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Turquie: deux manifestants tués lors d'affrontements avec la police à Diyarbakir


Lundi 14 decembre 2015 à 16h34

Diyarbakir (Turquie), 14 déc 2015 (AFP) — Deux manifestants ont été tués par balle lundi lors de violents affrontements avec la police à Diyarbakir lors d'un rassemblement pour dénoncer le couvre-feu instauré il y a plus de deux semaines dans un quartier de la ville à majorité kurde de la Turquie.

Les deux victimes, âgées de 21 et 25 ans, ont été tuées par balle dans des conditions qui restent à éclaircir alors qu'elles tentaient d'entrer dans le district de Sur, théâtre depuis le début du mois de combats entre les forces de sécurité et des partisans du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), a-t-on appris de source proche des services de sécurité.

Au moins deux autres personnes, des civils, ont été blessées lors de ces incidents, a-t-on précisé de même source.

Les affrontements ont débuté dans la matinée, lorsque des centaines de personnes, dont plusieurs députés du Parti démocratique des peuples (HDP, prokurde), ont tenté d'entrer dans le district de Sur pour dénoncer le couvre-feu.

Leur cortège a été immédiatement repoussé par la police avec des grenades lacrymogènes et des canons à eau. Au moins deux personnes ont alors été blessées et une quarantaine d'autres arrêtées, a constaté un journaliste de l'AFP.

Les autorités turques ont imposé le 2 décembre un couvre-feu dans le district de Sur, quelques heures après la mort par balles, dans des circonstances qui n'ont toujours pas été éclaircies, d'un célèbre avocat kurde, Tahir Elçi.

Cette mesure a été levée quelques heures vendredi par le gouverneur. Lors d'une brève visite à Sur, des journalistes de l'AFP y ont découvert un paysage de guerre, avec des bâtiments criblés de balles et des rues défigurées par les barricades et les tranchées. Des centaines d'habitants ont fui avec leurs familles.

- 'Maison par maison' -

Après plus de deux ans de cessez-le-feu, d'intenses combats ont repris l'été dernier entre policiers et soldats turcs et le PKK.

Ils ont fait voler en éclats les pourparlers de paix engagés fin 2012 par le gouvernement islamo-conservateur d'Ankara avec le chef rebelle emprisonné Abdullah Öcalan pour tenter de mettre un terme à un conflit qui a fait plus de 40.000 morts depuis 1984.

En plus des attaques du PKK contre les forces de sécurité, de nombreux affrontements ont éclaté dans les villes du sud-est entre des jeunes partisans des rebelles et les forces spéciales de la police. Des dizaines de civils ont été tués.

Selon un décompte d'ONG, plus de 50 couvre-feu ont été imposés dans 17 villes turques depuis la mi-août, affectant plus de 1,3 million d'habitants.

Le gouverneur de la province de Sirnak a annoncé le rétablissement du couvre-feu à partir de lundi soir dans les villes de Cizre et Silopi (sud-est), où 3.000 enseignants ont été priés par leur ministère de quitter les lieux, a rapporté l'agence de presse Dogan.

Sur la lancée de la victoire de son parti aux législatives du 1er novembre, le président Recep Tayyip Erdogan a réaffirmé sa volonté "d'éradiquer" le PKK.

"Ils pensent pouvoir nous intimider en multipliant les barricades, les tranchées. Ils veulent pousser les habitants à bout. Ils pensent que le peuple va ensuite accuser le gouvernement", a dénoncé lundi le Premier ministre Ahmet Davutoglu lors d'un entretien accordé à la chaîne de télévision A Haber.

"Moi non plus je ne suis pas enchanté par les couvre-feu. Mais l'absence de couvre-feu peut ouvrir la voie à des pertes civiles", a ajouté M. Davutoglu. "S'il le faut, ces villes seront nettoyées des terroristes maison par maison", a-t-il promis.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.