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Financement du terrorisme: prison avec sursis requise contre un ex-avocat et deux journalistes


Mardi 23 janvier 2024 à 17h45

Paris, 23 jan 2024 (AFP) — Des peines de prison avec sursis, de dix mois à cinq ans, ont été requises mardi contre un ex-avocat de jihadistes et deux journalistes jugés à Paris pour avoir notamment transféré des fonds à des membres du groupe Etat islamique, selon eux pour les aider à quitter le "califat" et se rendre.

La peine la plus lourde, soit cinq ans avec sursis, a été requise contre l'ancien avocat Bruno V., 50 ans, passé "d'auxiliaire de justice à auxiliaire de jihadistes", selon les mots du représentant du parquet, Benjamin Chambre, devant le tribunal correctionnel.

Aucun des prévenus ne peut se voir reprocher d'adhérer à l'idéologie de l'Etat islamique (EI), a reconnu le magistrat.

Pour autant, "c'est une tache indélébile" que Bruno V. "laisse sur la robe noire qu'il a été contraint de décrocher", a-t-il fustigé.

"Avocat engagé, puis enragé", Bruno V. a "perdu pied": le prévenu, a résumé le procureur, a participé à la corruption d'un officier de l'armée irakienne pour tenter - en vain - d'épargner la vie du jihadiste Maximilien Thibaut lors de la bataille de Mossoul en 2017. En outre, selon l'accusation, il s'est investi pour organiser l'évasion de deux femmes jihadistes d'un camp géré par les Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par les Kurdes.

Le parquet a par ailleurs requis 10 et 12 mois de prison avec sursis contre les deux journalistes Edith B., 43 ans, et Céline M., 44 ans.

Autrices d'un livre-enquête sur les femmes françaises ayant rejoint l'EI, elles sont jugées pour avoir transféré des fonds afin de payer des passeurs pour "exfiltrer" plusieurs femmes de Syrie ou d'Irak - et pour avoir également pris part à l'opération ratée de sauvetage de Maximilien Thibaut.

Les deux journalistes ont été "entraînées dans un tourbillon qui leur a fait perdre repères, distance, et une certaine raison", a martelé M. Chambre.

Devant le tribunal, Edith B. et Céline M. avaient admis être "sorties du cadre" de leur métier, mais elles avaient maintenu avoir agi par "humanité", pour "sauver des vies".

Un tel positionnement suscite le "malaise", a commenté le procureur: "d'omniscientes" sur le jihadisme des années 2010, les deux journalistes "se sont pensées omnipotentes, aptes à décider qui était dangereux, et qui pouvait être sauvé ou pas", a-t-il critiqué.

Le magistrat a regretté que les règles déontologiques de la profession de journaliste ne prévoient pas la possibilité de sanctions disciplinaires dans un tel cas.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.