"Al-Baghdadi mort comme un chien"

mis à jour le Mercredi 30 octobre 2019 à 18h11

le Monde | Par Gilles Paris | Le 28/10/2019

Trump annonce la mort d’Al-Baghdadi, l’organisation Etat islamique résiste encore

Pour Donald Trump, c’est un succès incontestable. Le chef de l’EI est mort, dimanche 27, lors d’un raid des forces spéciales américaines  

Le président américain compte retirer les fruits de cette victoire, alors qu’il est fragilisé par une procédure d’impeachment  

Selon un rapport du Pentagone, l’EI « se ressaisit en Syrie », avec des cellules clandestines toujours actives  

En Syrie, les Kurdes perdent leur ennemi et leur autonomie (Allan Kaval)  

Trump tente de profiter de l’élimination du chef de l’organisation Etat islamique, qu’il a annoncée dimanche

Washington - correspondant

Donald Trump a engrangé un succès éclatant contre l’organisation Etat islamique (EI) en annonçant, le dimanche 27 octobre au matin, la mort de son fondateur et principal dirigeant, connu sous le nom de guerre d’Abou Bakr Al-Baghdadi. Acculé dans le complexe qui venait d’être pris d’assaut par les forces spéciales américaines, la veille, en début de soirée, dans la poche d’Idlib, au nord-ouest de la Syrie, ce dernier a fait détoner la ceinture d’explosifs qu’il portait sur lui.

Le président des Etats-Unis avait mis en alerte le pays dès la fin du raid, peu après 21 heures, à Washington, annonçant de manière sibylline sur son compte Twitter que « quelque chose d’énorme [venait] tout juste de se produire ! ». Son service de presse avait promis « une importante annonce » pour le lendemain matin, tandis que l’identité d’Abou Bakr Al-Baghdadi était en cours de confirmation par le Pentagone.

Dans une courte allocution, Donald Trump a d’abord annoncé la nouvelle, dépeignant un djihadiste pris au piège dans un tunnel sans issue, « gémissant, pleurant et hurlant », emportant dans la mort trois de ses enfants avec lesquels il avait tenté de couvrir sa fuite. Le président des Etats-Unis a remercié la Russie, l’Irak, la Syrie, la Turquie et ses alliés kurdes pour l’aide fournie, les deux premiers pour avoir permis sans encombre l’acheminement des forces spéciales américaines par les airs.

« La nuit dernière a été une excellente nuit pour les Etats-Unis et pour le monde, a-t-il conclu, un meurtrier brutal, qui a causé tant d’horreurs et tant de morts, a disparu dans la violence. Il ne fera plus jamais de mal à un autre homme, à une femme ou à un enfant innocent. Il est mort comme un chien. Il est mort comme un lâche. Le monde est maintenant un endroit beaucoup plus sûr. »

« Comme au cinéma »

En mai 2011, Barack Obama avait annoncé la mort d’Oussama Ben Laden, le fondateur d’Al-Qaida, dans une courte allocution de neuf minutes. Après son propos liminaire, Donald Trump s’est attardé plus d’une demi-heure supplémentaire, manifestement désireux de répondre aux questions de la presse pour raconter le raid victorieux avec un rare luxe de détails. Il a assuré avoir suivi l’assaut « comme au cinéma », en direct par le biais de caméras embarquées par des forces spéciales.

Le président des Etats-Unis a notamment donné des indications sur les forces mobilisées, acheminées par huit hélicoptères. Il a expliqué que le raid conduit près de la frontière avec la Turquie avait duré « approximativement deux heures » et que les forces américaines, manifestement parties d’une base située dans le Kurdistan irakien, près d’Erbil, avaient emprunté le même chemin à l’aller comme au retour.

Donald Trump a assuré n’avoir pas prévenu, comme c’est la coutume, les responsables démocrates, avec lesquels les relations sont exécrables, pour des raisons de confidentialité. La speaker de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, s’en est émue, notant que la Russie avait été avertie avant elle.

