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Violents combats à Raqa entre forces arabo-kurdes et jihadistes


Jeudi 8 juin 2017 à 15h32

Qamichli (Syrie), 8 juin 2017 (AFP) — Des forces arabo-kurdes syriennes soutenues au sol et dans les airs par les Etats-Unis tentaient de progresser jeudi dans Raqa au prix de violents combats dans le principal fief du groupe jihadiste Etat islamique (EI) en Syrie.

Sept mois après le début d'une offensive d'envergure qui leur a permis de s'emparer de vastes régions autour de la ville septentrionale de Raqa, les Forces démocratiques syriennes (FDS) sont entrées mardi pour la première dans cette cité, annonçant le début de la "grande" bataille pour en chasser l'EI.

La bataille de Raqa constitue l'un des principaux fronts de la guerre aux multiples belligérants en Syrie qui a fait plus de 320.000 morts depuis mars 2011.

Un correspondant de l'AFP a pu pénétrer brièvement mercredi dans le quartier de Mechleb à Raqa, où les FDS sont entrées à partir de l'est.

Il a été témoin de violents combats, avec des tirs par l'EI d'obus sur les forces adverses. Une partie de Mechleb est désormais contrôlée par les FDS soutenues par les raids de la coalition internationale antijihadistes dirigée par Washington.

Les membres des FDS étaient équipés d'armes légères dont des kalachnikovs, et tiraient des obus en direction des positions des jihadistes. Ils tentaient de cacher leurs véhicules pour qu'ils ne soient pas repérés par des drones utilisés par l'EI pour larguer des bombes.

"Nos troupes avancent à Mechleb et contrôlent des parties du quartier", a dit jeudi à l'AFP un porte-parole des FDS Talal Sello. "Dans la bataille pour Raqa, les forces de la coalition internationale travaillent avec nous sur le terrain de manière très efficace".

La coalition internationale a affirmé avoir mené 22 frappes près de Raqa mercredi, touchant des positions militaires de l'EI ainsi que des véhicules, des caches d'armes et un camp d'entraînement.

- Bombardements incessants -

Les FDS n'ont pas autorisé les journalistes à retourner dans Raqa, où des combats intenses se poursuivaient, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Les FDS contrôlent environ deux tiers de Mechleb et se trouvent à 400 m du quartier adjacent d'al-Senaa.

"L'EI dispose de snipers et a disséminé de nombreuses mines à Mechleb", a dit l'ONG. Le quartier a été vidé de sa population civile par les jihadistes avant l'entrée des FDS, et l'EI y a creusé des tranchées défensives et des tunnels.

Les combats se poursuivaient également à la périphérie ouest de Raqa, a poursuivi l'Observatoire, ajoutant que les forces spéciales américaines étaient présentes sur plusieurs fronts de Raqa.

Mercredi, un correspondant de l'AFP a vu des véhicules blindés de la coalition chargés d'armes lourdes et recouverts de bâches de camouflage garés sous des oliviers, dans le désert à l'est de Raqa.

Des commandants et commandantes des FDS travaillaient sur des tablettes pour identifier les cibles ennemies. Des pneus ont été déposés dans les rues pour arrêter d'éventuelles voitures piégées, arme de prédilection des jihadistes.

Capturée par les jihadistes en 2014, Raqa est devenue le symbole des atrocités commises par l'EI --décapitations, exécutions publiques-- ainsi qu'une base pour la planification d'attentats commis à l'étranger.

Les habitants font état de bombardements incessants, a indiqué un militant du collectif "Raqa is Being Slaughtered Silently" ("Raqa est massacrée en silence").

- Craintes pour les civils -

Selon lui, les conditions de vie se détériorent avec, outre les bombardements, des pénuries en eau et électricité.

Des civils ayant réussi à s'échapper de la ville ont affirmé avoir été visés par les jihadistes dans leur fuite.

Le nombre de civils tués par les raids de la coalition est en nette hausse depuis que les FDS ont lancé leur offensive.

Une frappe mardi sur la ville a tué huit civils dont trois enfants, selon l'OSDH. Lundi, 21 civils ont péri en fuyant Raqa.

Selon les Nations unies, environ 160.000 personnes vivent à Raqa, contre 300.000 avant le début de la guerre.

Le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU a affirmé que quelque 100.000 personnes "pourraient se trouver piégées" durant l'assaut. L'International Rescue Committee a dit craindre que l'EI n'utilise les civils comme "boucliers humains".

L'armée syrienne a été absente jusqu'à présent de la bataille de Raqa, même si l'agence de presse officielle Sana a indiqué que l'armée de l'air avait visé des positions de l'EI dans l'ouest de la province du même nom.

Déclenchée en 2011 par la répression par le régime de manifestations réclamant des réformes, la guerre en Syrie s'est complexifiée avec l'implication de milices, de puissances régionales et internationales ainsi que de groupes jihadistes sur un territoire morcelé.

Des négociations entre régime et rebelles prévues les 12 et 13 juin à Astana en vue de trouver une solution au conflit ont été reportés sine die.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.