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Crise en Irak: séance cruciale du Parlement pour élire un président


Jeudi 13 octobre 2022 à 08h49

Bagdad, 13 oct 2022 (AFP) — Le Parlement irakien se réunit jeudi pour tenter d'élire un nouveau président de la République et ainsi ouvrir la voie à la formation d'un gouvernement, afin de sortir le pays d'une profonde impasse politique après une année émaillée de violences et de tensions.

L'incertitude la plus totale plane sur cette séance parlementaire prévue à 11H00 (08H00 GMT) dans la Zone verte, quartier sécurisé de Bagdad abritant ambassades et institutions gouvernementales.

Depuis les législatives du 10 octobre 2021, les barons de la politique n'ont pas réussi à s'entendre sur un nouveau président, ni à désigner un Premier ministre. Dans un Irak multiconfessionnel et multiethnique, la polarisation n'a fait que s'aggraver.

En filigrane transparaissent les luttes d'influences entre les deux pôles chiites dominant le pouvoir: d'un côté les factions pro-Iran du Cadre de coordination, de l'autre l'imprévisible et tempétueux chef religieux Moqtada Sadr.

Mais la présidence de la République, fonction honorifique traditionnellement réservée à un Kurde, cristallise les tensions entre les deux partis historiques de l'importante minorité kurde.

Le poste revient généralement à l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), tandis que le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) garde la haute main sur les affaires du Kurdistan autonome. Mais désormais le PDK exige la présidence à Bagdad.

A trois reprises cette année, le Parlement a tenté sans succès d'organiser l'élection du président, sans jamais atteindre le quorum des deux-tiers requis pour le vote (220 députés sur 329).

- "Tout peut changer" -

Jeudi matin les forces de l'ordre ont érigé des barrages de contrôle et deux ponts de Bagdad ont été fermés à la circulation, provoquant des embouteillages, selon un correspondant de l'AFP.

Parmi la trentaine de candidats, trois profils se démarquent.

Le président sortant Barham Saleh, candidat officiel de l'UPK, l'ancien ministre Abdel Latif Rachid -- un ancien de l'UPK qui s'est présenté de son propre chef à 78 ans-- et Rebar Ahmed, ministre de l'Intérieur du Kurdistan autonome et candidat du PDK.

Deux petits partis d'opposition, représentés par une quinzaine de députés, ont annoncé qu'ils boycottaient le vote jeudi.

Une fois élu, le président pourra désigner un Premier ministre -- choisi par la plus grande coalition parlementaire -- qui entamera des tractations ardues pour former un gouvernement.

"Il n'est pas encore clair si les partis kurdes sont parvenus à un accord sur un président", souligne le politologue Hamzeh Hadad.

Pour le poste de Premier ministre, "le favori est Mohamed Chia al-Soudani", indique le chercheur, en référence à l'ancien ministre de 52 ans, choisi par le Cadre de coordination.

"Mais en politique irakienne tout peut changer jusqu'à la dernière minute".

En Irak, depuis l'invasion américaine qui renversa en 2003 Saddam Hussein, la communauté chiite, majoritaire, domine le pouvoir et ses partis donnent le la à la vie politique.

- "Dialogue public" -

Cet été, la candidature de Mohamed Chia al-Soudani avait mis le feu aux poudres et provoqué des tensions entre le Cadre de coordination et le Courant sadriste -- les partisans de Sadr campant aux abords du Parlement pendant un mois.

Mais le Cadre de coordination, qui regroupe notamment les ex-paramilitaires du Hachd al-Chaabi et l'ex-Premier ministre Nouri al-Maliki, rival historique de M. Sadr-- n'a jamais fait marche arrière.

Cette coalition veut former un gouvernement -- elle représente aujourd'hui la première force au sein du Parlement, après le retrait inattendu des 73 députés du Courant sadriste.

Habitué aux coups d'éclats, Moqtada Sadr exige d'abord une dissolution du Parlement et des législatives anticipées.

Reste à savoir quelle sera désormais sa réaction.

Il a démontré ces dernières semaines sa capacité à déstabiliser l'échiquier politique en mobilisant des dizaines de milliers de manifestants dans les rues.

L'épreuve de force a atteint son paroxysme le 29 août, quand plus de 30 partisans sadristes ont été tués dans des affrontements contre l'armée et les forces du Hachd al-Chaabi, intégrées aux troupes régulières.

Depuis, M. Sadr s'abstient ostensiblement de parler de politique. Même si début octobre il appelait à écarter du gouvernement "les anciennes figures et leurs partis", se disant ouvert à "un dialogue public" et non des tractations à huit clos.

Se fendant d'un tweet jeudi matin, il a encouragé les écoliers à l'occasion de la rentrée scolaire.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.