Le président a longuement décrit le mode opératoire. « Si vous êtes une personne normale, vous dites : “Toc-toc, puis-je entrer ?”. Le fait est que [les forces spéciales] se sont frayé un chemin à travers un très gros mur, et cela leur a pris littéralement quelques secondes », a-t-il expliqué. Il a ajouté que le renseignement américain disposait d’une connaissance très précise des lieux, y compris de l’existence de tunnels, et que les forces spéciales sont reparties, selon lui, avec « du matériel et des informations extrêmement sensibles ». Le complexe a ensuite été totalement rasé par un bombardement aérien.

Ce succès tombe à point nommé pour Donald Trump, alors qu’il est fragilisé par une mise en accusation par la Chambre des représentants. Le président est en effet accusé d’avoir abusé de son pouvoir en gelant une aide américaine à l’Ukraine pour obtenir de Kiev des enquêtes visant ses adversaires politiques. La mort d’Abou Bakr Al-Baghdadi lui permet, espère-t-il, de conforter sa stature présidentielle en obtenant un résultat similaire à l’élimination d’Oussama Ben Laden, même si le fondateur de l’EI n’a jamais représenté pour l’opinion américaine l’équivalent du responsable des attentats du 11-Septembre.

En répondant aux questions, dimanche, Donald Trump a tenté de relativiser l’importance du premier. « Personne n’avait jamais entendu parler de lui. Baghdadi, tout le monde le connaissait parce qu’il avait construit ce monstre depuis longtemps. Mais personne n’avait jamais entendu parler d’Oussama Ben Laden avant le World Trade Center », a-t-il dit. Il a ravivé une vieille contre-vérité en assurant avoir plaidé pour l’élimination du premier avant le 11-Septembre, mais que « personne ne [l]’avait écouté ».

Donald Trump peut désormais assurer que le résultat du raid de samedi met un point final à la destruction de l’EI engagée par son prédécesseur, Barack Obama, à partir d’août 2014, mais dont il revendique l’exclusive paternité. L’argument d’une mission désormais accomplie a été avancé avant même la mort du chef djihadiste pour justifier, le 7 octobre, le retrait des forces spéciales qui avaient été déployées dans le nord-est de la Syrie afin d’encadrer leurs alliés kurdes, en première ligne dans le combat contre l’EI.

Impact négatif

La nature de l’opération américaine pourrait cependant souligner les risques de ce retrait, notamment l’importance de la coopération sur le terrain. Donald Trump a d’ailleurs semblé faire partiellement machine arrière en décidant de maintenir des forces américaines pour tenir les puits de pétrole présents dans le nord-est de la Syrie. Il a justifié cette décision en expliquant qu’il souhaitait priver l’organisation terroriste de moyens financiers.

Un rapport de l’inspecteur général du Pentagone sur la lutte contre l’EI a en effet souligné, en août, que, selon lui, l’organisation « se ressaisit » en Syrie, en dépit des communiqués de victoire du président. « Malgré la perte de son [califat territorial], l’Etat islamique en Irak et en Syrie a renforcé ses capacités d’insurrection en Irak et a repris des forces en Syrie », a-t-il averti. Le rapport notait, deux mois avant le retrait d’octobre, que la diminution déjà engagée du nombre de forces spéciales avait eu un impact négatif en privant les Etats-Unis de la possibilité de surveiller des zones considérées comme de potentielles sources de recrutement.

Un précédent incite à la prudence. Les premiers succès de l’organisation Etat islamique, à la fin de l’année 2013, avaient été traités par le mépris par Barack Obama. Quatre mois plus tard, les miliciens d’Abou Bakr Al-Baghdadi s’emparaient de la grande ville irakienne de Mossoul, permettant à leur chef de proclamer un bref califat.

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lemonde.fr  | Par Allan Kaval | Publié le 28 octobre 2019

Avec la mort d’Al-Baghdadi, les Kurdes perdent leur ennemi et leur autonomie

Le commandant des Forces démocratiques syriennes, Mazloum Abdi, met en garde contre les risques de représailles après la mort du chef de l’organisation Etat islamique.

