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L'offensive turque en Syrie s'intensifie, des dizaines de morts


Dimanche 28 août 2016 à 14h48

Beyrouth, 28 août 2016 (AFP) — Des dizaines de personnes ont été tuées dimanche dans le nord de la Syrie par d'intenses bombardements de l'armée turque au cinquième jour de son offensive visant à la fois les jihadistes et les Kurdes.

L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), qui se base sur un large réseau de sources à travers la Syrie, a rapporté la mort d'au moins 40 civils dans des bombardements turcs. L'armée turque a pour sa part annoncé avoir tué "25 terroristes" en référence aux forces kurdes et pro-kurdes.

Les tirs d'artillerie et les frappes aériennes menés par la Turquie dans le cadre de l'opération "Bouclier de l'Euphrate" se concentrent sur la zone au sud de Jarablos, ex-fief du groupe Etat islamique (EI) proche de la frontière turque. Cette localité a été la première à tomber aux mains de rebelles soutenus par Ankara.

Ces bombardements ont tué dimanche "au moins 20 civils" dans le village de Jeb el-Koussa et 20 autres dans des bombardements près du village d'al-Amarné, tous deux au sud de Jarablos, a indiqué à l'AFP Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH, selon un nouveau bilan.

Les bombardements ont fait plus de 70 blessés.

Ces morts civiles sont, selon l'OSDH, les premières depuis le début mercredi de l'opération turque visant à chasser l'EI de sa frontière et à stopper la progression des autonomistes kurdes, bête noire d'Ankara.

Le bilan donné par l'armée turque porte sur la mort, dans des frappes aériennes, de "25 membres terroristes" du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et du Parti de l'Union démocratique (PYD) --principal partie kurde de Syrie-- près de Jarablos.

"Toutes les mesures ont été prises pour empêcher que les populations civiles ne soient touchées", a-t-elle précisé.

Un porte-parole de l'administration semi-autonome instaurée par les Kurdes en Syrie depuis 2012 à la faveur de la guerre a pour sa part donné un bilan de 75 civils tués dans les deux villages.

Dans un communiqué, les Kurdes ont accusé Ankara de "vouloir élargir son occupation pour parvenir à d'autres régions syriennes".

D'après les rebelles syriens soutenus par Ankara, au moins neuf villages et de localités, dont Jarablos, ont été repris depuis mercredi à l'EI et aux forces pro-kurdes.

- Un soldat de 28 ans tué -

D'après la télévision turque NTV, l'artillerie et les avions turcs ont bombardé toute la nuit et dans la matinée des positions des Unités de protection du peuple kurde (YPG), principale force armée kurde en Syrie.

La Turquie considère le PYD et sa branche armée, les YPG, comme des organisations "terroristes", bien qu'elles soient épaulées, en tant que forces combattant efficacement les jihadistes, par Washington, allié traditionnel d'Ankara.

Selon l'OSDH et les Kurdes, aussi bien Jeb el-Koussa et al-Amarné sont contrôlés non pas par les autonomistes mais par des combattants locaux alliés. D'après l'ONG, au moins quatre d'entre eux ont été tués dans les bombardements de dimanche.

Samedi, des affrontements avaient éclaté pour la première fois entre des chars turcs et des combattants kurdes ou soutenus par ces derniers à al-Amarné.

Ils ont provoqué la première mort, côté turc, d'un soldat qui a été tué dans une attaque à la roquette menée contre deux chars turcs par les YPG.

Le soldat tué, Ercan Celik, 28 ans, sera enterré dimanche à Ganziantep, où le président turc Recep Tayyip Erdogan sera en visite.

- Incertitude à Alep -

Sur un autre front de la guerre en Syrie, qui devient de plus en plus complexe, l'ONU attendait toujours la décision des belligérants concernant un cessez-le-feu humanitaire de 48 heures pour venir en aide à la population assiégée d'Alep, deuxième ville du pays.

Cet appel avait été lancé samedi par l'envoyé spécial de l'ONU, Staffan de Mistura, au lendemain de l'annonce par Moscou et Washington de progrès vers une cessation des combats en Syrie, mais avec de nombreuses modalités encore à définir.

M. de Mistura a donné les belligérants "d'ici dimanche" pour donner leur réponse.

Plusieurs groupes rebelles, qui contrôlent l'est de la ville, ont annoncé dimanche dans un communiqué qu'ils acceptaient le principe de trêve mais "sous conditions".

Ils ont notamment réclamé l'entrée de l'aide à Alep se fasse "via la route de Ramoussa", un passage contrôlé par les rebelles au sud de la métropole et non pas via la route du Castello, contrôlée par les troupes gouvernementales au nord.

Ils expliquent qu'ils ne veulent pas que "le régime d'Assad contrôle le seul accès par lequels transiterait l'aide humanitaire vers les quartiers" aux mains des insurgés à Alep.

L'émissaire onusien a déploré samedi ces réticences. Le régime de Damas, lui, n'a toujours pas réagi.

L'ancienne capitale économique de la Syrie est menacée d'"une catastrophe humanitaire sans précédent" depuis le début de la guerre, a récemment averti l'ONU.

Quelque 1,5 million de personnes y sont prises au piège des rebelles et des forces gouvernementales syriennes depuis la mi-juillet, quand les combats se sont intensifiés.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.