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La Turquie invite Barzani pour un coup de pouce à la paix avec le PKK


Jeudi 14 novembre 2013 à 12h33

ANKARA, 14 nov 2013 (AFP) — Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan reçoit samedi le dirigeant des Kurdes d'Irak, Massoud Barzani, pour une visite qui doit permettre à Ankara de s'assurer de son appui pour remettre sur les rails le processus de paix menacé avec la rébellion kurde.

Signe de l'importance qu'il accorde à l'événement, M. Erdogan a choisi de recevoir pour la première fois le président du Kurdistan irakien à Diyarbakir, le chef-lieu emblématique du sud-est anatolien à majorité kurde.

"Nous allons vivre ce week-end à Diyarbakir un processus historique (...) Espérons qu'il soit un couronnement du processus de paix" engagé il y a un an avec les rebelles kurdes, a déclaré mercredi le chef du gouvernement turc.

Lors de son séjour turc tout en symboles, M. Barzani doit assister avec son hôte à une série d'inaugurations, à un mariage collectif puis un concert des chanteurs folkloriques kurdes Ibrahim Tatlises et surtout Shivan Perver, une icône de la résistance kurde longtemps interdit de se produire en Turquie.

Le dirigeant kurde irakien, qui a souvent plaidé pour la réconciliation entre les autorités turques et les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), est une personnalité respectée par la minorité kurde de Turquie. C'est ce poids politique que convoite Ankara pour faire passer un message aux 12 à 15 millions de Kurdes de Turquie.

"Le choix de la ville est symbolique", a souligné à l'AFP une source proche du gouvernement, "le gouvernement turc veut ainsi démontrer que sa volonté d'en finir avec le conflit kurde est réelle, à un moment où les affaires ne vont pas si bien".

Engagés à l'automne 2012, les pourparlers de paix initiés par Ankara avec Abdullah Öcalan, le chef du PKK qui purge une peine de prison à vie en Turquie, sont au point mort.

Les Kurdes accusent Ankara de ne pas tenir ses promesses de réformes notamment en refusant de reconnaître leur identité dans la Constitution, leur principale revendication. En représailles, le PKK a donc suspendu en septembre le retrait de Turquie de ses combattants armés, menaçant de faire capoter tout le processus.

Critiques

"Dans ce contexte difficile, il est judicieux de montrer que la Turquie ne cherche que la paix", a insisté la source proche du gouvernement.

La visite à grand spectacle organisée par M. Erdogan pour M. Barzani a reçu le soutien de quelques personnalités kurdes. "J'ai l'espoir qu'elle apportera une importante contribution au processus de paix", a déclaré la célèbre députée kurde Leyla Zana.

Mais elle ne fait pas l'unanimité dans les rangs de la communauté kurde de Turquie, dont certains membres ont dénoncé les arrières-pensées électoralistes du chef du gouvernement islamo-conservateur, à la veille des municipales de mars 2014.

"Bien sûr, certains l'ont sûrement invité à Diyarbakir en vue du prochain scrutin", a relevé devant la presse le député kurde Ahmet Türk, "j'espère que M. Barzani s'en rend compte".

Autre sujet à l'ordre du jour de sa visite en Turquie, le conflit syrien, à l'heure où les relations entre le président du Kurdistan irakien et les kurdes syriens du Parti de l'union démocratique (PYD) se sont tendues.

Comme Ankara, Erbil n'a pas masqué son inquiétude face à la décision du PYD de créer une administration autonome dans le nord de la Syrie après sa victoire sur les forces jihadistes qui combattent le régime de Damas. Ces groupes proches d'al-Qaïda ont déjà revendiqué en septembre un attentat perpétré à Erbil en représailles au soutien du Kurdistan irakien aux combattants du PYD.

Enfin, MM. Erdogan et Barzani devraient aussi évoquer le renforcement de leurs liens en matière économique, notamment dans le secteur de l'énergie. Les contrats pétroliers passés par Ankara avec la région autonome kurde d'Irak ont fortement contrarié Bagdad.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.