La nouvelle, non confirmée, mais attendue de la mort d’Abou Bakr Al-Baghdadi était connue depuis quelques heures dimanche 27 octobre au matin quand les Forces démocratiques syriennes (FDS) ont aligné près de la sortie de la ville frontalière d’Amouda une vingtaine de leurs véhicules militaires, tous drapeaux dehors. Le délai qui leur avait été imparti le 22 octobre par Moscou et Ankara pour quitter les villes kurdes de la frontière avec la Turquie, sous peine de subir une reprise massive de l’offensive d’Ankara, prendrait fin dans les vingt-quatre heures à venir. Sans dévoiler ce qui se tramait, un cadre du mouvement kurde assurait qu’il s’agissait « d’une bonne nouvelle pour tout le monde, pour la paix, pour l’humanité ».

Face à lui, une file de blindés de fabrication américaine, de pick-up surmontés de mitrailleuses antiaériennes, de camions militaires divers attendait sur le bord de la route, tournant le dos à la frontière turque. Combattants et combattantes arborent des uniformes propres et portent des armes bien huilées. Tandis que l’intervention d’Ankara va entrer dans la troisième semaine, la colonne militaire, qu’on croirait prête pour une parade de victoire, stationne sous le soleil à un peu plus de 10 km de la Turquie.

Il ne peut s’agir ici de faire la guerre, mais plutôt de mettre en scène un de ses tournants et, si possible, en sauvant la face. Il faut donc marquer le coup en offrant aux caméras des images de retrait ordonné de deux localités frontalières qui seront diffusées quelques heures plus tard, avant qu’une colonne de véhicules de la police militaire russe ne soit vue, roulant dans la direction opposée. Abou Bakr Al-Baghdadi est mort. La parenthèse kurde peut se refermer. A en croire la tournure qu’ont prise les évènements, elle ne serait désormais plus utile à personne.

Et pourtant, à 70 kilomètres de là, au sud des positions prises par les forces proturques, les échos de la guerre se font encore entendre. Dans l’hôpital de Tell Tamer, un volontaire international intégré aux unités de soutien médical des forces kurdes a compté 15 blessés et 4 morts amenés sur place à la suite des combats de la veille avec les groupes armés soutenus par Ankara, dans la région de Ras Al-Aïn. Le jeune homme affirme avoir reçu à l’hôpital des villageois bastonnés par les miliciens proturcs qui, selon lui, « se déchaînent dans la campagne ». Européen du Nord, il fait partie de ces centaines d’étrangers, souvent militants de gauche, à s’engager auprès des FDS, par adhésion à leur projet révolutionnaire.

Dans un bureau aux fenêtres occultées, un soignant, qui se fait appeler « docteur Azad », dit son amertume : « L’Etat islamique nous a attaqués. Nous avons été forcés pour survivre de faire alliance avec la coalition et de faire leur guerre loin de chez nous mais aujourd’hui Al-Baghdadi est mort. Et pour éviter le massacre, nous avons été forcés d’accepter cet accord entre les Russes et les Turcs. » Selon le médecin, au début comme à la fin de la guerre contre l’organisation Etat islamique, l’alternative des Kurdes syriens était de disparaître ou de placer leur destin entre les mains intéressées des grandes capitales.

Grands drapeaux délavés

Un adolescent est couché sur un brancard, des éclats d’obus de mortier dans la jambe gauche. « Ils ont repris un de nos villages ce matin », raconte à ses côtés le camarade Adnan, dont un gilet civil cache des chargeurs de kalachnikov. Sa cheville, entourée d’un bandage, le fait boiter. Il n’a pas entendu parler de l’accord annoncé quelques minutes plus tôt sur les réseaux sociaux. « La diplomatie, c’est loin. Je suis un combattant. On me dit d’aller combattre, je combats. » Une explosion retentit au loin. Justement, l’ordre de monter au front vient de tomber. Le camarade Adnan lâche sa cigarette. D’un pas rapide et incertain, il rejoint la camionnette à plate-forme qui l’emmènera à l’ennemi.

