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La communauté internationale réunie à Paris au chevet de la transition syrienne


Jeudi 13 février 2025 à 17h41

Paris, 13 fév 2025 (AFP) — Les pays arabes, la Turquie et les Occidentaux se sont réunis jeudi à Paris avec le chef de la diplomatie syrienne pour "aider la Syrie à se reconstruire" et protéger la fragile transition un peu plus de deux mois après la chute de Bachar al-Assad.

"C'est une joie de renouer avec la Syrie après des années d'isolement international", a déclaré le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot en ouvrant la conférence et en saluant la présence de son homologue syrien, Assaad al-Chaibani, qui effectue sa première visite officielle dans un pays de l'Union européenne depuis la chute historique du régime Assad le 8 décembre.

La vingtaine de pays réunie jeudi à Paris ainsi que l'ONU, l'UE et les organisations arabes, veulent voir émerger "une Syrie libre, souveraine, unifiée et stable", et que "la transition réussisse", a poursuivi M. Barrot. Le ministre français a confirmé que l'UE travaillait à une "levée rapide" des sanctions économiques sectorielles adoptées contre le régime Assad.

Les 27 ont conclu fin janvier un accord de principe pour la levée progressive des sanctions, que demande désespérément le nouveau pouvoir syrien dirigé par l'ancien chef rebelle islamiste Ahmad al-Chareh.

"Ces sanctions ne peuvent plus constituer un obstacle au relèvement et à la reconstruction de la Syrie", a dit M. Barrot, en plaidant pour un "afflux rapide de l'aide humanitaire" et la facilitation "des flux financiers et commerciaux nécessaires à la reconstruction".

L'ONU a estimé à plus de 400 milliards de dollars la reconstruction du pays ravagé par 14 ans d'une guerre qui a fait plus de 500.000 morts et plus de dix millions de réfugiés et déplacés syriens.

Bailleurs multilatéraux et agences internationales se sont d'ailleurs réunis jeudi matin à Paris pour travailler à une "stratégie de coordination de l'aide internationale", jusqu'ici fragmentée.

"Sans appui financier substantiel, la transition ne peut pas fonctionner", souligne une source diplomatique européenne, qui doute cependant que dans le contexte mondial actuel se dessine un "plan Marshall" pour la Syrie.

- Cessez-le-feu-

M. Barrot a également lancé un appel à un "cessez-le-feu global sur l'ensemble du territoire syrien" et "la fin des ingérences étrangères".

"Les armes doivent se taire partout en Syrie, notamment dans le nord et le nord-est", où des combats meurtriers continuent à opposer les forces pro-turques aux Kurdes syriens.

Longtemps terrain de guerre par procuration entre pays régionaux, mais aussi internationaux (Assad était soutenu par l'Iran et la Russie), le pays de 23 millions d'habitants reste morcelé, et peut à tout moment retomber dans le chaos, souligne une source diplomatique, rappelant que les forces de sécurité de M. al-Chareh ne disposent que de quelque 30.000 hommes.

Le président par intérim, qui a dissous l'armée d'Assad et décrété l'intégration des groupes armés dans une future armée nationale, a annoncé en début de semaine que "des milliers" de personnes rejoignaient la "nouvelle armée syrienne".

Outre les combats dans le Nord entre forces pro-turques et Kurdes, les jihadistes constituent une menace permanente.

Les Occidentaux, Washington en tête, continuent, dans le cadre de l'opération Inherent Resolve, à frapper l'organisation Etat islamique, défaite en 2019 mais constituant toujours une menace.

- Diversité et inclusivité -

Dans son propos liminaire, M. Barrot a également insisté sur la nécessité d'une transition incluant toutes les composantes de la société syrienne, et espéré que le gouvernement qui doit être formé le 1er mars à Damas reflèterait "la diversité" du pays.

Il a également demandé "un calendrier de transition clair et engageant", alors que le flou règne encore sur le processus et que Ahmad al-Chareh a estimé début février qu'il faudrait "entre quatre et cinq ans" avant d'organiser des élections en Syrie.

En marge de la conférence, la cheffe de la diplomatie allemande Annalena Baerbock, qui s'était rendue à Damas avec M. Barrot début janvier, a insisté également sur un gouvernement "impliquant tous les acteurs". "Il est essentiel que les femmes soient représentées", a-t-elle déclaré.

"Nous sommes tous conscients que la reconstruction de la Syrie sera une tâche colossale, qui connaîtra des revers de temps en temps", a-t-elle poursuivi lors d'un point de presse en marge de la conférence.

La conférence de Paris est la troisième du genre après des réunions en Jordanie et en Arabie saoudite depuis le renversement d'Assad.

Elle se tient alors que Damas a annoncé mercredi que la Syrie se doterait le 1er mars d'un gouvernement reflétant "la diversité" du peuple syrien.

Et elle intervient dans un contexte de profonds bouleversements géopolitiques dans la région, marqués notamment par le recul de l'influence iranienne sous les coups de boutoir israéliens en Syrie et au Liban.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.