© Dernières Nouvelles d'Alsace  - Ven 15 oct. 2004
Le prix Sakharov remis à Leyla Zana

Après neuf ans de prison, Leyla Zana, député turc d'origine kurde a reçu hier au Parlement européen le prix Sakharov qui lui avait été attribué en 1995. Décernée aux défenseurs des droits de l'homme, cette récompense n'a pas troublé ce porte parole des Kurdes qui a réclamé une vraie démocratisation turque. Pas simplement « cosmétique ».

 « Si ce fardeau a été supporté par vous seule, beaucoup de membres de la communauté internationale vous ont soutenue ». Pour Josep Borrell, président du Parlement européen, la venue de Leyla Zana chez les eurodéputés résonne comme un retour à la maison. Ne l'ont-ils pas soutenue dès qu'elle a été arrêtée pour avoir, en 1991, prêté son serment de député turc en langue kurde ? Ne lui ont-ils pas attribué le prix Sakharov alors même qu'elle croupissait en prison « derrière des barreaux froids et sourds » ?

Aussi, pour Graham Watson, président du groupe Alliance des Libéraux et Démocrates pour l'Europe, Leyla Zana au Parlement européen, c'est tout un symbole : « Nous accueillons aujourd'hui sa liberté et nous saluons cette chance de l'honorer. Sa captivité a été un symbole de l'ancienne Turquie, sa liberté est un important et nécessaire signe du changement ». Sans acrimonie, mais aussi sans ce lyrisme politique là, Leyla Zana a, elle, préféré voir dans sa libération la preuve de la nécessité de poursuivre un combat démocratique pacifique : « On a franchi d'importantes étapes vers la démocratie. Mais leur concrétisation semble encore cosmétique »

.«Seuls les Kurdes n'ont pas de nom»

 Si les députés européens se sont félicités à l'image de Josep Borrell que la langue kurde ne soit plus illégale en Turquie, Leyla Zana est donc restée en retrait par rapport à cet optimisme : « Les fleurs, les arbres, les oiseaux ont un nom. Seuls les Kurdes n'ont pas de nom. Or, ils comptent parmi les éléments fondateurs de la République de Turquie. Ils sont déterminés à soutenir une solution pacifique respectueuse de l'intégrité territoriale de la Turquie. Or le gouvernement persiste à ne pas comprendre cette initiative sincère ouverte au dialogue ».

Ph.C