Dans la grande ville d’Hassaké, à moins d’une heure de route, les porte-parole des FDS s’apprêtent à prononcer leur déclaration sur la mort d’Abou Bakr Al-Baghdadi et à mettre en avant le rôle qu’ils affirment avoir joué dans l’opération. Ce n’est pourtant pas la joie de voir l’ennemi vaincu qui règne. Le président américain, Donald Trump, les a remerciés dans son discours. Le retrait américain n’en reste pas moins effectif et l’avenir de ceux qui ont délogé l’EI de Rakka, au prix de la destruction de la ville, toujours plus incertain. « Les cellules dormantes vont venger Al-Baghdadi. Donc on s’attend à tout, y compris des attaques contre les prisons », a averti Mazloum Abdi, le commandant des FDS.

Sur des mâts chancelants, les grands drapeaux délavés des forces kurdes pendent, en lambeaux. Les FDS vont continuer à se retirer de la frontière, la Russie est responsable du maintien de la paix, les gardes-frontières du « gouvernement central » se sont déployés, résume en répondant aux questions des journalistes Redur Khalil, un commandant des forces à dominante kurde. On ne parle plus de régime.

Le temps des tractations politiques avec Damas viendra bientôt. Mais avec quelles garanties pour les institutions autonomes des FDS, maintenant que le chef de l’EI est éliminé ? « Aucune », répond leur porte-parole, Moustafa Bali, au Monde, avec une franchise inhabituelle : « On ne peut travailler que sur la base de l’espoir. »

Cet espoir, selon M. Bali, est celui que Moscou tienne ses promesses, que le régime puisse trouver utile de faire quelques concessions en échange de l’intégration des FDS dans son armée dans la perspective de batailles futures et sur le fait qu’il puisse compter sur le caractère séculier de leur idéologie. Il répète une citation alambiquée sur la force comme condition du respect d’autrui. Avant de lâcher, d’un air fataliste : « Et nous, nous sommes devenus faibles. »

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Le Monde | Par  Madjid Zerrouky et  Allan Kaval | Publié le 28 octobre 2019

Mort d’Al-Baghdadi : l’EI a toujours su par le passé survivre à la disparition de ses dirigeants

Après la mort du « calife » autoproclamé samedi, le groupe djihadiste va devoir trouver une personnalité susceptible de maintenir sa cohésion sans sombrer dans des luttes de succession.

Le soulagement, mais nul triomphalisme en Syrie et en Irak, où la mort du chef de l’organisation Etat islamique (EI) a été accueillie avec prudence alors que les cellules clandestines du groupe djihadiste sont toujours actives et que le chaos provoqué par le retrait des forces américaines du Nord-Est syrien et par l’offensive militaire turque fait craindre une remontée en puissance de l’EI.

Si la mort de son chef laisse une organisation qui n’est plus que l’ombre de ce qu’elle a été les années précédentes, l’EI n’a jamais disparu depuis la perte de son territoire. Le groupe a toujours su par le passé anticiper et survivre à la disparition de ses dirigeants en attendant des jours meilleurs. Depuis le Jordanien Abou Moussab Al-Zarkaoui, tué en 2006, à Abou Omar Al-Baghdadi, mort en 2010, puis Abou Bakr Al-Baghdadi, tué dimanche.

La veille de la mort du « calife » autoproclamé, un responsable des forces antiterroristes kurdes de Syrie affirmait que, quel que soit l’état de décrépitude des capacités opérationnelles de l’EI, l’intervention turque en Syrie représentait pour les djihadistes une opportunité majeure.

Les premiers mouvements de regroupements de cellules dormantes de l’EI avaient déjà été enregistrés dans des régions périphériques afin de mener des attentats et des attaques ciblées contre les Forces démocratiques syriennes (FDS), l’alliance à dominante kurde qui contrôle de larges parts du Nord-Est syrien.

Côté irakien, c’est la déstabilisation de l’est de la Syrie avec, à la clé, l’ouverture du gigantesque camp de réfugiés et de détenus d’Al-Hol, où sont gardés des milliers de prisonniers et de membres de familles de l’EI, ainsi que des mouvements de populations marquées par un degré important d’affiliation à l’EI qui font craindre le pire.

