloquer la situation, selon les derniers sondages.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.