« La question n’est pas de savoir si un nouveau conflit contre Daech va éclater, mais quand… », prévenait à la mi-octobre le général peshmerga kurde irakien connu sous le nom de guerre de Cheikh Ali et chargé de la frontière du Kurdistan autonome avec la Syrie : « Nous avons commencé à nous coordonner avec le gouvernement central qui a déployé de son côté des forces armées afin de bloquer la frontière. Ils sont très inquiets car ils savent qu’ils n’ont aucun moyen d’exercer un contrôle total au milieu du désert et que Daech a toujours des partisans dans l’ouest de l’Irak. »

Combler un vide

Reste pour le groupe djihadiste à trouver une personnalité susceptible de maintenir sa cohésion et de fédérer les différentes filiales nées de l’expansion de l’EI ces dernières années sans sombrer dans des luttes de succession. Il est d’ailleurs probable qu’Abou Bakr Al-Baghdadi ait désigné un successeur il y a un certain temps. Il devra pourtant combler un vide symbolique et religieux en se dotant d’un chef à même d’imposer sa légitimité sur la nébuleuse djihadiste.

Le porte-parole de l’EI et bras-droit d’Al-Baghdadi, Abou Hassan Al-Mouhajir, aurait lui aussi été tué dans le village d’Aïn al-Bayda dans le nord de la province d’Alep, près de la ville de Jarablous à la frontière avec la Turquie. Il a été la cible d’une opération « en coordination directe entre les renseignements des FDS et l’armée américaine », a annoncé dimanche le commandant en chef des FDS, Mazloum Abdi.

En 2014, l’EI avait proclamé Abou Bakr Al-Baghdadi « calife », en soutenant l’idée que sa famille, de la tribu des Badri, descendait directement de la lignée du prophète Mahomet, une condition indispensable. Nommera-t-il cette fois un « chef de guerre », comme il a pu le faire par le passé avant de proclamer Al-Baghdadi émir des croyants ? Ou restera-t-il dans la trame qu’il a ouverte à Mossoul en 2014 ?

Jusqu’ici, l’organisation a survécu à la perte de son « califat » territorial, qui n’a provoqué ni effondrement ni fractures. Le groupe a même lancé des campagnes d’attaques régulières en Irak comme en Syrie en renouant avec des tactiques insurrectionnelles qui ont signé sa montée en puissance dans les années 2000 en Irak.

Dans ce pays qui l’a vu naître, l’organisation se rétablit plus rapidement que ne l’anticipaient les services de sécurité. L’EI connaît parfaitement le terrain. La coalition soutenue par les Etats-Unis n’a pas cherché à sécuriser les zones d’où le groupe djihadiste a été expulsé après les combats et les forces de sécurité locales se montrent peu efficaces quand il s’agit de pourchasser les cellules dormantes de l’EI. Sans oublier les défis posés par la reconstruction physique des zones détruites et la gestion des séquelles et des traumatismes de la guerre.

L’organisation reste active au Yémen, aux Philippines, en Asie, et surtout en Afrique, où, de la Somalie au Nigeria, l’EI continue d’étendre ses ramifications.Contrairement à ce qu’avaient pu espérer les autorités des pays frappés par les filiales du groupe, celles-ci ont maintenu leur allégeance après la chute des bastions territoriaux du groupe en Irak et en Syrie. L’EI a créé et maintient une « marque » qui continue à attirer les plus radicaux et les plus sectaires, que les rivaux du réseau Al-Qaida, atomisé, ne parviennent plus à séduire.

Il est d’ailleurs significatif qu’Abou Bakr Al-Baghdadi a passé les derniers jours de sa vie protégé par des hommes issus d’un groupe proche d’Al-Qaida, que l’on pensait pourtant hostile à l’EI, et dans une région, le nord-ouest de la Syrie, d’où les partisans d’Al-Baghdadi avaient été chassés en 2014 mais où l’organisation est de retour.